Flammes d'un jour

La bête en ville

      Elle marchait dans la rue sombre sans croiser une âme. Cette ville pauvre ne connaissait pas encore l'électricité. Les bougies aux portes des maisons avaient été éteintes depuis bien longtemps. Un vent froid balayait les quelques tracts qui traînaient ici et là. Ils avaient été distribués dans l'après-midi. Elle en ramassa un, sa fine silhouette se courbant un instant. Le responsable des meurtres ayant eu lieu ces derniers mois rôdait toujours. Alors qu'elle reprenait sa marche, le papier glissa le long de sa cuisse et fut englouti dans l'ombre d'un porche. Ses pas, qui auraient dû résonner dans la rue pavée, ne produisaient aucun son. Ce silence semblait glacer jusqu'au Temps. Derrières certains volets clos, on apercevait une lumière, du mouvement. Là-bas, la vie continuait. Elle s'effaça dans une petite ruelle, s'infiltra parmi les ténèbres. Toujours plus loin. Au bout était allongé un corps. Il fixait le ciel de ses yeux vides, le remplissant de l'injustice qui avait été commise. Quelques flocons se déposèrent au-dessus de son cœur immobile, comme pour se faire pardonner. Elle s'agenouilla et lui ferma les paupière d'un geste doux et solennel. A présent, le mort semblait dormir paisiblement, sans que rien ne puisse lui porter atteinte. Elle suivit le filet vermillon qui s'étirait dans la ruelle tel le guide de cet instant, que nul ne pourra perturber. A son extrémité se trouvait la jambe manquante du mort. Et une bête aux crocs luisants sous la lune. Une lueur bleue se refléta jusque dans son âme. Elle leva sa main, où une flamme bleutée vibrant d'une énergie paisible venait de prendre forme. Le monstre fut englouti dans un feu azur. Il s'éteint, ne laissant pas même une cendre derrière lui. Elle disparu dans l'obscurité et emporta la Peur avec elle.