Chapitre 1 : Joyeuse Rentrée (Part 2)

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          Le professeur leur souhaita une bonne journée avec un sourire hypocrite qui irrita profondément Katie. Bianca ricana en voyant la moue rancunière qu'arborait son amie.
Mais elles n'avaient pas le temps de s'attarder : l'irlandaise avait un bus à prendre. Elle finissait plus tôt grâce à ses cours optionnels, et Bianca lui adressa une grimace puérile lorsque Katie lui souhaita bon courage pour ses quatre dernières heures de cours.

          La gameuse jeta un œil à son téléphone portable. Elle espérait que Mila lui aie envoyé un SMS, mais c'est avec déception qu'elle rangea le petit appareil dans sa poche.
Bianca se hâta de rejoindre la prochaine salle de cours, située à l'autre bout de l'université, mais elle dû affronter la horde d'étudiants qui venait en sens inverse et pas un ne la laissa passer.
Ce fut en grommelant contre l'incivilité de sa génération qu'elle arriva face à sa salle de classe et Bianca s'aperçut que le cours avait déjà commencé. Mal à l'aise, elle se glissa à l'intérieur aussi discrètement que possible et s'assit au premier banc qu'elle trouva libre.

          Par chance, le professeur ne remarqua pas son entrée tardive et l'étudiante put sortir un bloc de feuille et commencer à prendre note. Elle retaperait tout le cours sur son ordinateur un autre jour.
Quelques minutes plus tard, l'enseignant posa plusieurs question à ses étudiants. Bianca se dévoua pour répondre à certaines, ce qui attira l'attention de l'élève assis à sa gauche. Elle perçut plusieurs fois l'homme tourner la tête dans sa direction et sentit son regard posé sur elle pendant quelques secondes.
Une heure plus tard, une pause de dix minutes fut annoncée et Bianca s'étira dans l'espoir de se détendre un peu. Mais son voisin de classe se tourna vers elle, une étincelle d'intérêt brillant dans ses yeux.

— Excuse-moi, je peux te poser une question ? demanda-t-il avec politesse.
— Hum, oui bien sûr,acquiesça Bianca.
— C'est un peu bizarre... rit le garçon. Mais tu ne serais pas une streameuse de jeux vidéo ? Mioun ?

          Bianca cligna des yeux, choquée. Quelques secondes s'écoulèrent, et l'inconnu eut un air gêné. Il s'apprêtait à ajouter quelque chose quand la jeune femme opina du chef.
Elle parlait rarement de ses activités de gameuse, seuls ses proches savaient qu'elle tournait des vidéos sous le pseudo de « Mioun » et elle prenait bien garde à préserver son identité dans la vie réelle. Que ce garçon la reconnaisse la mettait légèrement mal à l'aise, et le souvenir de la lettre reçue durant l'été flotta quelques secondes dans son esprit.

— Oui... Qu'est-ce qui m'a trahi ? questionna-t-elle, la curiosité prenant le dessus sur sa timidité.— Ça fait quelques temps que je te suis sur les réseaux sociaux, avoua l'inconnu. Ta voix me disait quelque chose. J'ai commencé à regarder tes lives avec ton let's play de « Until Dawn ».

          Bianca retint un rire à la mention du titre, sorti quelques années plus tôt. Sans exagération aucune, elle était particulièrement nulle aux jeux d'horreur : malgré tous ses efforts, elle avait réussi à tuer tous les personnages en faisant plein de mauvais choix ou en bougeant trop fort la manette aux moments cruciaux.
Les deux étudiants firent lentement connaissance durant la petite pause académique, puis le professeur annonça la reprise du cours. Bianca cessa de prêter attention à son voisin et se concentra sur sa prise de notes.

          À la fin de l'heure, elle grogna et frotta ses tempes douloureuses. La majorité des élèves se leva et quitta l'amphithéâtre, mais Bianca avait encore un cours qui se déroulait au même endroit et elle resta sagement assise. Son voisin ne bougea pas non plus, et ils recommencèrent à discuter de jeux vidéo. Au bout d'une dizaine de minutes, un peu avant le début du dernier cours de la journée, Bianca se rendit compte qu'elle ignorait encore le prénom du jeune homme. Elle rectifia son erreur en le questionnant et celui-ci lui répondit avec un sourire contrit.

— J'avais oublié, pardon. Je m'appelle Shawn, et toi ? Je ne peux pas continuer à t'appeler « Mioun » après tout !
— Bianca, dit-elle avec un sourire amusé.
— C'est très joli.

          La gameuse ne releva pas : elle entendait les autres étudiants arriver dans le couloir de leur salle de classe, certains entraient et s'installaient déjà.
Bianca profita de la cohorte d'élèves pour se lever et s'étirer une dernière fois avant de passer les deux prochaines heures assise sur une chaise. Elle s'encouragea mentalement tandis que le professeur pénétrait dans la pièce, plus énergique que jamais. Plus que deux heures.
Son téléphone vibra à cet instant. Bianca se laissa distraire, reconnaissante de cette interruption inattendue. L'écran affichait le prénom de Mila et la jeune femme se sentit sourire bien malgré elle. Elle ouvrit le SMS et lut rapidement les quelques lignes du texto.

« J'ai la flemme de me faire à manger et tu finis tard. On commande chinois ? Je paie la bouffe et je squatte chez toi ! ».

          Son sourire s'élargit alors qu'elle répondait par l'affirmative. Elle non plus n'avait pas trop envie de cuisiner ce soir, la proposition de son amie tombait à pic.Et puis, c'était une occasion supplémentaire de voir Mila.
L'esprit plus léger, elle tenta vainement d'écouter le professeur de littérature, mais elle n'écrivit pas grand chose sur sa feuille, plongée dans ses pensées. Quelques fois, elle sentit le regard curieux de Shawn se poser sur elle puis sur sa copie, mais il ne dit pas un mot du reste du cours.

          La sonnerie de fin des cours retentit deux heures plus tard, et Bianca rangea ses affaires en un temps record, pressée de rentrer chez elle. Sa meilleure amie connaissait ses goûts par cœur et venait de confirmer par message que leur commande arriverait dans quelques minutes.
Il était plus de dix-huit heures quand elle s'assit dans sa voiture. Bianca alluma la radio et augmenta le volume pour contrer l'ennui des ralentissements spécifiques aux heures de pointe. Elle serait chez elle dans une vingtaine de minutes et accueillerait Mila quelques minutes plus tard, et les deux filles s'endormiraient devant une émission télévisée un peu débile qu'elles critiqueraient toute la soirée. Mais pour le moment, elle chantonnait doucement les paroles d'une musique à la mode, bloquée dans les bouchons.

Correspondance MortifèreWhere stories live. Discover now