Chapitre 5.

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L’éclairage des toilettes étalait une lumière fade sur le visage de Clara. Elle avait réussi à fausser compagnie au notaire en prétextant une envie pressante qu’elle ne pouvait contenir. L’homme lui avait sauté dessus quand elle lui annonça qu’elle acceptait de lui donner son amour. Il avait écrasé ses lèvres contre les siennes dans un geste d’allégresse trop intense et leurs dents s’étaient entrechoquées de manière désagréable. De plus, il ne possédait aucune délicatesse et avait failli lui taper la tête contre le mut derrière elle. Elle a même dû se retenir de le repousser quand il a commencé à descendre l’une de ses mains sur ses fesses. Elle secoua la tête, laissant voler des mèches de cheveux devant ses yeux. Elle n’avait pas le temps de se lamenter sur ce qui venait de se passer, elle devait penser à comment elle allait se débarrasser de Monsieur Schmitt.

Madame Moreau savait qu’il était plus fort qu’elle et que si elle l’attaquait de front, elle échouerait. Il fallait qu’elle trouve un moyen rapide et efficace de l’immobiliser ou de le rendre inapte à se défendre. Elle se frotta les tempes, essayant de faire apparaitre la solution miracle qui lui permettrait de pouvoir ôter la vie de Simon Schmitt sans qu’il puisse se défendre. Elle pense à l’inviter à rester dormir, comme ça elle pourrait l’étouffer en lui appuyant un cousin sur le visage. Or, elle se rappela ce que ce genre d’invitation avait pour habitude d’enflammer une chaleur lubrique au creux des reins de certains hommes. Elle refusait de se laisser toucher de cette manière, surtout par une personne qu’elle désirait, pour ainsi dire, autant qu’une bouche d’égout. Il lui fallait un plan imparable et vite, elle ne pouvait pas rester indéfiniment enfermée dans cette pièce sans éveiller de soupçon.

Le notaire qui était resté seul dans la salle à manger, attendait avec impatience que sa future femme lui revienne. Cela faisait bien une bonne quinzaine de minutes qu’elle s’était éclipsée et elle lui manquait beaucoup trop. Il était fou amoureux et ces sentiments envers sa Clara l’emplissaient d’un bonheur infini. Pour lui, cet amour représentait la dernière chose qui lui manquait dans vie et plus précisément dans sa réussite personnelle. Maintenant qu’il avait un travail honorable, de l’argent à foisons et une femme d’une beauté supérieur à la normale, il ne lui restait qu’à faire des enfants. Il se voyait déjà entouré d’une fratrie de petits marmots qui jouait autour de lui dans son jardin avec son épouse qui les observait depuis la terrasse de la cuisine, un sourire radieux collé sur son visage.

Des bruits de pas provenant du couloir le sortirent de sa rêverie et un corps chaud vint se blottir contre lui.

<<J’aimerai fêter notre bonheur comme il se doit, autour d’une bonne bouteille.

- Le meilleur alcool pour cela serait le champagne, en avez-vous ?

- Je ne crois pas, mais il y a une dizaine de bouteilles de liqueur plus fortes dans la (commode à alcool). Et je préfèrerais qu’on se tutoie maintenant que nous sommes unis. >>

Elle déposa un baiser sur sa joue pour accompagner sa dernière phrase, avant d’aller chercher deux verres à bourbons et une fiole longiligne fermé par un bouchon en forme de globe terrestre. Le liquide ambré fut versé et vite porté aux lèvres des deux nouveaux amants. Le visage de Simon devenait de plus en plus cramoisi au fur et à mesure que son verre se vidait et se remplissait pendant que celui que Clara tenait dans les mains semblait ne pas diminuer. Il riait à s’en étouffer avec le liquide qui descendait dans sa gorge en lui brûlant le tube digestif, il ne sentait plus la douleur et ne voyait même plus qu’il était le seul à monter jusqu’à l’ivresse. Ces jambes s’affaissaient sous son propre poids et il s’effondra à moitié sur la table. Des mains le saisirent avant qu’il tombe sur le sol et le firent s’asseoir sur une chaise dans un équilibre assez précaire. Il se mit à chuchoter des mots doux destiné à la personne qu’il considéré comme sienne. Les effluves d’alcool teintant sa voix, finirent par créer une suite de phrases sans queue ni tête, mais ponctué de manière salace.

Les molécules d’éthanol naviguaient dans ses veines et embrumaient ses sens. Les images captées par ces yeux étaient mal comprises par son cerveau et lui renvoyaient des scènes brouillées, parasitées. Il cherchait, en tâtonnant, la présence de Clara qui avait subitement disparus. Une panique absurde s’empara de lui et il partit à sa recherche. Se cognant et trébuchant à travers la salle à manger, il finit par atterrir lourdement dans le couloir. A quelques pas de lui, il vit que la lumière de la cuisine était allumée. Le notaire se leva difficilement et se dirigea vers la pièce en manquant de s’ouvrir le crâne sur le coin d’un meuble. A peine avait-il franchi le seuil de l’encadrement de la porte, une silhouette méconnaissable se dessina au centre de sa vision. La peur le prit aux tripes, un des premiers instincts de l’Homme lui envoyait des signaux lui indiquant qu’il y avait un danger. Son regard se posa sur un objet de la taille d’un demi-avant-bras, tranchant et reflétant la lumière. La source du danger se trouvé là, dans les mains de l’inconnu, c’était un long couteau de cuisine pouvant s’enfoncer dans la chair de quelqu’un avec peu d’effort tellement il était aiguisé.

Simon fut saisit d’une panique paranoïaque, pour lui, cet intrus voulait ruiner l’avenir somptueux qui l’attendait. A peine possédé-t-il une femme qu’on voulait déjà lui arracher, il pouvait comprendre la jalousie humaine, mais il se refusait à la tolérer. L’étranger semblait désemparé depuis qu’il était entré dans la pièce, et restait immobile tenant son arme à deux mains. L’amoureux ne réfléchit pas et chercha à mettre hors d’état de nuire son ennemi. Celui-ci tenta de se défendre, mais en vain. La fureur de Monsieur Schmitt était impossible à arrêter ou à esquiver. Il finit par récupérer le couteau et le leva au-dessus de sa tête.

<<Tu vas voir espèce d’enfoiré ! Personne ne peut me séparer de ma Clara !>>

Les coups s’abattirent et une immense flaque de sang se créa sur le sol. Le notaire, triomphant, hurlait comme un damné.

<<J’ai réussi, j’ai sauvé ma Clara ! Elle va être si fière de moi quand je vais lui raconter. >>

Il sortit en titubant de la pièce et repartit à la recherche de sa dulcinée. Il l’appelait si fort, qu’il aurait pu perdre sa voix, mais elle semblait ne pas l’entendre. Il pleurait de rage et courrait à travers la maison s’inquiétant de plus en plus de ne pas avoir de réponse. Il se mit à penser que la personne qu’il avait tué lui avait peut-être fait du mal et il retourna sur les lieux de son crime. C’est à ce moment-là qu’il revit la femme qu’il aimé, allongée sur le sol de la cuisine, entrain de rendre ses derniers soupirs.

Fin.

Clara MoreauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant