L'œil du Puma

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Dean, bière tiède à la main, observait distraitement son frère penché sur son ordinateur depuis plusieurs minutes. Il avait cet air concentré des mauvais jours qui lui faisait dire qu'il ne valait mieux pas le déranger.Sam essuya rageur la sueur qui perlait sur son front de la paume de la main tout en marmonnant entre ses dents, semblant s'adresser à son ordinateur comme à un vis-à-vis. Il savait son aîné là mais il devait absolument répondre à ce mail avant toute chose.

Dean voyait ses traits se creuser au fur et à mesure qu'il tapait sur son clavier, contrarié, furieux mais tachant de garder le contrôle de ses émotions.

Son bureau était petit et mal agencé, il y faisait chaud et moite et le ventilateur n'y changeait rien. Sam y passait le moins de temps possible mais il s'en était jamais plaint, il s'estimait déjà bien heureux, lui, le yanquis comme aimait à le surnommer Domingos, d'avoir pu intégrer le FUNAI.

Il avait mis 10 ans à y parvenir et avait réussi à force de ténacité à prouver sa valeur et son sérieux.

Protéger les peuples indigènes amérindiens surtout ceux encore isolés et non-assimilés étaient devenu son obsession, il refusait de voir ces peuples assujettis à la dite civilisation.

Il avait souvent été d'ailleurs l'objet des railleries de ses collègues, un américain qui osait juger leur politique « indienne » alors que son pays d'origine avait massacré ses propres autochtones, c'était l'hôpital qui se foutait de la charité.

Mais Sam n'en avait eu cure, et s'était finalement intégré, forçant le respect et l'admiration de ses confrères ethnologues.

Dean regardait son cadet avec fierté, ce petit frère intelligent et cultivé mais surtout profondément humain et empathique. Ce frère qui avait pris fait et cause pour ces indiens et avait fini par gagner leur confiance mais surtout leur amitié à force de patience et d'obstination. Irmã obranco avait risqué souvent sa tête et sa place pour eux, ils en avaient tous consciences et lui en étaient reconnaissants malgré le fait qu'ils sachent bien qu'un seul homme ne pouvait pas changer grand- chose à leur situation déjà si précaire. Ils étaient voués à mourir, physiquement ou spirituellement, ils le savaient mais Sam se refusait à les voir disparaître.

Dean termina sa bouteille en grimaçant, cette bière locale était infecte mais Sam n'avait rien su lui proposer d'autre. Il devait donc se contenter de celle-ci en attendant de pouvoir retourner au bar de son hôtel pour pouvoir enfin profiter d'une boisson fraîche et de l'air conditionné.

Dean et Sam s'adoraient mais leur jeunesse chaotique les avait souvent vus s'affronter et ce, souvent sur le même sujet, leur père et son emprise sur son aîné.

John Winchester avait toujours exigé de ses fils qu'ils reprennent la direction du ranch familial à sa disparition. Mais si Dean avait toujours cédé aux desideratas de son père, il n'en avait jamais été de même pour Sam qui, lui, voulait poursuivre ses études et faire autre chose de sa vie que de dresser des chevaux et marquer des vaches.

Il finit un jour, suite à une dispute plus violente que de coutume avec son père, par claquer la porte, laissant son frère aîné au côté d'un John taciturne et autoritaire, rongé par la mort de sa femme et l'alcool.

Dean avait souvent envié le courage de son cadet, lui qui rêvait d'aventure et de découverte, se retrouvait coincé au beau milieu du Kansas, cerné de montagnes et de barbelés alors qu'il ne rêvait que de voitures et d'espace nouveau.

Jamais cependant il n'abandonna son cadet, il gagnait un salaire comme tout employé au Ranch et versa tous les mois, une partie de celui-ci à son frère pour qu'il puisse poursuivre ses études. Sam avait juré de réussir pour lui, pour eux.

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