Les Quinze Médaillons

Chapitre 5 : Lorens l'écarlate

Lorens, le Zodiaque, était monté en haut de l'auberge, dans les salons au-dessus de leur tête. On entendait bien les rires et les murmures parcourir comme le vent tout le bâtiment. C'était une grande auberge, remplie de gens et de leurs odeurs si particulières. Je n'avais jamais vu de si grandes tavernes, avec de si grandes tablées et un si grand nombre de gens autour avant d'arriver à la Capitale Impériale. 

-Port-Coralin est remplie de lieux comme celui-ci. Avait affirmé plusieurs fois Nora, de la mousse sous le nez et le regard trouble. 

Je n'arrivais toujours pas à la croire! Comment était-il possible qu'il y ait tant de tavernes aussi grandes que celles-ci dans une seule ville?! Et leur bière! Impressionnante. 

-Là d'où je viens, confiai-je à ma compagne en me penchant sur la table comme pour dire un secret, jamais....

-Tu viens d'où de nouveau toi? Coupa Nora en se penchant elle aussi, presque prête à écouter ma confidence. 

Son regard aurait fait fuir plus d'une bonne femme de mon village. Je connaissais pas les tavernes Impériales, mais les gens ivres, j'en croisais pas mal, même par chez moi. Partout pareil sûrement. Je ressaisi ma chope et avant de parler, la vida d'un trait. Ma gorge et ma langues me piquèrent mille fois, puis mon estomac pétilla avant de laisser s'échapper un rot digne d'un Troll de Crèvesouche. Malheureusement, Nora et moi fûmes les seuls à l'entendre, tant le brouhaha ambiant était fort.

-Impressionnant, petit! Attend voir...

La jeune femme en armure, qui avait demandé deux chopes pour ne pas avoir à commander deux fois, lorgna en souriant avidement sur la mousse blanche et épaisse de sa deuxième bière. Aussitôt,  Nora la porta à ses lèvres et se tapa le demi en entier! Mon cœur avait battu dix fois, jusqu'à ce qu'elle ne repose avec fierté sa chope sur la table en bois et laisse crier tout son corps dans un rot absolument monstrueux . Et pendant ses dix battements elle elle n'avait pas respiré une seule fois. J'en suis resté bouche bée. Totalement. Un tel comportement n'était pas digne d'une dame de la Cour. Sauf que Nora n'était pas une pauvre dame de la Cour. C'était un vrai chevalier, fier et impressionnant, du genre à ne jamais avoir honte de s'amuser ! Le souffle coupé, je ne pu que m'avouer vaincu devant de si grandes qualités. D'abord souriant nerveusement, je baissai humblement la tête en signe de respect total. Geste auquel ma compagne de boisson pouffa de rire, bien évidemment. On se demandais qui était le plus vieux ici...

-Bon...on en était où? S'exclama Nora après s'être essuyé la bouche. C'est pas que j'en reprendrais pas une troisième, mais...on a une journée chargée demain et...Attends moi, là, je vais nous en ramener deux autres.

Je ne savais pas bien pourquoi elle ne préférais pas plutôt demander à une serveuse d'emmener la nourriture et la boisson à notre table. Ça serait bien plus simple et rapide vu le poids de son armure, mais je ne me posai pas trop de questions, j'avais encore soif et elle avait sûrement des raisons qu'un ancien garçon d'écurie comme moi ne comprendrait pas. Nora revînt chargée de deux nouvelles bières généreusement remplies, toujours dans le lourd cliquetis de son armure en acier. 

-Merci! m'exclamai-je quand ma compagne distribua les deux blondes d'Ufren. 

-Alors, on va finir par savoir d'où tu viens Sire Sebastien?

-C'est pas très grandiose, hein. Bredouillai-je un peu gêné car pris de court. Trois fois rien.

-Te fais pas de souci pour ça. Je viens d'un petit hameau dans les confins de l'empire. Niché dans une étroite vallée des Contreforts, imagine toi un peu.

-J'ai grandi à Cheynin, une bourgade surtout connue pour ses courses de chevaux et ses marrons.

-Cheynin...répéta Nora avec un air amusé. Ça veut dire Chênaie dans votre dialecte, je me trompe? Drôle de nom pour un village qui vit du marron. Y'a une forêt de chênes dans votre bourg?