Partie 1 [1]-JUSTINE-

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C'était un jour pluvieux. Aucun rayons de soleil ne parvenait à percer l'épaisse couverture de nuage, comme si le soleil avait refusé de se lever.

Plutôt la bienvenue en cette fin de mois de juillet. Il aurait été bien agréable d'écouter le battement des gouttes sur la fenêtre à l'abri sur mon sofa, avec un chocolat chaud brulant entre les mains.

Malheureusement, Justine était dehors, et c'est sur son visage que la pluie battait sauvagement, l'aveuglant d'un rideau d'eau tenace.

Lorsqu'elle était allée s'inscrire au Grand Jeu vers 10h50 à la préfecture, elle avait été étonnée par la file d'attente qui serpentait à l'infini devant l'imposant bâtiment.

"Tous ces gens sont des  candidats? Génial! J'espère qu'on va s'entraider et s'amuser ensemble! Je vais donc bien gentiment attendre derrière eux dans la joie et la bonne humeur! Les inscriptions vont bientôt se terminer, mais ce n'est pas grave, si je n'arrive pas a participer au Grand JEU, je réessaierai l'année prochaine !"

En même temps, ce serai dommage de rater l'occasion de se faire détester en les doublant tous, non?

En file indienne, emmitouflés dans leur long manteau noir qu'ils n'avaient pas sorti depuis trois -quatre mois, ils attendaient qu'une guichetière hautaine leur donne un billet d'inscription au Grand Jeu en échange d'une modique somme d'argent. Tous avaient le visage recouvert par une capuche, mais à leur carrure, Justine devinait aisément que c'étaient des hommes. Sauf un, en tête de file, qui avait la taille d'un garçon de treize ans. Personne n'avait jamais pris la peine d'instaurer une limite d'âge pour participer au Grand Jeu, donc même un enfant pouvait s'inscrire. Mais ce n'était jamais arrivé. J'espère que je me trompe et qu'il n'est pas déjà livré à lui-même. Argh, ça me rappelle des mauvais souvenirs.

En le regardant de plus près, son manteau était en velours noir de très bonne qualité, comme s'il voulait être riche, mais discret. Ou riche et sombre. Ou riche et secret. Bon après tout, qu'il fasse ce qu'il veut, c'est pas mes oignons.

Comment s'inscrire le plus rapidement possible? Il n'était pas question d'attendre sous la pluie pendant des heures, pour qu'on lui annonce enfin que le nombre maximal d'inscription était atteint, et qu'en prime qu'elle avait un gros rhume. Tant pis pour politesse et le savoir-vivre, Justine n'avait pas le temps à perdre. Comment faisait-elle pour éviter les problèmes lorsqu'elle était petite ?

Ah oui, elle faisait diversion.

L'idée lui était venue très tôt, lorsqu'elle voulait fuir la directrice de l'orphelinat et ses reproches incessants. Blablabla... Pourquoi tu n'es pas sage, blablabla, se rouler dans la boue ce n'est pas digne d'une petite fille, blablabla, ne met pas de cafard dans les vêtements des autres pensionnaires, blablabla... Tous ça pour ne pas assumer que tout était sale, là-bas.

Pourquoi demande-t'ont aux enfants d'être sage ? La sagesse, C'est une qualité de quelqu'un qui fait preuve d'un jugement droit, sûr, averti dans ses décisions et ses actions. Or, est ce que les adultes écoutent l'avis des enfants ? Bien sûr que non ; c'est bien connu, les enfants n'ont aucune expérience de la vie, ils ne sont bon qu'à obéir, et encore, souvent ils font des bêtises... On ne leur demande pas d'être sage, juste calme et obéissant. Voilà pourquoi Justine n'avait été pas " sage comme une image".

Mais les responsables des orphelinats ne s'arrêtaient pas là, bien au contraire. Ils continuaient de déblatérer des propos insensés : Blablabla, il faut être gracieuse, pas graisseuse, blablabla, comment on va te caser plus tard, blablabla, tu ne trouveras jamais de maris, blablabla...

"Déjà, ce n'est pas moi qui vais me caser, c'est moi qui vais caser mon mari."

Pour échapper à ces reproches perpétuels, la diversion était la meilleure des armes :

"-Oh regardez par la fenêtre, Julien s'est fait la belle ! Peut-être qu'il va s'enfuir définitivement de ce trou à rat ? criait la petite Justine de 10 ans en plein milieu d'un sermon.

- Ah le petit crétin ! Dire qu'il est nourri, blanchi et logé gratis ! S'indignait la directrice. Il sera de corvée d'épluchage de patate pendant un mois !"

En réalité, Julien se promenait juste dans les petits jardins minables autours de l'orphelinat, pareil qu'à son habitude. Mais l'espèce humaine aime dénigrer les autres sans raison valable. A l'époque, Justine avait déjà compris cela, et depuis, elle n'avait jamais réellement tenté de se faire des amis.

A présent, il fallait trouver une idée suffisamment énorme pour distraire et doubler discrètement tous les gens de la file.

Hum.

Quels sont les besoins primaires de l'être humain ?

Manger, boire, respirer, dormir et se protéger des aléas climatiques.

Une idée machiavélique germa dans son esprit. Avec ce plan, c'était tout ou rien : soit les concurrents sautaient tous les pieds joins dans son piège et elle pourrait s'inscrire rapidement en douce, soit le subterfuge ne marchait pas et ils s'alliaient tous ensemble pour la faire payer.

Elle entra dans l'auberge situé juste en face de la préfecture , et, échappant à l'œil ensommeillé de l'aubergiste, roula une des listes de menus dans sa main pour former un cône.

Cachant son visage, Justine abattit sa capuche sur sa tête, prit un stylo de sa poche et commença à gribouiller sur le chevalet qui indiquait les menus à l'extérieur du restaurant.

Puis, prenant une grande inspiration, Justine souffla dans le mégaphone improvisé qu'elle avait fabriqué avec la liste des menus :

« -VENEZ GOUTEZ LE MENU SPECIAAAAL GRAND JEU, DISPONIBLE A L'AUBERGE DULAC ! POUR VOUS RÉCHAUFFER AVANT L'INSCRIPTION, NOUS FAISONS UNE FOR-MI-DABLE RÉDUCTION SUR LES BOISSONS CHAUDES DE -50%, PLUS UNE RISTOURNE DE 20% SUR LES RACLETTES ET LES FONDUES TRADITIONNELLES FAITES MAISON ! DÉPÊCHEZ VOUS, AVANT QUE TOUTES LES PLACES PRES DU FEU DE CHEMINÉE NE SOIENT PRISES !  C'EST L'EVENEMENT DE L'ANNÉE ! ET IL N'Y A QUE 15 MENUS RACLETTES DISPONIBLE ! »

Et la jeune fille attendit la réaction de la cinquantaine de personnes en file indienne, gelées depuis des heures par la pluie torrentielle. Elle ne fut pas déçue. Une ruée, un tsunami s'abattit sur la porte de l'auberge. Aucun mot ne pouvait décrire avec exactitude la violence de l'impact des hommes sur le bois.

Elle se dépêcha de prendre un ticket pour rentrer dans la préfecture, sous l'œil éberlué de la guichetière qui venait de voir la foule agglutinée disparaitre devant elle en un claquement de doigt.

Arnaquer les gens, c'est mal. Oh, comme je me sens coupable ! La vieille bique de l'orphelinat ne serait pas contente du tout...

Un sourire grand comme une banane scotché au visage, Justine entra dans le hall d'entrée, et repris son air maussade. Un grand nombre de participants était là à attendre.

Elle bouscula sans le vouloir la seule autre fille concurrente qui marchait d'un pas déterminé,  sentant l'importante musculature de celle-ci à travers son pull.

« -Déso, j't'avais pas vu. Faut dire que t'es toute mini aussi. »

La fille s'avança d'un pas, puis s'arrêta et se retourna vers Justine, avant de continuer sa tirade :

"-Bonne chance pour le Grand JEU, vu que ta l'air d'être une participante toi aussi ! Au fait, j'm'appelle Soledad !"


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Narrateur : Hum hum ! L'histoire commence enfin, avec des personnages principaux plus têtes à claques que jamais !

Séraphin : J'espère que ça ne va pas continuer comme ça longtemps, j'en ai déjà marre.

Narrateur : ...

Séraphin : ...

Narrateur : si les personnages vous saoulent, votez pour me le faire savoir ! Je tiendrais peut être compte de vos avis!

Séraphin : Je démissionne.

Le Grand JEUOù les histoires vivent. Découvrez maintenant