Partie 1 [3]-SOLEDAD-

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Minuit, l'heure du crime.

Non, je rigole. Minuit, c'est surtout le début des inscriptions au Grand Jeu. Et comme je suis quelqu'un qui aime être en avance, je me suis couchée tôt pour pouvoir aller à la préfecture avant tout le monde à cette heure, et éviter ainsi de faire la queue toute la matinée.

Oulà, mais j'ai de l'humour aujourd'hui!

C'est surtout que j'ai tellement l'habitude de me coucher à 2h du mat' que je n'ai pas fermé l'œil de la nuit. Alors, quitte à faire une nuit blanche, autant bouger et s'inscrire tout de suite.

Une goutte s'écrasa sur la main de la jeune fille.

Tiens, v'la qu'il pleuviote. Tant mieux, j'ai pas pensé à me doucher en partant.

Ses pas claquaient sur le goudron encore globalement sec.

La guichetière, la tête reposant entre ses bras, ouvrit un de ses yeux engourdis par la fatigue. Dans son regard de borgne, on lisait sa haine envers l'insomnie de Soledad.

« -Bonjour madame ! Je voudrai m'inscrire au Grand Jeu ! Annonça Soledad en se plaçant devant elle.

-Hum, grogna la guichetière brune, en ouvrant piteusement le deuxième œil.

Soledad attendit que cette dernière se réveille tout à fait.

-Bonsoir, grogna-t-elle finalement. Quescequejepeuxfairepourvous ?

Tiens, sa bouche est pâteuse, ça va pas faciliter la conversation. Déjà que je la réveille en pleine rêve... La pauvre, elle a encore un filet de salive sur le coin de la joue. Pas très glamour...

-Bah, je voulais m'inscrire pour le Grand Jeu, hein, vous devez vous en douter, mais bon ça peut attendre...

La guichetière fit une moue surprise. Tiens, ça y'est, j'ai capté son attention. Je vais lui servir ma botte secrète en cas de coup dur.

-Un p'tit café ?

-Comment ? demanda la guichetière brune, abasourdie.

-J'garde toujours un thermos sur moi. Et comme on est toutes les deux crevées, autant en profiter, non ?

Soledad sortit de son vieux sac en bandoulière en cuir un thermos à café cabossé aux couleurs pâlichonnes, accompagné de deux verres en plastique.

-T'inquiètes pas, mon matos est un peu amoché mais le café est chaud. En plus, j'veux pas me vanter mais je suis une vraie chef quand il s'agit d'en préparer. Y'en a pas de meilleur que le mien dans tout l'quartier ! Au fait, j'm'appelle Soledad.

La guichetière renifla le liquide noir que lui présentait Soledad, et y trempa les lèvres prudemment. Soudain, le rose lui monta aux joues :

-Mais, c'est délicieux ! Pardonnez ma méfiance, je ne suis pas habitué à ce qu'on me serve du café, d'habitude c'est le contraire. Appelez-moi Iris !

-Ah bas ça fait plais' de voir que t'aime ça, Iris ! Mais t'avais le droit d'avoir des soupçons t'sais, ya des gens louches qui veulent s'introduire dans les préfectures.

La langue complétement déliée de toutes suspicions, Iris continua :

-C'est vrai, mais parfois on a aussi de la chance ! D'ailleurs il y a deux ans, j'ai...

Iris regarda à droite à gauche, comme si elle s'assurait que personne n'était dans les parages. Mais qui pourrait bien espionner à cette heure ? Enfin, fière de son petit effet de suspense, elle continua, toute excitée :

-... Rencontré une personne en costume, qui voulait entrer. Sa tête me disait quelque chose, mais je n'arrivais pas à mettre le doigt dessus... Et là, il me serre la main et me fait même la bise... Tu ne devineras jamais qui c'était !

Sans attendre ma réponse, elle continua sa tirade. Et, oh, fallait le dire si c'était une question rhétorique, hein !

-Le président !

Comme pour illustrer ses dires, elle mima un arc de cercle avec ses mains. Puis, elle sourit en attendant ma réaction.

La pauvre. Ce doit être la seule source de joie de sa vie, pour qu'elle la déballe si rapidement à une inconnue. Mensonge ou pas, le président était un véritable bouffon qui supprimait les droits du peuple par paquets de dix. A sa place, je ne lui aurais pas tapé la bise mais plutôt foutue une belle torgnole au nom de tous.

-Ouaouh... Pardon, tu pourrais me montrer ou sont les toilettes ?

Déçue par mon manque d'enthousiasme, elle me montra la porte des WC lorsqu'elle me fit rentrer dans le hall vide. Chui déso, Iris, mais j'aime pas trop discuter avec les mythos ou les crâneuses, ou même pire, ceux qui aime le président. Mentir, c'est pas trop mon délire. La fuite m'a semblé être l'option la plus gentille pour toi, qui fait un métier difficile. Elle répondit quand même :

-Tiens, pour te remercier pour ton café, je t'inscris gratuitement. En revanche...

Elle regarda encore une fois aux alentours, mais cette fois elle semblait réellement inquiète.

-Soledad, méfies-toi, les épreuves ne sont pas ce qu'elles sembleront être...

Iris se retourna, et retourna d'un pas rapide à son poste, comme si elle avait peur d'en avoir trop dit.

Elle est bizarre, elle. Enfin bon, pour les épreuves on verra bien...

Et Soledad s'en retourna elle aussi, bien loin de comprendre le mystérieux avertissement que lui avait lancé la guichetière...

Maintenant, il faut attendre tout les autres inscrits. Et si je faisais une petite sieste en attendant, moi?

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Narrateur: Un chapitre assez court, et je m'en excuse. Mais dans le prochain, promit, sang drames et larmes garantis!

Séraphin: Pour la peine, le prochain chapitre sera encore centré sur Soledad!

Narrateur: Oui, je vais vous faire découvrir la partie sombre de notre excentrique et sociable Soledad... Attendez vous à un taux de badassitude très élevé!

Séraphin: Oh fait, les lecteurs, qu'avez vous pensé de mon idée de mettre les dialogues en gras?



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