Une décision importante

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   La duchesse ne pouvait plus supporter de vivre rejetée par la société. Elle avait vécu dans l'ombre des rumeurs pendant trop longtemps, noyée dans son chagrin. Il était temps qu'elle sorte enfin la tête de l'eau.

   Une nuit, elle décida de prendre un grand sac, dans lequel elle fourra des tenues, ses grandes économies, et ce dont elle avait besoin d'autres. Elle emporta des vivres et de l'eau.

   Elle se revêtit d'une guenille de souillon, se barbouilla le visage de cendres, prit une cape noire, et elle alla seller Phoenix. Il fallait qu'elle passe inaperçue.

   Elle plaça son baluchon dans son dos, ferma sa demeure à triple tour, et elle fourra sa clef dans son sac. Après avoir vérifié que personne ne la suivait, la jeune femme monta en selle, et ordonna à Phoenix de quitter les lieux.

   C'est alors qu'elle s'enfuit dans la nuit, sur son fidèle Phoenix qui galopait sans souci, satisfait de voir sa maîtresse enfin heureuse.

   Maud semblait enfin soulagée. Les rumeurs étaient restées loin d'elle. Elle allait enfin pouvoir tout recommencer.

   L'aube rougeoyante pointa bientôt son nez. La duchesse croisa quelques marchands ambulants à cheval.

   Elle s'arrêta pour leur demander son chemin.

–   Bonjour messieurs. Pourriez-vous m'indiquer où se trouve le village le plus proche ?

–   Bonjour petite dame ! Nous allons justement à la prochaine ville. C'est Versailles !

–   J'ai fait un long voyage cette nuit alors ! J'ai quitté ma maison cette nuit car l'on me rejetait.

–  Qui êtes-vous ? demandèrent les marchands.

   Maud ne sut que faire. Devait-elle se dévoiler ? Mais peut-être qu'après tout, ces gens la connaissaient de nom et partiraient en courant en apprenant la vérité ?

–  Je suis une souillon. mentit la duchesse. Mes maîtres ne voulaient plus de moi, alors ils m'ont jetée dehors !

–  C'est cruel. Voulez-vous vous joindre à notre troupe pour aller à Versailles ? proposa un des marchands.

–  Je ne dis pas non ! Que vendez-vous ?

–  Nous vendons des tissus, des ustensiles de cuisine, tout plein de vaisselles, des graines... Beaucoup de choses !

–  Pour quelle heure devez-vous être à Versailles ? s'enquit la duchesse.

–  Pour environ dix heures du matin à la place du marché. Nous devons nous dépêcher car nous sommes en retard ! Au galop !

   La troupe s'élança joyeusement. La vie sociale de la duchesse semblait enfin se développer un peu.

   En chemin, la duchesse demanda en baissant le regard :

–  Connaissez-vous la duchesse de Rosembell ?

–  Oui. On dit qu'elle est très belle, et qu'elle réside dans une demeure splendide. Mais son sort m'attriste beaucoup.

–  Et, savez-vous pourquoi est-elle rejetée ?

–  Hum, il faudrait demander à ma femme, elle aime bien les potins. Elle saura certainement vous répondre. Elle réside à Versailles. Vous aurez l'occasion de lui demander.

–  Je l'ai aperçue une fois, de la fenêtre de mes maîtres. Elle jouait de la harpe. Elle semblait triste. La duchesse de Rosembell m'attriste. J'espère qu'elle pourra être heureuse après.

–  Cette duchesse était rejetée des nobles.

– Cela doit être horrible. souligna un autre marchand. Être rejeté par tout le monde, vivre seul au quotidien... Il y a de quoi souffrir !

–  Oui. murmura la duchesse, en essayant de masquer son visage.

   Elle était heureuse de savoir que d'autres personnes la défendaient et ne la critiquaient pas pour la plonger au fond du gouffre, comme le faisait les habitants de son ancienne ville...

La duchesse de RosembellOù les histoires vivent. Découvrez maintenant