PARTIE 16 - Le réveil

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PDV interne : Damien

Le néant. Le vide. Il faisait noir et froid et, comme plongé dans un océan glacial et sans fond, je nageais dans ces eaux noires et peu accueillantes. Pourtant je ne sentais aucune sensation. Je ne sentais rien sous mes doigts. Je ne voyais que cette mer qui m'entourait. Aucun son, aucune odeur, rien. Pas de mince sifflement, ou même un petit bourdonnement. Même le bruit de ma respiration ne me parvenait pas ; respirais-je seulement ? Je posa une main sur ma poitrine et sentis une pulsation dans ma cage thoracique.
J'étais en vie alors..?

Soudain je vis apparaître devant moi une ligne blanche. Je plissa les yeux, mes rétines s'étant habituées à l'obscurité qui me noyait. Puis, petit à petit j'observa cette ligne s'allonger, s'épaissir devant moi, faisant fuir l'océan noir, éclairant tout d'une lueur éclatante qui m'aveuglait entièrement. Mes yeux, humides sous la douleur, s'habituèrent peu à peu à ce nouvel élément du décor. À présent je ne nageais plus dans les profondeurs mais j'avais plutôt l'impression que l'on me tirai vers le haut. La lumière se faisait de plus en plus intense et bientôt je ne fus entouré plus que par ce blanc immaculé.

Je ne sais pas combien de temps je passa comme ça, à flotter dans cette immensité homogène. Je n'avais plus conscience de la notion du temps. Je n'avais ni faim, ni soif, pas vraiment chaud mais pas froid non plus. J'avais l'impression d'être juste emprisonné dans un rêve sans fin.

Mais, alors que je commençais presque à oublier mon nom, je sentis une sorte de picotement, d'abord sur ma main droite puis sur le long de mon bras, et cela remonta dans mon cou, sur mon visage, parcourant tout mon épiderme. Ce n'était pas désagréable, seulement surprenant.
Que ce passait-il ?
Et sans que je ne m'en rendre compte, la clarté autour de moi s'estompa.

PDV interne : Thomas

Je serra la main de Damien pour la centième fois en l'espace d'une demi-heure.
Une demi-heure. C'était le temps qu'on m'accordait chaque jour pour aller au chevet du châtain. J'étais assis sur une chaise en plastique blanche, les yeux rivés sur le visage de Damien qui lui, était allongé dans un lit tout aussi blanc que le reste de la pièce. Un lit d'hôpital. Chaque fois que j'inspirais, l'air dans mes poumons me brûlait, comme si il me rappelait que moi, j'étais en vie.
Enfin, non, Damien n'était pas mort mais...
« Sa survie est un miracle. » m'avait assuré un médecin à la mine fatiguée. « Il est hors de danger. Maintenant il faut juste être patient. »
Dans le coma. Damien était dans le coma.
Lorsque j'avais appris la nouvelle j'avais été partagé entre le soulagement et l'accablement. J'avais peur, si peur, de le perdre. C'est lorsque j'avais vu cette balle traverser le corps de Damien que j'avais pris pleinement conscience de tout ce qu'il représentait pour moi. Je ne savais même pas comment il était devenu si important pour moi mais ça ne m'importait pas, ou en tout cas plus : Damien était entre vie et mort. Et tant qu'il ne se réveillerait pas, l'air dans mes poumons continuera de me brûler de l'intérieur.

Chaque fois que je me laissais tomber dans mes pensées, une tempête de souvenirs confus m'emportait. Je revoyais le sang sur mes mains, le corps de Damien au sol auprès de celui de son père. Je me revoyais enlacer le corps inerte de mon Amour pendant des minutes qui auraient pu lui coûter la vie avant d'appeler les secours. Une fois Damien aux urgences j'avais dû tout raconter. Je n'étais pas en état de mentir. Et je n'en avais tout simplement pas envie. J'en avais ma claque des mensonges. Alors j'avais tout dis. Mon père, le sien, lui et moi jusqu'au coup de feu. Je me foutais de ce qu'il  pouvait m'arriver et me contentait de fixer le corps endormi de Damien.

Je venais le voir tous les jours, après le lycée. Les médecins m'avaient dit qu'il était possible qu'il m'entende à travers ce lourd voile qu'était le coma et comme je ne pouvais que les croire, je parlais durant toute cette demi-heure à un Damien qui semblait dormir.

VOISINS DE TABLE || ᴛᴇʀʀᴀɪɴᴋOù les histoires vivent. Découvrez maintenant