Voix

17 3 4
                                    

Parfois, il m'arrive de rester cloîtrée dans une pièce pendant plusieurs heures. Alors dans l'incapacité de m'en sauver. Bloquée dans cette pièce que j'ai moi-même verrouillée, contrainte de faire face à mes chimères. Moi seule possédant la clef susceptible de m'en délivrer un instant.

L'atmosphère qui règne dans cette chambre est lourde. Il y fait noir la plupart du temps. Quelquefois, une des lampes au plafond clignote. Et, l'espace d'un instant, j'y vois clair. Mais cela ne dure jamais longtemps.

Tantôt, je regrette que ma chambre ne soit pas parfaitement insonorisée et espère qu'un jour, seul le silence s'y laissera percevoir. Pour l'instant, ce n'est qu'une cacophonie constante de sons et de mots.

Les voix les plus puissantes proviennent d'une pièce située au-dessus et entretiennent des discours défaitistes, amers, cyniques et sinistres. Ce sont les voix auxquelles je tente de me dérober et que paradoxalement, j'aime le mieux entendre.

De temps à autre, j'entends des voix différentes, plus faibles face à leurs semblables. Des voix débitant des propos dont je ne saisis que des bribes et venant de derrière la porte. Porte capitonnée dont l'étanchéité vient à céder parfois. Ces voix amènes me demandent de sortir de la pièce. Ce sont les voix que je m'efforce de suivre et que paradoxalement, je répugne écouter.

Au-dessus de la porte se trouvent deux enceintes encastrées dans le plafond. Elles diffusent des mélodies composées de notes cristallines et de paroles tantôt salvatrices tantôt mélancoliques. Inspirant nombre de rêves, engendrant quelques tourments, et dont les vibrations provoquent le tremblement de ma chambre, prise de soubresauts. Et moi, à l'intérieur, ballottée, presque malade, presque soulagée.

Hormis cela, la pièce est vide. Et je reste là, allongée sur le sol. Chaud, froid, sec, humide, immobile et mouvant. A écouter et à attendre. Attendre que la porte s'ouvre.

Et pendant cette longue attente, l'anxiété survient. L'espace entre le sol et le plafond diminue, manquant de réduire mes os, ma cage thoracique en miettes. Privée d'air, gonflée de vide, je suffoque.

Une trappe au plafond se dévoile alors à ma vue. Une trappe que j'emprunte et qui me conduit à un véritable dédale.

Exigu et infini, tout aussi sombre que la pièce précédente, formé d'innombrables couloirs entremêlés. Les voix crachées à plein volume par des haut-parleur, enregistrées depuis des années déjà pour certaines, depuis hier ou même quelques minutes pour d'autres.

Et moi je reste prostrée là, immuable, au milieu de la nuit, du vacarme et du chaos.

-

Salutations.

FatalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant