Chapitre 4

12 6 0
                                    

Je passe la fin d'après midi à calmer ma crise de larme. Revenir dans cet endroit n'était pas une bonne idée. Revoir mon frère dans ces circonstances n'en était pas une non plus. 
Trois domestiques arrivent en début de soirée pour m'aider à m'habiller. A en juger par leurs grimaces, je ne dois pas être belle à voir. Elle me force à entrer dans la baignoire en m'imposant de surcroît leur présence. Tout y passe, mes cheveux sont huilés pour les lisser, mes ongles sont limés puis blanchis et elle enduisent ma peau d'une crème au parfum de rose. Après une bonne heure de soin intensif, je peux enfin regarder dans le miroir sans me faire peur. Les domestiques m'ont choisies une magnifique robe en soie rouge bordeau pourvue d'un col bateau. Un tissu de velour noir au niveau de ma taille met en valeur mes hanches qui en ressortent délicatement dessinés. La robe tombe jusqu'en bas de mes chevilles et donne à ma tenue une impression de fluidité et de légèreté. Une domestique a coiffé mes cheveux en un chignon lache laissant plusieurs mèches tomber sur le devant de mon visage. Le chignon est parsemé de minuscules rubis qui rappellent ceux agrémentant le bustier de ma robe. La silhouette de la femme que je croise dans le miroir est digne d'une reine. Je ne me reconnais pas, la Lexiana de Lallybroch a disparu, remplacée par la princesse que mon père veut que je sois. Rien qu'à cette pensée, mon corps se crispe.
Les domestiques me pressent, ne voulant pas que j'arrive en retard à ma propre fête. La salle où l'on me conduit est l'une des plus grandes qu'il m'est était donné de voir. Tout ici n'est que dorure, argenterie et luxe. Le lustre en cristal qui nous surplombe diffuse une chaude lumière et renvoie de petits éclats bleutés sur les murs. Au fond de la pièce, entre les deux grandes baies vitrées se trouve un orchestre, quelques personnes dansent déjà sur un air classique pour lequel les musiciens ont opté. Le clairon annonce ma présence, me présentant une fois de plus comme la fiancée du prince. L'orchestre se tait, la salle se fige et tous les regards se tournent vers moi. Tant d'attention me gêne, un homme me fait signe de m'avancer et je cours me réfugier près des immenses tables qui regorgent de mets tous plus savoureux les uns que les autres. Les invités reprennent leurs discussions en chuchotant à mon passage. Je croise plusieurs regards méprisants, sûrement des personnes jalouses qu'une fille comme moi accède au trône un jour. Me sentant non-désirée,  je décide de me réfugier dans la nourriture, en plus je meurs de faim! Les mignardises sont succulentes, j'en ai presque un orgasme gustatif. Je laisse un gémissement de plaisir m'échapper quand j'entend derrière moi:

-    C'est délicieux n'est ce pas? J'ai essayé de corrompre le chef cuisinier pour avoir sa recette mais sans succès. 

J'avale de travers et rougis en croisant des yeux rieurs et un sourire bienveillant. Décidément, il faut croire que je n'arriverais jamais à faire bonne impression... la voix appartient à une jeune lady très élégante. Elle porte une robe vert d'eau qui s'accorde avec sa peau clair et contraste avec ses cheveux foncés. Ces yeux chocolats, légèrement bridés, reflètent une très grande intelligence. Cette fille ne vient pas de Kaselva, c'est certain. Elle reprend:

-    Oh... excusez mon impolitesse, je ne me suis même pas présentée. Je suis la Marquise Minerva Loyton.

Étant d'un statut inférieur au mien, Minerva commence à s'incliner. 

-    Je vous en prie, pas de cela avec moi, lui dis-je en l'aidant à se relever. Réservez vos courbettes à la famille royale... Je m'appelle Lexiana...

-    ...de Clairemont, je le sais. Et sans vouloir vous offenser, lady de Clairemont, vous faites maintenant partie de la famille royale, répond-t-elle avec une certaine gêne.

Cette Minerva ne m'a pas l'air méchante mais elle vient d'aborder un sujet qui prête à la dispute. Je détourne vite la conversation pour éviter de faire un esclandre.

-    Et d'où venez vous, ma chère? Vous n'avez pas le profil type d'une Kaselvienne.

-    Non, en effet. Le moins que l'on puisse dire, c'est que vous allez droit au but, rit-elle devant ma mine contrite. Ne vous inquiétez pas, vous n'êtes pas la première à poser la question. Mon père est l'ambassadeur de Karaval. Nous habitons au palais depuis quelques temps déjà, mon père s'occupe des traités entre les deux royaumes. Il m'a emmené car il s'est mis dans l'idée de me trouver un mari...

Crowned LiarsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant