Réinventer nos vies

Cadeaux

- Vous êtes sûre que vous allez bien, mademoiselle ?

Lysa lança un sale regard à l'employée qui s'occupait actuellement de préparer des cafés. Elle se trouvait dans la cuisine, et avait ouvert la fenêtre afin de respirer un peu d'air frais, espérant que ça ferait passer sa nausée.

- Aurais-tu trop bu, jeune fille ?
- Je n'ai bu qu'une seule coupe de champagne papa, rien à voir.. C'est quand j'ai senti l'odeur du café que j'ai eu envie de vomir.

De base, elle était venue ici pour réclamer un thé, et son père l'avait suivie, avec la même excuse qu'elle. Il était donc en train de préparer leurs boissons. Une fois la domestique partie, ils se tournèrent d'un seul mouvement vers l'autre et se mirent à chuchoter.

- C'était quoi ce message que tu m'as envoyé pendant le repas, Lizzy ?
- Je vais être brève, Nathaniel a de gros soucis.
- Mais encore ?
- Ne le juge pas, mais.. Il bosse pour un cartel de drogue, contre sa volonté. Plus jeune, il a surpris une.. Transaction, on va dire. Il a fait semblant d'avoir quelques astuces pour eux, histoire de sauver sa peau. Au début, il surveillait les territoires des autres, histoire de ne pas empiéter dessus. Mais peu à peu, il est devenu revendeur. Il change le contenu des sachets avec un mélange inoffensif de médocs qui rend juste un peu stone, et il jette la vraie drogue. Mais un de ses collègues l'a cramé, et maintenant, il lui fait du chantage. Papa, je me fous complètement des personnes à qui tu fais appel, je me fiche complètement que tes méthodes soient légales ou pas.. C'est la vie du mec que j'aime qui est en jeu. J'ai bien pensé à aller m'occuper de ces mecs seule, mais..
- Autrement dit, à te suicider. Je sais comment tu es quand on s'en prend aux personnes que tu aimes, mais tes poings seraient inutiles contre eux.

Le visage ensanglanté de James Bidule lui revint en tête, un pauvre élève dans son lycée qui avait insinué que son père s'était barré parce qu'une femme chauve et malade c'était trop laid. Elle avait été exclu un mois après l'avoir roué de coups. Ce souvenir la fit ricaner.

- Combien a-t-il jeté de pochettes ?
- Une cinquantaine, pourquoi ?
- Parce que j'ai un plan. Et je ne te dirai pas à quoi il consiste pour la bonne raison que si je me fais chopper, tu seras accusée de complicité. Déjà que tu penses que je suis un mauvais père, je vais éviter de te faire plonger avec moi.
- J'ai rien à dire sur ton rôle de père, c'est sur celui de mari qu'il y a une couille.

Il voulu répondre, mais elle referma la fenêtre avant de prendre sa tasse de thé et de rejoindre le salon. En arrivant, Elle remarqua que les cadeaux avaient été posés sur la table. Elle s'approcha de Nathaniel, afin de s'asseoir à côté de lui.

- J'ai laissé le cadeau de Yeleen dans ma chambre, j'ai bien fait ?
- La meilleure idée que tu aies eu, mon amour.

Elle prit une gorgée de thé, sous le regard surpris du blond. Ils devaient vraiment s'habituer aux petits surnoms.. Son père revint peu après, et se réinstalla à sa place, tandis qu'Adelaïde prenait la parole.

- Dites moi Elizabeth, sur quel sujet de mémoire travaillez-vous ?
- Regard sur la Femme à travers la Littérature. En bref, j'explique comment on voyait la femme il y a plusieurs siècles de cela, et comment elle a fini par devenir aujourd'hui.
- C'est un beau sujet. Que pensez-vous faire après vos études ?
- Bosser dans une maison d'édition, et plus tard créer la mienne.

Pour la première fois depuis le début de la soirée, le regard glacé de la blonde changea. Elle était impressionnée par l'ambition de cette demoiselle. Aaron se tourna vers Nathaniel.

- Et toi mon grand, des projets ? Je veux dire, autre que celui de changer le nom de ma fille ?

En entendant la question de son père, la brune s'étouffa avec son thé, et le blond se massa la nuque, un peu gêné.