Ma troisième année : le nouveau départ

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À l'automne 2004, j'ai donc commencé à étudier dans une nouvelle école. J'étais dans la semaine chez ma mère et, même si nous vivions dans la rue derrière l'école, nous avions trouvé le moyen d'être en retard. J'étais déjà dans tous mes états, disons que ça n'a pas aidé. Camille, elle, était déjà arrivée. J'avais demandé à ce qu'on soit dans la même classe. Finalement, j'ai atterri dans un groupe de deux classes mélangées, avec deux enseignantes, et Camille en faisait partie. Les professeurs s'appelaient Julie et Bénédicte. Elles étaient sympathiques et avaient réussi à me faire aimer l'école.

En effet, je suis devenue une des meilleures élèves de ma classe. J'avais de bonnes notes et j'étais appréciée pour mon bon comportement. Je ne savais pas trop pourquoi à ce moment, mais j'avais vraiment besoin que mes enseignantes m'aiment plus que les autres. Je DEVAIS être la meilleure.

Je voulais aussi que les éducatrices du service de garde m'apprécient. Je cherchais une échappatoire à mes problèmes, et j'espérais pouvoir me confier à quelqu'un; ce que je n'avais jamais fait. Malheureusement, personne ne semblait se rendre compte que je n'allais pas bien. Je me dis que, si j'avais eu de moins bonnes notes ou un mauvais comportement, on aurait peut-être porté attention à moi, mais je passais sous le radar...

Je pense quand même que les adultes de mon école se doutaient qu'il se passait quelque chose, mais qu'ils ont choisi de laisser ça aller.

Comme j'étais avec des jeunes qui ne me connaissaient pas, j'ai décidé de cacher ma manie aux autres; au lieu de le faire sous mon nez, je le faisais sous le bureau ou quand j'étais seule.
C'était devenu mon secret. Je souhaitais être capable d'en parler à un adulte à l'école, mais je n'y arrivais pas et ça me pesait.

Comme j'ai dit plus tôt, mon père m'encourageait beaucoup dans mes études, mais il me mettait vraiment trop de pression. Il me faisait étudier cent fois plus fort que Camille (qui pleurait quand elle n'y arrivait pas) et nous récompensait de manière égale, même si ses résultats étaient beaucoup plus bas que les miens. Je ressentais une profonde injustice (bon, je sais qu'on ne parle pas de la faim dans le monde, mais j'avais neuf ans). Mon père m'avait aussi forcée à demander à mes enseignantes si elles savaient ce qu'était un 《polatouche》, un écureuil volant, pour que j'aie l'air plus intelligente que les autres. Je me sentais juste mal à l'aise de demander ça hors contexte.

En commençant dans un nouvel établissement scolaire, j'ai perdu de vue Aurélie, mon amie d'enfance, et Jenny. C'était avant l'époque où les enfants avaient leur téléphone et des réseaux sociaux. Nous, tout ce qu'on avait, c'était notre téléphone de maison, ce qui signifiait que je devais gérer l'anxiété d'appeler les parents de mes amies. C'était toujours horrible pour moi d'appeler les gens que je voulais inviter pour mon anniversaire.

J'ai donc rencontré de nouvelles personnes. J'ai connu Maéva et Simone. Elles vivaient dans le même quartier que ma mère et étaient amies depuis longtemps. Je n'étais pas douée dans les relations interpersonnelles, donc nous nous chicanions souvent et c'était toujours moi qui finissais seule.

Camille et moi avions aussi rencontré Pénélope qui, elle, vivait dans le même quartier que mon père. Par contre, j'ai vite compris qu'elle tenait plus à Camille qu'à moi et qu'elle devait me voir par obligation. Comme de fait, Camille et Pénélope sont devenues des《 meilleures amies》.

J'étais rejetée par les jeunes de ma classe, et personne ne voulait se mettre en équipe avec moi pour faire les travaux. J'étais pourtant bonne à l'école, mais les gens ne m'aimaient juste pas.

Par contre, quand j'étais avec Camille au service de garde, nous faisions exprès de faire du trouble. Autant nous étions des anges en classe, que lorsque nous arrivions avec notre éducatrice nous devions de véritables petites pestes. Comme elle ne nous connaissait pas beaucoup, nous nous amusions à inverser nos noms pour la mélanger. À cette âge-là, nous nous trouvions très drôles.

Un autre stresseur de ma troisième année a été les cours d'anglais. J'étais déjà timide quand c'était le temps de parler en français, alors imaginez-vous essayer de parler une langue étrangère. J'angoissais chaque fois. J'avais même inventé que ma couleur préférée et《vert》(green) parce que je trouvais ça plus facile à dire que《 rouge》(red).

C'est à cette époque que ma mère a commencé à fréquenter un homme qui s'appelait Paul. C'était une relation stable, contrairement à celle de mon père. Ce dernier était très jaloux de Paul, comme si ma mère n'avait pas le droit de refaire sa vie, et il nous le laissait savoir à Olivier et moi. Mon père nous demandait souvent comment ça se passait chez ma mère avec Paul et il me faisait passer un interrogatoire. Je ne voulais pas trahir ma mère ni décevoir mon père. De plus, comme ma mère est une personne responsable, elle ne s'est pas dépêchée à aller vivre avec Paul. Il venait quelques fois dans la semaine et c'est tout. Elle n'a d'ailleurs jamais vécu avec lui même si leur relation a duré plusieurs années.

Je me souviens que mon frère dormait souvent avec ma mère la nuit lorsque Paul n'était pas là. Ma grand-mère paternelle m'a dit que je lui avais raconté que j'avais demandé à ma mère de dormir avec elle, mais qu'elle m'avait donné 25 cents à la place. Je ne sais pas si c'est vrai, mais j'ai toujours senti que, même si ma mère m'aimait, elle préférait Olivier.

Camille, en venant habiter avec nous, a aussi commencé à suivre des cours de danse avec moi. Le pire dans ces cours c'est que, même si j'avais changé d'école, je devais encore subir le regard d'Audrey, qui participait à la danse. Elle était toujours partout où je passais.

J'avais toujours deux fêtes d'anniversaire (une avec chaque parent). Pour mes neuf ans, j'avais invité deux filles de ma classe, dont Simone, et des filles de mon ancienne école : Aurélie, Carolane, Jenny et Sarah. Comme j'étais partie, Jenny et Sarah étaient devenues plus proches et elles ne s'occupaient pas de moi. C'était, pour moi, la fin du monde et je suis allée me cacher dans la penderie de ma mère. Joëlle était aussi là avec Caleb, même si j'avais dit à ma mère que je ne voulais pas qu'il vienne à ma fête. Je pense que c'est la dernière fois que lui et Joëlle sont venus à mon anniversaire, car nos mères ont arrêté de se parler.

En plein milieu de l'année scolaire, mon père et Josée se sont laissé et elle est repartie dans sa ville avec Camille. Du jour au lendemain, elles n'étaient plus là. Je pense que j'étais contente de m'être enfin débarrassée de Josée, mais que je m'ennuyais quand même un peu de Camille. J'ai donc retrouvé ma chambre et, par la même occasion, mon père. En fait, c'est ce que je pensais...

C'est à ce moment-là, je crois, que mon père a commencé à me dire que c'était ma faute si Josée était partie, parce qu'elle n'arrivait plus à m'endurer. La vérité, c'est qu'il l'avait probablement laissée pour une autre.

En effet, mon père n'a pas tardé à nous présenter à une autre femme, Diane, qui avait deux filles de mon âge. J'ai du donc rapidement m'adapter à une nouvelle personne, qui devenait immédiatement ma belle-mère, et qui avait maintenant autorité sur moi. Je l'aimais bien, même si elle était un peu trop sévère à mon goût. Malheureusement, un jour, mon père est venu nous chercher chez ma mère et nous a annoncé qu'il était revenu en couple avec Josée. J'étais dévastée, car j'aimais bien passer du temps avec les filles de Diane et, surtout, parce que je n'aimais pas Josée.

Josée et Camille ne sont jamais revenues vivre à la maison; elles venaient la fin de semaine, comme au début, avant le déménagement.

Survivre avec un trouble de la personnalité limite Où les histoires vivent. Découvrez maintenant