La Loi de Talis

T

La notion même de mon existence était devenue paradoxale.

Comme un corps vivant doté d'une âme en décomposition. Mes organes moisissaient tandis que ma peau resplendissait. J'avais l'insupportable sensation qu'on s'était amusé à triturer mes entrailles, à jouer à cache-cache dans mes boyaux et à la corde-à-sauter avec mes intestins.

Tout mon corps était en dysfonctionnement. En réalité, rien n'avait jamais correctement marché. J'ai toujours été un automate rouillé, suppliant qu'on graisse ses rouages. Mais à force de supplications sans réponse, l'automate finit par se faire une raison et ce n'est plus d'espoir que ses demandes sont teintées, mais de pitié. Être mis à la casse, démembré et achevé.

A ma naissance j'ai été disséquée une première fois. Un scalpel a été posé sur mon corps et on m'a ouverte de haut en bas. On y a fait ce qu'on souhaitait puis on m'a recousue. Et l'opération fut réitérée plusieurs fois.

Je ne me suis pas aperçue des conséquences, pas immédiatement du moins. Il m'a fallut du temps pour comprendre que ces dissections avaient causé ma mort.

Je suis un cadavre.

Un cadavre qui a simplement longtemps cru être vivant.

Amol iz geven a mayse,
Di mayse iz gornit freylekh,
Di mayse heybt zikh onet
Mit a yidishn meylekh.