Chapitre 4 : déchéance programmée

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Chapitre 4 : déchéance programmée

Cela faisait longtemps que j'étais assis dans mon appartement. Je ne savais plus exactement combien de temps précisément. Assis contre le mur, en face de ma fenêtre, le regard voilé et vide, fixé sur la pleine lune de cette nuit froide. Je me concentrais sur le rythme de ma respiration. Seulement ma respiration et rien d'autre. Je m'attellais avec rigueur à inspirer puis à expirer.

Mon corps était engourdi et des milliers de fourmis le traversaient avec inconfort. Pour autant, je ne bougeais pas. Pas vraiment intéressé à répondre aux besoins primaires de celui-ci. Je préférais rester dans la douleur ankylosée. J'avais l'habitude. La douleur était mon amie et je savais l'apaiser quand elle faisait trop de bruit.

C'était fait. J'avais fais en sorte de calmer la tempête qui m'avait terrassé ce soir. J'avais appuyé sur pause. Je me retrouvais avec complaisance dans la pétrification et le silence si chers à mon bien-être. Clairement, ça ne faisait plus mal, ça ne me dérangeait plus.

Je ne voulais pas passer par toutes les étapes de la colère, le déni, la douleur, la tristesse ... C'était simple, je ne voulais pas guérir, je ne voulais pas entendre les sempiternelles questions de mes proches. Les "que se passe t-il Kakashi ?" de Kurenaï , "tu m'as l'air fatigué dis donc ?" de Gaï, les " on ne t'entends pas en ce moment..." d'Asuma. Ils étaient mes amis les plus proches mais j'étais un solitaire dans le fond. Et ce, depuis toujours. Je ne discutais pas de ma tristesse et de mes déceptions. Il n'y avait qu'une personne à qui j'en parlais et maintenant je revenais aux basiques. Ils allaient me poser des questions pour rien. Car je ne pourrais jamais leur donner une raison valable de toute façon. Alors qu'aurais-je répondu à leur doléances inquiètes et leurs regards triste ? Non c'était fait, la douleur, je l'avais balayé.

Je ne voulais plus qu'il soit ma faiblesse, la seule faiblesse du grand ninja copieur. Ce ne pouvait pas être comme ça. Car Kakashi Hatake, n'était pas proche de l'autre, ne le tenait pas dans son coeur, si précieusement, comme un joyau que l'on souhaite garder rien que pour soi. Kakashi Hatake, ne faisait pas ça. Il était juste celui qu'il était, un ninja de Konoha. Rien d'autre.

Il ne fallait pas avoir peur de se dire et de réaliser qu'on était seul, car après que l'on ait dépassé ce postulat : on s'adaptait puis on évoluait. Cela me permettait à moi, de ne jamais dévier de ma voie du ninja : être le meilleur ninja. Je savais tuer, je savais sauver, je savais protéger et je savais torturer. J'étais une arme. Et les armes n'ont pas de faiblesses. Je m'étais écarté de cette voie trop longtemps. Il me fallait revenir dans le droit chemin.

C'était ma vie, mon destin. J'avais accepté depuis longtemps ma destinée et j'avais laissé la faille s'ouvrir trop longtemps. Il fallait la refermer, la suturer, mais pas de problèmes...

J'avais programmé la déchéance.

Sur ce point aussi j'étais talentueux. Je ne souffrais pas comme les autres, je ne prenais pas le temps de "guérir". J'effaçais tout. J'avais appris toute ma vie à éviter les sentiments. J'étais maintenant parré. J'avais installé un voile fin mais puissant devant moi, tel une carapace où me renfermer. Ca ne me déchirait plus. C'était fini. J'avais tout bloqué. Simplement, bloquer toutes émotions. Je les avais aspirées, je les avais envoyés paître. Et c'était bon, je ne pensais plus à rien. Je savais le faire, ce n'était pas la première fois que je le faisais. Je forçais mon cerveau à se taire, à se stopper. Je l'avais déjà fait auparavant. C'était bien connu : j'étais plein de ressources.

Alors que ma pupille rougeoyait avec puissance dans les ténèbres de la nuit, j'étais complètement transis dans un brouillard confortable et sombre. Si je voulais ressentir quelques choses, je n'aurais plus qu'à mettre ma main au feu afin de pouvoir ressentir une douleur physique. Car ma douleur émotionnelle était éteinte.

Je me sentais vidé. Tel un corps sans réflexion, dans une caverne vide, immense et sombre. Telle la roche froide et immobile, je n'avais plus aucune raison de réfléchir, plus aucune raison de ressentir quelque émotion que ce soit. J'allais juste rester assis et me contenter de respirer. Me concentrer sur la rondeur et la lueur nacrée de la lune sous mes yeux. Sans me poser de questions. J'étais bien éveillé mais à la fois, ma tête et mon coeur s'étaient endormis. L'apaisement était revenu. Je pouvais passer à autre chose comme me concentrer sur ma respiration par exemple.

Le ciel changeait de couleur car le jour se levait. Combien de temps étais-je resté assis là ?

Je n'en savais rien. Je m'en fichais. Il me fallait partir. Partir en mission. Faire encore et toujours ce pourquoi j'étais né.

Mon corps se souleva seul, sans réfléchir, c'était agréable. Ne pas avoir à réfléchir. Je laissais donc faire et mes jambes se dirigérent vers la porte. Je laissais mon instinct prendre le dessus sur mon cerveau et ma conscience. Il me guiderait à mon objectif : traquer l'Akatsuki. C'était simple, mon corps était habitué, c'était toujours la même rengaine. C'était des automatismes.

Je me téléportais à la sortie sud de la ville. La fraîcheur du matin me mordit le visage alors que j'effectuais les mudras nécessaires à ma technique, mordais mon pouce et posais ma main au sol pour concentrer mon chakra, en annonçant :

" - Invocation !"

Toute l'Escouade des Crocs Traqueurs apparut ensemble. A ma piètre vue, les chiens ninja commencèrent à hurler à la mort, en coeur, de leur cris plaintifs dans un bruit assourdissant. Je ne disais rien. Je gardais mes mains dans mes poches, attendant patiemment que leurs gémissements et leurs doléances se terminent. Pakkun s'approcha de moi avec un regard très sérieux pour me demander de sa voix si humaine :

"- La meute est prête. On se remet en piste alors ?

"- Oui, nous repartons." Je répondais sérieusement.

"- La meute ne posera pas plus de questions Kakashi, par contre... tu es sur de toi ? Car même les animaux ressentent les choses tu sais ?"

J'éludais sa question en répondant durement :

"- Nous avons une mission à accomplir."

Pakkun baissa la tête, comprenant qu'il n'y avait plus rien à faire pour moi.

"- Shiba." Appela Pakkun.

Le chien loup de la meute s'avança vers nous, finissant de japper. Son poil grisonnant et fourni complètement hérissé d'avoir hurlé. Ses yeux bruns croisèrent mon regard dur. Il s'avança devant Pakkun et attendit les ordres.

"- Tu resteras à Konoha pour prévenir le Hokage si nous avons besoin de renfort ou si quelque chose nous arrive." Annonça Pakkun.

" - Bien." Répondit le chien ninja, Shiba.

J'ajoutais sèchement :

"- De plus, je veux que tu veilles chaque jour à ce que rien n'arrive à Iruka Umino. Ne te fais pas voir. Je veux un rapport fréquent de ce qu'il se passe pour lui. Si quoi que soit d'anormal arrive, je veux être immédiatement être mis au courant."

J'avais toujours une mission de protection à honorer envers Iruka et sentiments ou non, je tiendrais mes valeurs en place. Je le protégerais, peu importait le prix à payer.

Pakkun, leva soudainement la tête vers moi :

"- Kakashi, nous sommes des chiens ninja, nous ne laiss ..."

"- Je me fiche de vos états d'âmes. Nous avons une mission à mener à bien. Nous ne pouvons pas perdre plus de temps."

Pakkun plissa ses yeux de chiens, me toisant durement, puis finit par grogner :

"- Je n'aime pas ça du tout... allons y. "

Il adressa un coup de tête à son camarade chien loup, puis hocha la tête vers moi. Je lançais notre départ.

"- En route ! "

Nous nous élançâmes dans la forêt, nous devions déchiffrer les plans de l'Akatsuki. Ce ne serait pas simple mais ce n'était rien que notre meute ne pourrait surmonter. 

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