Chapitre 1

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Chapitre 1 : Premier perdant 

 

"Que ce soit des zombies ou des fous, une épidémie ou un châtiment religieux, ces choses feront tout leur possible pour vous tuer."

2015, Miami... 

"Monsieur Pellock, dîtes-vous qu'il y aurait un moyen de stopper l'infection et de la limiter aux états du sud ? Demande une journaliste à un homme vêtu tout de noir et à la silhouette imposante.

-Je ne serais le dire, répond celui-ci. Pour l'instant, la seule chose que nous pouvons faire pour éviter ça, c'est de compter sur vous, le peuple. Je vous en prie, cherchez assez de vivres pour plusieurs semaines, barricadez vos maisons et n'y sortez pas. Ce qu'il se passe dehors paraît si dingue, mais reste réel. Nous comptons sur vous, hommes et femmes, à protéger le pays ainsi que le monde en vous engagent dans l'armée...

-Pff, rouspète Heather O'connell, les mains enfouies dans un paquet de chips. C'est de leur faute si Austin est parti !"

  La jeune fille de quatorze ans respire nerveusement, comme la nostalgie de son frère parti s'engager prend le dessus. Elle balaye ensuite du regard son salon bien trop vide, lui donnant le sentiment d'être emprisonné dans cette pénombre qui ne cesse d'aviver son appréhension. Elle passe ensuite ses yeux bleus sur une photo de famille accrochée à un mur non-loin de sa position déplorable et intentionnée aux évènements.

"Ne t'inquiètes pas ma vieille, se rassure-t-elle de haute voix en levant ses yeux au plafond et en tapant du pied. Je suis sûr qu'ils vont bientôt rentrer." 

La blondinette monte hâtivement le son de la télévision lorsque l'homme reprend, braqué par les cameras : 

"Certains disent qu'un refuge est en construction à Boston, d'autres démentent cette nouvelle. Ma foi, si vous avez le temps et le culot de sortir de chez vous et d'aller jusque dans le Massachussetts, donnez-nous de vos nouvelles ! 

-Justement, nous venons tout juste d'en avoir du Moyen Orient et de l'Espagne, s'empresse de compléter la journaliste. Il s'emblerait qu'ils soient eux aussi touchés. Comment expliquez-vous ceci ? 

-C’est fort simple. Savez-vous ce qu'est une épidémie ? Vous pensez que les océans la stopperont ? Si l'homme a inventé l'avion et le bateau, alors la nature n'est plus un obstacle."

  Promptement, la porte s'ouvre sur la vue de Sean O'connell. Le père de famille, vivres à la main, transporte le corps pantelant de sa femme Annie. Les lèvres d’Heather se séparent alors en un cri d’horreur tandis qu’elle se relève brusquement. Il jette Annie sur le canapé et laisse tomber les sacs de courses à la volée. Les larmes aux yeux, il se rue à son tour sur sa femme qui reste inerte, sous le regard tétanisé de leur jeune fille. 

"Papa ! S’écrie Heather en se rapprochant des deux figures.

-Vas dans ta chambre ! L'implore son père en la chassant d'un geste brutal.

-Non ! Qu'est-ce qu'il se passe ?"

  Elle regarde tristement la femme qui lui a donné la vie. Ses yeux rougis par les pleurs se posent sur une ouverture qui tranche le cou de sa mère et exhibe sa chair et ses os étrangement noircis. Sans prendre en compte la singulière plaie, elle s'écroule dans les bras d'Annie, qui ne change toujours pas de positions. Sean, en poussant un cri rauque, écarte sa fille d'un geste bien trop violent, comme celle-ci choir sur le sol. 

"Qu'est-ce qu'elle a ? Sanglote-t-elle en se relevant aussitôt. Qui lui a fait ça ? Nous devons appeler la police !

-Mais bon sang, Heather, regarde autour de toi ! S'indigne son père. Ce sont ces choses... Ils l'ont attaqué.

-Que va-t-il lui arriver ?

-... Vas dans ta chambre, Heath.

-Non !" 

  Tandis qu’elle reste debout sans bouger, les bras précairement autour de sa taille, Sean la prend nerveusement par le bras. Il parvient alors à la traîner jusqu'à sa chambre, la pousse pour entrer dans la salle bien trop sombre, avant de fermer la porte à clé derrière lui. Sur les pleurs de sa tendre Heather, il clame malgré lui :

"Ne crie pas, tu vas les faire venir ! Je… Je dois le faire mon cœur.

-De quoi ? Parvient-t-elle à prononcer. Que vas-tu lui faire ?

-Restes calme.’’                                                                                                            

  Après quelques instants, la jeune fille se tait et laisse à son père la possibilité de rejoindre son épouse sur le canapé. Il s'assoit à ses côtés et passe ses doigts tremblants dans les cheveux blonds et ébouriffés d'Annie. Il souffle ensuite un mot doux à ses oreilles, même s'il suffoque beaucoup trop. Sean dépose un dernier baiser sur les lèvres de sa femme qui s'accroche à sa respiration, puis se lève et sort de sa poche son arme à feu. Aussitôt qu'Annie ouvre ses yeux d'ambre, l'homme lui tire en pleine tête.

"Papa ! Rugie Heather en plaquant tout son poids contre la porte quand le coup de feu vient à ses oreilles. Ouvres-moi !"

  La porte s'ouvre soudainement. Heather chavire mais se relève en pleur pour courir vers sa mère. Lorsqu'elle la voit, à présent sans trace de tête humaine, elle se rue sur son père qui est resté derrière elle en suffoquant et en laissant libre à ses bras de tomber le long de son corps défaillant. Heather lui fou une bourrade dans le ventre qui ne lui suscite pas le moindre sentiment, car son cœur, lui, est déjà mort. Il prend fermement sa fille par les coudes et la secoue violemment pour la faire taire. Seulement, quand les deux aimants n’ont plus la force de se battre, ils se serrent dans les bras avec toute la force de leur colère.

  Bientôt, ils laissent un silence malsain s'installer. La blondinette n’ose regarder par-dessus des épaules de son père, mais enfoui a la place son nez dans sa peau roide. Il respire une dernière fois avant de glisser son arme dans sa poche-arrière et de prendre son sac. C’est ainsi qu’ils quittent l’appartement ainsi que toutes les choses qu’il peut contenir, sans aucuns regards en arrière.

  Dans la maison désormais déserte, seule la télévision résonne et illumine les lieux funestes. La voix rauque de Monsieur Pellock poursuit, énigmatique : 

"Des zombies ? Vous y croyez, vous ? Laissez-moi vous dire que, que ce soit des zombies ou des fous, une épidémie ou un châtiment religieux, ces choses feront tout leur possible pour vous tuer."

Septieme CielOù les histoires vivent. Découvrez maintenant