Chapitre 2 : Angae 안개

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Des cris retentirent. Une fois, deux fois, puis le silence. Non. Des pleurs. Il y a quelqu'un d'autre. Ou quelque chose d'autre. Non. Quelqu'un. L'autre garçon. Celui dans la pièce à côté. Ou bien est-ce la fille ?  Il ne sait pas, il ne veut pas savoir. Il veut fuir. Si seulement il n'y avait pas ces chaines. Celles qui lui entravent les chevilles et les poignets. Celles qui claquent dans un bruit sourd à chaque mouvement. Et le noir qui l'entoure. Jour ou nuit ? Il ne sait plus.

Un autre bruit. L'orage ?  Une porte qui claque ? Un coup de feu ?  Il ne veut pas savoir.

Ses yeux s'ouvrent brusquement. Son corps est parcouru de frissons. Les draps lui semblent moites. Encore et toujours le même cauchemar, et cela depuis  17 ans maintenant. Lentement il se redresse, rejette les draps et se dirige vers la salle de bain attenante. Une fois nu, il plonge sous le jet d'eau fraîche qui fait disparaître petit à petit les traces de sa nuit mouvementée. Il ne sais pas exactement combien de temps s'écoule avant que la sonnerie de son téléphone retentisse. 10 minutes ? 15 ? Ou bien peut-être 30 ? Il regarde son écran qui affiche 6h49, soupire et décroche enfin à son interlocuteur. 

"- Je t'écoute."

"- Tu a l'air de bonne humeur, comme d'habitude !" Rigole l'homme à l'autre bout du fil, avant de continuer :

"- Tu sais l'homme sur qui tu voulais que je fasse des recherches, eh bien, il se pourrait que tu ais eu raison."

"- Et ?"

"- La vente se passe demain soir, 22h, dans le sous-sol d'un bar de Gangnam. Je t'envoie l'adresse par sms. Sois prudent."

Il soupira une nouvelle fois et raccrocha au nez de Park Tae-Woo, se demandant comment il pouvait faire pour supporter le tempérant à la fois excessif et protecteur de son meilleur ami. Peut-être parce qu'il pouvait être comme lui parfois, ou bien était-ce parce que son caractère le complétait ? 

Le jeune homme se saisit d'un peignoir, qu'il enfila, et se dirigea vers la terrasse où il alluma une cigarette. Il laissa la fumée entrer dans son corps, lui procurant une sensation de bien-être, et expira le nuage gris à travers ses lèvres. Lentement il laissa son esprit dériver sur les événements de la veille. 

Ki-Ha n'avait pas du tout imaginé finir sa soirée à accompagner un étudiant à l'hôpital, ni à le sauver d'ailleurs. Qu'est ce qui avait bien pu se passer dans la tête du jeune homme pour se fige en plein milieu de la voie de circulation ? Pour qu'il n'entende pas les nombreux bruits de klaxons ? 

"- Enfin c'est plus mon problème." Soupira-t-il à haute voix.

Il écrasa son mégot dans le cendrier qui se remplissait plus vite qu'il ne se vidait et se rappela soudainement qu'il avait laissé sa veste à l'étudiant en question.

"- Eh merde !"

S'il avait eu pitié de lui la veille avec son air de chien battu, maintenant il voulait seulement récupérer son précieux manteau. Avec si possible des suppléments, pensa-t-il rappelant le physique et le visage de Se-Yoon. Ki-Ha n'était jamais contre une partie de jambes en l'air, que ce soit avec des femmes ou bien des hommes, du moment que cela ne durait qu'une nuit. L'étudiant l'avait marqué par son visage attirant, mais aussi par sa présence. Il avait quelque chose d'atypique qui lui plaisait. Ça et aussi cette impression de l'avoir déjà vu. Peut-être à une des nombreuses soirée auquel il participait ? Ou bien lors d'une vente ? Peut-être l'avait-il déjà fait avec lui ? Non, impossible, présuma-t-il, je me souviendrais de son regard, ses cheveux et corps contre le mien, impossible. Mais pas impossible que ce soit le cas bientôt. 

Mais encore fallait-il que le jeune homme le recontacte, autant pour le rembourser, même si Ki-Ha s'en moquait royalement, que pour lui rendre sa veste. Chose qu'il espérait venir dans les prochain jours. Ou bien les prochaines semaines. Enfin le plus rapidement possible. 

Sa deuxième cigarette finie, il rentra enfin pour s'habiller, se saisissant de son holster au passage, car oui il valait mieux pour lui d'être armé, du moins la plupart du temps. Suivit ensuite un pull gris, un pantalon noir et une veste longue de la même couleur. Sobre, si on omettait ses nombreux tatouages et ses cheveux. Avec lui le mot "sobre" devenait "audacieux" voir "dangereux". 

Lunettes de soleil sur le nez, il claqua la porte de son appartement, descendit les 20 étages qui le séparait du rez-de-chaussée et monta dans sa voiture de sport. Pour lui, une journée comme les autres l'attendait. Sa sonnerie retentit de nouveau, et le nom de Tae-Woo s'afficha sur l'écran de bord. Il hésite un instant, puis décrocha.

"- Oui ?"

"- Changement de programme. Des problèmes avec le client, il faut que tu passe au bureau avant."

"- Me dit pas qu'il y en a encore un qui s'est permis de l'abattre avant moi ?" Râla Ki-Ha, en se disant que finalement ce ne serait pas une journée comme les autres. 

"- Heu... Eh... Bien, si peut-être..." Murmura son bras droit, redoutant la colère, qui pouvait être explosive, de son ami.

"- Le même ?" 

"- Oui."

"- Je vais le buter." Dit-il froidement.

"- Att..."

Ki-Ha raccrocha.  

  

Agmong (Cauchemars)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant