Le premier souffle du reste de ma vie

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Le bruit des talons claquant sur le carrelage gris résonna dans le long couloir froid

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Le bruit des talons claquant sur le carrelage gris résonna dans le long couloir froid. La jeune femme avançait d'un pas assuré, sure d'elle. Le visage impassible, elle avait finalement pu dissimuler son immense tristesse sous un masque sans émotions, imperturbable. Aucun sourire, aucune larme, elle avait petit à petit appris à se fabriquer cette apparence qui ne laissait rien transparaitre.
Les poings fermés, le regard dur et les lèvres serrées, elle suivit un homme en uniforme bleu. Un autre, vêtu de la même façon, la stoppa et passa un scanner devant elle. Il lui laissa le passage après quelques secondes et, sans qu'un seul mot ne soit prononcé, elle suivit de nouveau l'homme qui l'amena dans une grande pièce grise et délabrée, qui sentait un mélange d'urine, de transpiration et de produit nettoyant.
L'homme tourna les talons, la laissant là. Mal à l'aise, Mia observa le lieu où elle se trouvait. Tellement d'hommes. Ils portaient tous une combinaison orange. En face d'eux, des gens de tout type étaient venus leur rendre visite. Des parents, des enfants, des amis, des gens sans doute heureux de parler à leurs proches. La rouquine se demanda ce qu'elle faisait là. Elle reprit une longue respiration, pour se préparer à l'entretien qui allait suivre.
« Ne pas flancher, ne pas pleurer, ne pas lui montrer que tu vas mal. Sois forte, sois forte Mia. »
Le masque que portait Mia depuis des mois ne l'empêchait pas d'avoir toujours aussi mal, de sentir cette souffrance lui broyer le cœur encore et encore. Le pire, c'était la peur.
Lorsque Mia croisa son regard, dans cette prison de Floride, elle réalisa que cette peur n'avait jamais disparue. Elle était toujours là, au fond de son ventre et elle comprit que peu importe les efforts qu'elle faisait, la terreur se lirait toujours sur son visage.


Ses yeux étaient posés sur elle. Il était là, à quelques mètres, sur une chaise, la main droite encerclée par une menotte accrochée à la table, et la gauche pendant dans le vide. Et il fallait qu'elle s'asseye en face de lui ? Elle ne l'avait pas revu depuis ce jour-là. Elle n'arrivait pas encore à oublier, tout était bien trop récent. Elle y repensait tous les jours. Elle se demandait souvent ce qu'elle pouvait lui dire, et elle avait eu tout le temps de s'imaginer tous les scénarios possibles et imaginables. Mais au moment où elle se trouva devant lui, plus rien ne lui vint en tête. Tout arrivait bien trop tard.
Le regard de l'homme n'avait plus rien d'effrayant. Son crane avait été rasé, mais sa barbe avait déjà bien poussé. Il avait de grosses poches sous les yeux, et des balafres sur tout le visage. Ses joues étaient creuses, il avait perdu du poids. Ses muscles avaient sans doute fondu, car il semblait nager dans sa combinaison orange. Son visage trahissait sa fatigue, il paraissait éreinté par ce qu'il vivait. Il n'avait plus rien de l'homme qu'elle avait connu il y a quelques mois. Plus de sourire en coin, plus aucune cruauté dans ses yeux, plus de provocation ni de fierté. Plus de cris. Plus de coups. Mia ne voyait plus qu'un homme affaibli, qui avait abandonné sa brutalité derrière lui. Elle se retint de sourire, mais elle eut une once de satisfaction pendant quelques secondes, voyant ce qu'était devenu l'homme qui l'avait privé de bonheur.
« Ne pas flancher, ne pas pleurer, ne pas lui montrer que tu vas mal. Sois forte, sois forte Mia. »
La jeune fille s'avança lentement et s'assis en face de lui. Que faire maintenant ? Fallait-il qu'elle le regarde dans les yeux ? Pouvait-elle même le regarder ? Il était juste là, à quelques centimètres d'elle. Trop proche. Cela faisait longtemps qu'il n'avait pas été aussi proche.
Mia se détendit les épaules et tenta de faire semblant de ne pas être terrifiée.
« Tu n'as pas peur, Mia. »

Pivoines et pains au chocolat - Recueil de textesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant