Chapitre 2.

3 1 0
                                    

Le gigantesque portrait du défunt trônait en face de la fenêtre et avait une vue complète sur l’entièreté de son bureau. Clara ne s’était accordée qu’une rapide pause thé avant de débuter les fouilles. Elle voulait commencer par la pièce dans laquelle son mari passé le plus de temps. L’endroit n’était pas si vaste, mais elle ignorait par où commencer pour faire ça rapidement et en restant minutieuse. La prochaine semaine allait passer très vite et en vérité, elle n’avait ni le temps, ni l’envie de réfléchir.

Elle décida de vider tous meubles et d’analyser leurs contenus, histoire de trouver des indices qui pourrait l’aider à réduire son champ de recherche, voire de trouver l’argent. Tout y passa, les portes des meubles, les tiroirs, les vases, les factures, les papiers administratifs, les stylos, un vieux mouchoir usagé, les serrures, les cadavres d’insectes, les pistils séchés, les cheveux et les grains de poussière, tout fut inspecté soigneusement jusqu’à la nuit tombé.

Vers le milieu de la nuit, le bureau, si on peut encore l’appeler ici, était un champ de bataille. Les meubles avaient éclatés et vidés de leur entrailles, tandis que le portrait de Monsieur Moreau avait été lacérés jusqu’à ce qui n’en reste que de minuscules lambeaux. Même la porte n’avait pas était épargné. Clara se trouvant en dehors de la pièce, juste devant l’entrée, regardait le carnage qu'elle avait commis. Elle était plutôt fier de son œuvre, quoique déçue de ne pas avoir trouvé ce qu’elle cherchait.

Après avoir réussi à se convaincre qu’aller dormir était la meilleure solution à une heure si tardive, Madame Moreau se glissa sous ses draps et essaya de trouver le sommeil. Au début, la fatigue physique prit le dessus et elle somnola pendant un certain temps, mais ces pensées finirent par se tourner vers la quête de la fameuse somme d’argent. Elle planifia mentalement ses futures expositions, et s’imagina plusieurs scénarios possibles de la découverte du trésor. Comme elle n’arrivait pas à canaliser son impatience, elle finit par sortir de son lit et entama les recherches dans la pièce où elle se trouvait.

A la lumière artificielle des lampes de la chambre à coucher, Clara fit le même manège que dans le bureau de son mari. D’abord elle renversa les meubles et étala leurs contenus sur le sol pour avoir une vue d’ensemble. Chaque objet fut observé avec autant d’attention que le ferait un biologiste étudiant une cellule au microscope. Cela ne donna aucun résultat concret, à part le fait d’avoir mis de côté tous les bijoux, que Monsieur Moreau lui avait offert. D’ailleurs, il avait fait graver ‘’Christian’’ sur chaque joyaux. Elle espérait pouvoir les revendre si elle ne trouvait pas l’argent, même si ils ne lui rapporteraient pas assez pour être tranquille. Rien que de penser au fait qu’elle devrait peut-être aller travailler et aussi dénicher un nouveau mari, riche de préférence, lui faisait mal au ventre. Elle entreprit de démonter chaque meubles pour pouvoir inspecter les endroits qu’il ne lui était pas possible d’examiner, elle avait trop peur de louper la moindre indication. A l’aide d’un pied de biche trouvé dans un débarras, elle fit sauter les vis, les clous, les soudures et les points de colle. Elle avait même déchiré les draps, les oreillers et le matelas. Devant elle s’étendait une véritable déchetterie, et aucune trace de l’objet de sa quête.

Le petit matin était déjà bien installé et son corps réclamait des nutriments essentiels à son bon fonctionnement. Le fait de n’avoir rien ingurgité depuis un petit moment et d’avoir fait une chasse au trésor avait fini par réellement épuisé son organisme. Elle se traîna jusqu’à la cuisine et tenta d’improviser une sorte de sandwich avec ce qu’elle trouva dans ses placards. A la suite de son repas, Clara s’accorda une tasse de café bien serré histoire de ne pas s’écrouler de fatigue, elle n’avait pas le temps pour ça. Cependant, ce n’était pas l’envie qui lui manquait d’aller se taper un petit somme. Elle tenait difficilement sur ses jambes et n’était plus vraiment en état pour poursuivre les fouilles.

Quand elle réussit à se résoudre à aller dormir ne serait-ce qu’un peu, la sonnette de la maison retentit. En regardant dans le judas, elle aperçu Monsieur Schmitt attendre droit comme un poteau devant sa porte. Il tenait dans ses mains un bouquet de rose plus gros que lui et semblait ne pas vouloir partir puisqu’il appuya sur le bouton de la sonnette une deuxième fois. Madame Moreau lui ouvrit la porte, avec une certaine réserve. Elle n’était pas d’humeur à recevoir quelqu’un, surtout une personne aussi plate et inintéressante que le notaire. L’homme entra et tendit les fleurs à la maîtresse de maison qui les prit avec une fausse joie. Elle esquiva les essais d’embrassade amicale de son invité en prétextant une fièvre inconnue survenu dans la nuit et vu la tête qu’elle avait, l’excuse fut acceptée. Pendant que Clara déposait les fleurs rougeoyantes dans un vase, qu’elle brisera surement plus tard, Simon Schmitt prit place sur une chaise de la table de la salle à manger. Il jouait nerveusement avec ses mains placées devant lui et ne quittait pas sa cliente du regard. Elle savait que si elle s’asseyait, elle allait s’assoupir, donc elle resta debout dans l’embrasure de la porte, les bras croisés devant sa poitrine. Pour lancer le dialogue, le notaire lui demanda où elle en était dans ses recherches, ce qui provoque une réaction immédiate de Clara.

<<Ça vous regarde ? Vous pensez que la vente des biens de mon mari ne vous rapportera pas assez ?

-Non, non…

- Vous voulez en plus me prendre la seule chose qui me reste, vous êtes ignoble !>>

Elle tremblait des pieds à la tête et s’effondra au sol en pleurant. Monsieur Schmitt s’approcha doucement d’elle, il comprenait bien qu’elle était à bout de nerf à cause de cette histoire. Le deuil, l’annonce du testament et maintenant l’inquiétude de ne pas s’en sortir, cela devait être très éprouvant. Il posa sa main sur l’avant-bras de Clara qui le rejeta avec le peu de force qui lui restait.

<<Sortez de chez moi !

-D’accord, mais si vous avez besoin de quoique ce soit, contactez moi. >>

Il sortit de la maison en prenant soin de bien fermer la porte, laissant Madame Moreau au sol. Celle-ci n’arrivait même pas à s’inquiéter du fait que la porte n’était pas fermée à clefs. Elle finit par s’allonger par terre et tomba dans un sommeil agité.

Clara MoreauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant