Je suis enfin chez moi. Enfin, nous sommes chez moi. Oui nous, toi, moi et ma solitude.
Depuis le début je parle des autres mais maintenant j'ai envie de parler de moi. Quel narcissisme tu vas dire. Je passe ma vie à observer la vie des autres sans pouvoir vivre la mienne alors là j'ai envie de te la raconter.
Tout d'abord comme tu le sais je m'appelle Jean-Bernard et j'ai 32 ans.
J'aime beaucoup le noir et le heavy-metal, un peu comme un adolescent.
Si tu ne l'avais pas encore remarqué j'adore analyser. Et comme la plupart des gens j'adore les chats. Mais moi je les préfère façon rôti. Non, je rigole. Ou pas...
Alors maintenant que tu connais un peu plus mes goûts je vais enfin pouvoir te parler de mon enfance. Par où commencer? Peut-être par ma naissance. Alors je suis né un 22 janvier, non je ne te dirai pas de quelle annnée mais fais un peu marcher ton cerveau. Indice, c'était il y a 32 ans. Oui je sais, je suis hilarant.
Je suis venu au monde et j'ai vécu, il faut le dire, dans un trou paumé. En vrai c'était un tout petit village de campagne d'environ 200 habitants.
Mon père était boucher et ma mère secrétaire pour une entreprise de pompes funèbres. Autant dire que mon enfance a été très joyeuse.
A l'école je n'ai jamais eu beaucoup d'amis. Pour tout te dire je n'en avais aucun. Mes parents ne m'ont pas fait faire la maternelle donc autant dir que ça n'a pas facilité les choses.
En primaire je ne comprenais rien mais je faisais de effors considérables pour la maîtresse que je trouvais très belle. En secret j'espérais pouvoir me marier avec elle un jour. Mes camarades ( j'aurais bien voulu tous les égorger) m'appelaient le pouilleux à cause des puces que j'avais récupérées de mon chien Filou. Filou était un petit bichon que ma grande tante nous avait légué.
Filou avait été mon seul ami pendant la période la plus formidable de ma vie. J'ai nommé l'adolescence.
Bien sûr, la phrase du dessus c'est de l'ironie ( je tiens à le préciser pour les gens qui n'auraient pas du tout d'humour).
Quand je fus arrivé en sixième je m'attendis à ce que tout change.
Je pensais devenir le beau gosse du collège et que toutes les filles me coureraient après. Non, ce ne fut pas ça.
En sixième, la moitié des élèves de ma classe étaient des primaires que je connaissais. Comme le collège était ( beaucoup) plus grand que la primaire et que par conséquent les profs ne nous voyaient pas en permanence, ils s'amusaient à me bourrer dans les casiers. La seule fois où je voulu me défendre le plus grand de la bande ( qui était aussi délégué de classe et meilleur élève de la classe ) m'assena un coup de poing plus que mémorable au niveau de ma mâchoire. Quand une surveillante ( la plus désagréable qui soit) nous trouva, ils lui expliquèrent avec le plus grand naturel que je m'étais évanoui et que je m'étais pris l'angle des casiers dans la mâchoire; c'est pour ça que j'avais le visage aussi déformé que le Grinch.
En cinquième j'eu la chance de tomber sur le professeur de français le plus extraordinaire qui soit. C'est lui qui m'a donné le goût de la littérature. Je m'éternisais dans sa salle chaque fin de cours en espérant qu'il dirait que je lui faisais penser à Molière et que je deviendrai célèbre plus tard. A mon grand regret ce jour n'arriva jamais. Je savais qu'il n'était ni médium ni dénicheur de talents mais ça m'aurait fait du bien d'entendre quelque chose comme ça.
La quatrième fut la pire année de ma vie. Le jour de la rentrée une nouvelle fit son apparition dans ma vie: l'acné.
Le matin de la journée la plus importante de mon année trois boutons apparurent sur mon front en formant la constellation du scorpion.
Ma nouvelle pote ne me quitta pas jusqu'à la fin de ma troisième. Pendant mon année de quatrième tout le monde changea, même moi. Mes cheveux devinrent gras, mes dents déjà mals arrangées commencèrent à devenir proéminenteset ma voix mua. Comme notre prof de musique était sadique, elle adorait nous faire passer un par un au chant. Ainsi, ma reprise de Summertime se transforma en complainte de chat mourant.
Et puis,les profs commencèrent à nous parler de notre avenir. Après qu'ils nous aient faits maintes et maintes louanges sur le Bac pro, je choisis de faire un Bac L ( oui, j'ai toujours eu l'esprit rebel).
Arrivé en troisième je pensais enfin pouvoir m'épanouir. Même si je faisais plus parti des cancres que des bons élèves, je faisais des efforts. Je commençais en fin à me détacher du regard des autres, à vivre ma vie comme je la voulais et pas comme les autres la voulait. On me faisait des critiques mais ça me passait au dessus de la tête (autant au sens propre que figuré).
Fin troisième comme tous les collégien nous avons eu le brevet.
Par miracle (et je crois aux miracles) je réussi à l'obtenir.
Pendant les vacances d'été j'annonçai enfin à mes parnts que je voulais être juge et non boucher comme ils l'avaient décidé depuis que j'étais tout petit.
Ah! Parce que oui, avant que je naisse ils s'étaient dit que s'ils avaient un garçon, il s'appelerait Jean-Bernard et il serait boucher mais que si par malheur ils avaient une fille elle s'appelerait Manon et elle serait secrétaire comme ma mère (chances de possibilités d'un autre avenir: 0%)
Pendant cet été je me suis pris des coups de ceinture dont je me souviendrai à jamais.
Le 27 août, détruit autant physiquement qu' émotionellement par les coups; je décidai de m'enfuir. Ce fut le plus beau jour de ma vie. Pouvoir respirer l'air frais sans me dire que ce serait peut-être la dernière fois me donna un sentiment indescriptible.Je pensais enfin pouvoir être libre. Pauvre naïf que j'étais...Je me trompais.
Une fois dehors, il m'apparu assez rapidement un problème; où allais-je être logé? Bein oui, c'est bien beau de s''enfuir mais il faut pouvoir tenir.
La solution m'apparut alors que je me promenais dans un parc. Je décidai de demander à ma tante qui, en plus d'habiter à côté du lycée, était une ancienne professeur.
Quand j'arrivai chez elle la queue entre les jambes elle m'accueillit à bras ouverts en me posant néanmoins une condition: si j'avais moins de 14/20 de moyenne généraleje partirai sans négocier.
Je reussi à tenir tant bien que mal.
J'eu mon bac, mention assez bien.
Ensuite, ma tante accepta de m'envoyer dans une bonne école de droit mais on me fit une proposition qui changea mon brouillon de vie à tout jamais.
En fait, pourquoi je te parle de mon enfance? Parce que j'en ai envie. Mais pourquoi j'en ai envie?
Peut-être que mon cerveau se dit qu'il y a une infime petite chance que tu répondes, que tu me parles et que je me sente moins seul. Moins seul dans cette épreuve que je devrai accomplir jusqu'à la fin.
En gros pour te situer mon sentiment, ce que je fais chaque instant, chaque minute chaque seconde ça m'est aussi pénible que toi de te lever à 6h30 un dimanche matin. En revanche, pour toi te lever un dimanche matin c'est rarissime. Pour moi c'est aussi naturel que de respirer, aussi normal que de marcher, aussi anodin que de parler.