Chapitre 1.

10 1 0
                                    

Clara Moreau patiente dans la salle d’attente de Simon Schmitt, le notaire de la ville, pour venir ouvrir le testament de son défunt époux. Elle a dû mal à cacher sa joie et son sourire niais derrière son châle noir. Seulement trois ans de mariage et le vieux a fini par claquer, elle venait de réussir le coup de poker de sa vie. La jeune veuve n’avait que trente et un ans et elle allait toucher une somme colossale grâce au business de l’homme qu’elle avait épousé, plus par nécessité que par réel amour. De plus, il lui restait du temps devant elle, bien assez pour dépenser son argent en toute tranquillité. Elle plongea sa main dans son sac, tout aussi noir que le reste de sa tenue de deuil et en sorti un petit flacon a pipette contenant du sérum physiologique. Elle déposa plusieurs gouttes du liquide sur ces globes oculaires, jusqu’à ce que le surplus ce déverse sur son visage. Après avoir pincée ses joues pour les rendre rouges, elle s’avança vers le miroir à côté de la porte d’entrée de la salle, qui en soi n’était que peu esthétique avec ses murs trop blanc et ses peintures dites ‘’artistiques’’. Son reflet lui renvoyait l’image d’une personne en deuil et c’était exactement ce qu’elle souhaitait. Avant que l’heure du rendez-vous sonne, elle s’entraîna à faire trembler sa lèvre inférieure pour se donner un petit air dramatique.

Dans la pièce à côté, Monsieur Schmitt attendait que son horloge lui indique qu’il était temps d’aller chercher sa cliente. Il était assis à son bureau, se tenant droit, les mains croisées au-dessus de l’enveloppe testamentaire de son ancien client. Il était impatient de pouvoir réconforter Madame Moreau, car quand son mari était encore de ce monde, il n’avait jamais pu exprimer les sentiments qu’il éprouvait pour elle. Peut-être qu’ils ne s’étaient croisés qu’à des soirées organisées par la haute société de la ville et n’avait pas eu l’occasion de discuter ensemble à peine une ou deux fois, mais c’était déjà bien assez pour savoir qu’il la voulait. Il se surprit à rougir en imaginant que sa Clara allait lui tomber dans les bras dès qu’il lui déclarera son amour. Pourtant il n’était pas si pressé de le faire, elle venait de perdre son époux et elle était encore sous le choc. A l’enterrement elle avait même failli sauter dans le trou avec le cercueil, ce qui avait provoqué un certain remous chez les invités qui pensaient qu’elle ne s’était mariée que pour la sécurité que lui offrait Christian Moreau, son ainé de près de trente ans.

Quand l’horloge lui indiqua qu’il pouvait enfin accueillir sa cliente, il s’empressa d’aller remettre en place sa cravate et se recoiffer un petit peu ses cheveux qui commençait à se teinter de gris. Il ne voulait pas la faire attendre, mais il souhaitait être le plus présentable possible devant elle. Ensuite, il se précipita vers la porte de son bureau qui donnait sur la salle d’attente et l’ouvrit d’un mouvement sec. Clara était en train de s’arranger devant le miroir et elle parut gênée qu’il l’a voit ainsi. Elle se dépêcha de prendre son sac et de tendre la main au notaire.

<<Bonjour, faisons vite s’il vous plait. >>

Sa main était légèrement tendue, de manière quasi imperceptible, pendant que Monsieur Schmitt lui serra la main et l’invita à rentrer dans son bureau. Voulant mettre à l’aise sa cliente, il se dirigea vers une large commode où trônait quelques bouteilles en cristal.

<<Vous voulez boire quelque chose ?

-    Non, j’aimerai ne pas trop m’attarder. Je ne suis pas en très grande forme, je pense que vous comprenez pourquoi. >>

Elle fit trembler sa lèvre inférieur pour essayer de persuader le notaire de se dépêcher de lui annoncer ce que son mari a bien pus lui laisser. Simon Schmitt comprit que sa cliente était à fleur de peau et ne chercha pas à faire plus d’amabilité. Le testament de feu Christian Moreau se trouvait déjà sur son bureau, personne n’avait encore pu le lire et la tension était palpable. Pourtant le notaire et Clara s’avaient très bien que vu l’amour que portait le défunt à sa femme, il devait lui avoir laissé l’entièreté de sa fortune et leur maison conjugale. A l’aide d’un ouvre-lettre orné, Monsieur Schmitt ôta le sceaux qui scellé l’enveloppe contenant le précieux testament. Celui-ci contenait une simple feuille, à peine remplie. Il s’éclairci la voix et fit la lecture à sa cliente.

<<Je soussigné Moreau Christian, née le…. >>

Clara ne tenait plus et se mit à sangloter facticement. Elle cacha ses mains dans son visage pour cacher son absence de larmes.

<<Abrégez… c’est trop dur à entendre.

-    D’accord Madame. Alors, il lègue l’ensemble de sa fortune à l’Etat, dont ses biens immobiliers. Et c’est tout, il n’y a aucun paragraphe vous concernant.

Pendant un instant, il ne put reconnaître la femme pour qui son cœur battait. Elle se leva et plaqua les paumes de ses mains sur le bureau. Sa voix trahissait une certaine colère.

<<Comment ça ?!  Ce n’est pas normal, je vais faire comment ? Je n’ai plus rien !>>

Simon Schmitt tenta de la calmer.

<<Ne vous inquiétez pas, je peux vous laisser une semaine avant de venir saisir la maison.

-    Une semaine ! Vous vous moquez de moi ? Donnez-moi ce fichu torchon !>>

Clara lui arracha des mains et analysa chaque phrase pour trouver une preuve que c’était un faux ou que le notaire à mal compris ou lu ce qui était écrit. Elle se déplaçait d’un pas pressé à travers le bureau remplis de vieux meubles peint en noir. Le notaire n’osait plus parler et ne faisait qu’observer la démarche de lion enfermé dans une cage de sa cliente. Mais quelque chose attira l’attention du notaire qui essaya de l’interpeller.

<<Vous devriez tourner la feuille, je crois qu’il y a un texte au dos de celle-ci. Comme vous bougez beaucoup, je ne peux le lire.

-Mais oui, bien sûr ! Mon enfoiré de cadavre de mari se serait amusé à laisser un petit mot quelconque derrière son testament en sachant que ça n’aura aucune utilité dans la passation de son immonde héritage !? Vous me prenez pour une idiote, ou quoi ?>>

Elle s’approcha, les joues rouges de colère de Monsieur Schmitt et lui mit la feuille à même pas un cheveu de son visage. Celui-ci en profita pour tourner la feuille et laissa une Clara interloqué lire le message. Ses yeux s’écarquillèrent et elle demanda à Simon de lui lire à voix haute pour être sûre qu’elle n’avait pas mal vu.

<<Ma douce Clara, si tu lis ceci c’est que tu viens d’apprendre que je ne te lèguerais absolument rien. Pourtant, mon amour pour toi m’empêche de te laisser sans un sous pour vivre. J’ai donc caché dans notre maison de quoi te permettre de vivre tranquillement pendant au moins une vingtaine d’année. Je suis sûr que tu trouveras tout assez rapidement, même si je ne l’espère pas trop. Bonne chance mon amour. >>

Il la regarda comme un idiot, rien ne pouvait sortir de sa bouche. Il ne savait pas comment réagir à cette nouvelle, contrairement à la veuve. Clara prit ses affaires et entreprit de rentrer chez elle pour fouiller l’entièreté de la maison. Dans un élan de clarté, il essaya de lui proposer de venir dîner avec lui, mais elle avait déjà quitté le bâtiment.

Clara MoreauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant