Il est dit que seulement la brise que navigue entre les arbres épais du tropique et que connait les murmures qui caressent la flore de la cordillère, connait l’histoire de la belle Judy radiante des yeux bleus, ainsi que ses belles sœurs mystiques. Il est même dit que connaitre l’histoire des captivantes et belles sœurs Morel, signifie peu à peu dénouer l’oubli et le péché. Certes, chacune d’elles, les éblouissantes et belles sœurs Morel, a été marquée par un péché différent.
Le péché assigné par les astres à la belle Judy, par exemple, est celui que, dans l’ombre légère du matin, cherche l’ombre ardente et luxurieuse de l’après-midi, ou au moins, c’est cela qu’on murmure aux coins plus vertes et vierges de la cordillère tropicale. Mais non, ce n’est pas un péché qui a quelque chose à voir avec son sourire cristallin ni son corps de sensualité révolutionnaire, ni sa présence incandescente et hautaine que pourrait bien arriver à être la source nourrissante des plus beaux poèmes. Non, c’est purement et simplement le péché intempérant et vorace de la luxure que s’empara d’elle dès que son corps commença à esquisser le charme d’une sensualité prometteuse, Judy, certainement, est la plus jeune des énigmatiques sœurs Morel. Celle qui la suit en ordre croissant, c’est-à-dire, de la plus jeune à la plus âgée, est une belle femme des cheveux soyeux et regarde pénétrante qui possède le péché terrible du meurtre. Donc, d’entre les plus belles sœurs Morel, et en continuant l’ordre croissant proposé, se trouve celle qui possède le péché égoïste de la vanité, ensuite, celle du péché abjecte et néfaste de l’avarice, de l’avarice plus extrême, bien sûr, que nous en pouvons imaginer, et finalement celle du péché de la gourmandise. Chacune d’entre elles, et comme nous pourrions supposer, connait le péché qui fut assigné à chaque sœur, mais il est à noter pour en tenir compte que, sauf les belles et éblouissantes Morel, personne ne connait cette particularité inouïe et bizarre qu’elles possèdent. Cette particularité que leur fait plus mystiques et plus déconcertantes. Celle qu’aucune d’elles ne peut contrôler le péché que inonde son âme complètement.
D’autre part, Sergio Muselman est un chanteur célébré de pop latino qui peut voir le futur dans ses rêves avec une netteté impeccable et éclairé. Ce don bizarre et énigmatique, pour l’appeler de quelque manière, il l’acquit quand il devint aveugle. Au début, quand il commença à manifester cette curieuse activité onirique, ce fut comme si un vent glacial et étrange soufflait dans sa peau, comme si une aura inquiète et inquiétant de pensées anachroniques s’emparait de lui. Mais avec le parcours, quelque fois fastidieux, quelque fois doux et léger des jours, les mois et les années, il s’est habitué à cette flux étrange du temps que n’est que la habilité mystique et pérenne de connaitre les évènements de l’avenir.
Il s’est habitué jusque tel point que, aujourd’hui, il ne se surprend plus de voir ce qu’il voit, bien qu’il est très étonnant que ses rêves se déplacent de long en large, en liant les évènements et en dessinant Sergio, comme si de rien n’était, les paysages, les formes et les couleurs du futur. Néanmoins, il est bien connu que tous les dons ont une limitation et celui de Sergio Muselman n’est pas l’exception. Il ne peut pas rêver des arômes et des saveurs, bien que dans le monde obscure et nébuleux de sa cécité, ces sont les sensations les plus habituelles de toutes.
Or, nous pouvons nous demander s’il est possible que ce soit la raison pour laquelle, en plus de son goût pour la musique et d’autres arts qui ne sont moins artistiques, Sergio s’est dédié à chercher depuis qu’il est devenu aveugle, le baiser le plus exquis que peut arriver à habiter le palais raffiné de sa mémoire. Il l’a cherché dans un grand nombre de filles. Filles des lèvres de saveurs distinctes, nuances et textures, bien que ce devoir de chercher le baiser le plus exquis, pour la date, on peut le dire, c’est déjà conclu. C’est déjà conclu avec Judy, c’est clair. C’est conclu d’une façon heureuse et placide, simple et à la fois inaperçue, bien que magistrale. Une forme bigarrée et simple des saveurs gravitants.
Tout commença avec un de ces rêves prémonitoires que d’un moment à un autre avertit à Sergio qu’il connaitrait Judy. Un rêve que, en réalité, révéla à Sergio le collant vert, les perruches de couleurs et les gestes progressifs de tendresse de cette femme dominicaine de nom Morel. Cependant, il faut dire que malgré le fait de rêver d’elle et ses dialogues, Sergio ne savais pas qu’il l’embrasserait jusqu’à ce qu’il le fit, et il ne sut pas que ce serait le baiser le plus passionné et fascinante de toute sa vie jusqu’à ce qu’il le sentit. Ce que Sergio sut malheureusement, quand il rêva encore une fois, des jours après la soirée magique que culmina avec ce baiser splendide, inspirateur et luxurieux, et pour tourmenter son âme et combler d’horreur chaque fibre de son être, c’était que Judy, son aimée et belle Judy, serait touée par lui.
