Prologue

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Du haut d'une falaise surplombant la mer, une petite fille d'à peine six ans contemplait la vue. Elle restait immobile pendant des heures dans l'espoir d'apercevoir celui qu'elle attendait avec impatience.

Six mois plus tôt, son père, prénommé Owel, les avait quittées, sa mère et elle. ll avait été appelé au Canada, d'où sa famille était originaire, pour s'occuper, disait-il, de l'héritage familial. Owel avait promis à sa fille et à sa femme de revenir auprès d'elles le plus rapidement possible. Pourtant, les minutes, les heures et les jours s'égrenaient et il ne revenait pas. Sa fille avait toujours espoir de le revoir et, chaque jour, elle avait pris l'habitude de se rendre sur la falaise.

C'était la plus belle vue de la Côte d'Or, en Australie, et, de cet endroit, la fillette avait l'impression de voir l'extrémité de la Terre. C'était certain qu'elle verrait ainsi son père arriver et qu'elle pourrait le rejoindre aussitôt que son bateau apparaîtrait sur les flots.

Hélas, encore une fois, ses espoirs demeurèrent vains. Le soleil se couchait sur l'océan lorsqu'elle poussa un long soupir de découragement. Sa mère avait cessé d'espérer lorsqu'elle n'avait plus eu de ses nouvelles, pourtant, la petite persévérait à penser que son père avait eu un retard ou un imprévu. Elle continuerait d'attendre encore et encore, même si elle devait venir tous les jours de sa vie sur cette falaise !

Alors qu'elle regardait une dernière fois la superbe vue qui s'offrait à elle ce jour-là, un mouvement sur la plage en bas du cap attira son attention. C'était un endroit plutôt dangereux et rares étaient les touristes qui s'aventuraient là. Elle plissa les yeux en essayant de distinguer ce qui remuait ainsi à travers les rochers, puis, lorsqu'elle discerna un bras et une tête, elle réagit et dévala le plus rapidement possible le sentier qui rejoignait la plage. Elle y parvint en moins de cinq minutes et sauta de rochers en rochers jusqu'à parvenir à l'endroit où un garçon était coincé. Il paraissait dans une très mauvaise posture. La moitié de son corps se trouvait sous les flots et sa tête, tournée vers ciel, peinait à rester hors de l'eau. D'ici quelques minutes, la marée montante l'engloutirait.

La fillette réfléchit rapidement à une idée afin de sauver le garçon qui paraissait à peine plus vieux qu'elle. Il l'implorait de ses yeux bleus perçants pour qu'elle l'aide. Le regard de la petite intrépide se posa alors sur une grosse branche qui gisait sur la plage, emportée jusque là par le courant. Sans plus tarder, elle souleva le morceau de bois et l'utilisa comme levier. Au bout de plusieurs tentatives, la fillette réussit miraculeusement à faire bouger les entraves rocheuses. Le garçon put enfin se dégager de sa fâcheuse position. Elle lui fit signe de la suivre et ils regagnèrent ensemble la plage.

- Merci, dit alors le garçon. Tu m'as sauvé la vie.

La petite fille rougit, embarrassée.

- C'était tout à fait normal, répondit-elle. Je t'ai vu de là-haut.

Elle pointa le sommet de la falaise où elle se trouvait quelques instants auparavant.

- Tu n'as pas peur de tomber ? interrogea le garçon. C'est très haut...

- Non. J'attends mon père. Il est parti il y a quelques mois et j'ai hâte qu'il revienne.

Il hocha la tête et ajouta :

- Fais tout de même attention. Le courant est si fort que si tu tombais, tu te noierais instantanément.

- Je sais nager !

- Ce ne serait pas suffisant. Moi aussi je sais nager et regarde ce qui a failli m'arriver. Si tu ne m'avais pas aidé, je serais mort. Je t'en serai éternellement reconnaissant.

Mal à l'aise, la fillette baissa la tête vers ses pieds qui s'enfonçaient dans le sable blanc.

- Comment t'appelles-tu ? lui demanda alors le garçon.

- Bess et toi ?

- Rem.

Le garçon regarda la mer et dit soudain :

- Je dois partir.

- Non, reste ! s'exclama Bess.

Rem lui adressa un grand sourire et, à son grand étonnement, détacha un bracelet de son poignet.

- Je te le donne, lui dit-il. De cette façon, nous serons amis pour la vie et nous nous retrouverons toujours.

La fillette le prit délicatement et observa les belles pierres briller.

- Merci, je vais toujours le garder sur moi.

- Tant mieux ! J'en ai un autre identique que je porterai également. Au revoir, Bess. Nous nous reverrons, je te le promets.

Et il l'abandonna en prenant soin de ne pas retourner près des rochers dangereux. Au lieu de cela, il courut sur la plage et disparut de l'autre côté de la falaise, laissant Bess seule avec le présent qu'il lui avait offert.

Les années passèrent et jamais Bess ne le revit ; son père non plus d'ailleurs.

La saga des Syrès : Origines ( Publié aux Éditions du Tulinois)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant