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Cher journal,

Ce matin des cris nous ont extirpés des bras moelleux de morphée.
Ils venaient de la maison d'en face, là où travaille mon amie Fatou Sène.  Elle, de nature si calme et souriante, aujourd'hui je l'ai vue le visage inondé de larmes, une partie du tissage otée, pieds nus et la morve dégloutinante. Ne cherchant même pas davantage, je courrais la saisir instinctivement pour l'éloigner de la foule. Elle comptait désormais beaucoup à mes yeux et je lui en devais une.
Je nous dirigeais vers la boutique sous les regards que je n'arrivais à déchiffrer de mon mari et de sa première femme. Fatou hoquetait toujours en tirant sur les pans de son pagne délavé.  Je la fis assoir sur un banc, lui servais de l'eau qu'elle ne but presque pas.
Des insultes venant de la rue faisaient échos augmentant les pleurs de mon amie. Je reconnais la voix de sa patronne mère Diakhère. Je me demandais serieusement ce qui a pu se passer mais je patientais le temps qu'elle se calme. Marliyatou entra et faillit marcher dessus Fatou en allant vers la chambre ce qui fit monter en moi une once d'enervement mêlée à la honte face à mon invitée. La cohabitation avec elle, devient de plus en plus invivable. Le masque pour sauver les apparences était tombé depuis longtemps. Elle s'était revêtue de ses cornes diaboliques pour me chercher des poux mais c'était sans compter sur ma determination à ne pas tomber dans son piège.

       Me rendant compte que les hoquets avaient diminué pour faire place à de petits reniflements, je demandais à Fatou l'objet de ses pleurs.

Elle se mit alors à me le narrer en français.

-Mère Diakhère veut marier sa fille à un de ses clients du restaurant. Un ivoirien qui est à vue d'oeil très riche. Elle me demande souvent en lui servant ses plats de mettre dedans des potions ou des poudres  noirâtres aux odeurs nauséabondes.  Au début, je ne comprenais pas trop le pourquoi mais très vite j'ai vu clair dans son jeu. Et quand je lui en ai parlé, elle m'a menacée de me renvoyer. Les menaces ne me faisaient rien, je pouvais bien partir mais tu sais bien que j'ai besoin de cet argent surtout que l'année scolaire arrive et entre temps je ne peux trouver un autre travail.  Alors j'ai abdiqué. Le monsieur est un ivorien fortuné et donc un joyau devant ses yeux. Il commença alors à rester plus que d'habitude, sa fille Maty en profitait pour lui faire des yeux doux et Diakhère du rentre dedans. Je ne m'en souciais plus malgré les remords car dans ma tête, je ne vais plus travailler ici une fois les vaccances venus. Mais hier soir une femme toute chétif avec un nourisson au dos est venu au restaurant. Elle a commandé mais je la trouvais bizarre. Elle n'arrêtait pas de regarder de gauche à droite, le visage émacié comme si elle cherchait quelque chose ou quelqu'un. C'est la femme de l'homme. Figure toi qu'ils ont quatre enfants ensemble.........(Fatou emet une pause et ses larmes recommencèrent à couler). Elle a fait une scène isultant Maty et sa mère quand elle a vu son mari assis entre elles.  D'après elle ce dernier découchait depuis des mois et ne la regardait même plus. C'était affreux comment elle gémissait tout en pleurant. Je ne peux pas t'expliquer ce que j'ai ressenti Ray. Je me sentais en partie coupable et je pris la décision de quitter ce travail maudit. Ma patronne en parfaite aigrie quand je lui ai fait part de ma décision, elle m'a juste souhaitée bonne route alors qu'elle me doit deux mois de paye. Et quand je les lui ai demandés, c'est alors qu'elle et sa fille ont commencé à crier et me crêper le chignon. Termine t-elle en suffoquant.

Je restais un moment bouche bée avant de me reprendre et la prendre dans mes bras pour la réconforter.
En vérité, je ressentais de la peine pour mon amie qui vient d'être humilier.

-Fatou calme toi. Elle a une vieille fille célibataire ce qui la fruste c'est pour cela qu'elle se défoule sur toi.

-J'ai gâché......la vie de...... cette femme ......avec son nouveau né. Culpablise t-elle encore plus.

Les Soubresauts d'une Mémoire...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant