Chapitre 4: Le conseiller.

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Sédyn était debout derrière la chaise du Prince. Ses deux mains pleines de bagues en or tenaient fermement ses épaules. Doucement, il s'était décidé à les masser, un sourire en coin. Il fixait le paysage par la fenêtre, droit devant lui. Ses longs cheveux noirs étaient coiffés dans une natte qui retombait au niveau de ses fesses, il restait sérieux dans sa tunique beige. Ses deux pieds semblaient enfoncés dans le sol, il ne bougeait pas. A l'instar de sa vie, il n'avait jamais quitté le Prince. Les cernes du basané témoignaient de son dure labeur auprès de son souverain. Entre ses lèvres charnues, un brin de blé dansait au même rythme que son sourire. Le soleil à cette heure tardive de la journée faisait parfaitement ressortir ses tâches de rousseurs. Toutes les femmes de la cité vantaient la beauté du jeune homme. En plus d'être d'une très bonne situation, on disait de lui qu'il était humble et intelligent. L'un des plus intelligents du royaume. Les rumeurs allaient bon train. Certains avaient même inventé que les tâches bleus sous ses yeux étaient la preuve qu'il avait lu toutes la bibliothèque royal en deux nuits entières. Beaucoup adulait le Conseiller particulier du Prince.

« Qu'est-ce que je devrais faire ? »

La question résonna dans la pièce comme un soupir. D'habitude, c'est vrai, Sélyn avait rapidement les réponses aux questionnements du souverain. Mais cette fois, il le savait, la question de Askam n'en était pas vraiment une. Il le sentait dans la façon dont sa voix avait déraillée en la posant. Il avait eût cet air déterminé et fourbe dans le regard, il voulait qu'on garde cet homme. Pourtant, le conseiller ne pouvait s'empêcher de ressentir un pincement au coeur, quelque chose dans son âme le persuadait que c'était une mauvaise idée, l'instinct ? Son petit sourire s'était transformé en machoire bien serrée, et le brin de blé avait vite fini dans la poubelle. Il lâcha les épaules de son Prince et se plaça à sa droite, s'abaissant sur les genoux pour être au niveau de la chaise. Sa main droite attrapa le menton d'Askam pour tourner son visage en face du sien. Il plissa ses yeux, ceux du conseiller était d'un vert profond, déjà assez rare dans cette contrée. Le Prince déglutit. Pourquoi était-il toujours si intimidé par son ami ? Ils avaient pourtant grandis ensemble, ils se connaissaient comme des frères. Leurs peurs, leurs désirs et leurs pensées n'étaient pas un secret. Ils s'étaient souvent tout dit.

« Fais ce que bon te semble, Askam. C'est aussi simple que ça.
- Tu crois ? Les autres disent que les étrangers attirent la guerre.
- Je serais là pour t'en protéger. »

Le conseiller, dès les premiers jours de sa vie, avait prit soin du souverain. Leurs pères étaient amis. Dès son premier souffle, on avait décidé qu'il serait le bras droit de l'enfant promis. On les avait élevé en parralèle, l'un avec l'autre, l'un pour l'autre. La mère de Sédyn aimait dire que « Askam » avait été son premier mot. Sédyn avait eût une enfance et une adolescence particulière, il avait dû apprendre tout ce dont un royaume a besoin ; économie, justice et politique. Son nez avait frôlé les lignes de nombreux livres. La rumeur était presque vraie. Ses pupilles avaient passé au crible bien des bouquins. Mais, ce que personne ne pouvait se douter, c'était la noirceur de son esprit. Bien qu'on le disait gentil et attentioné, il avait cette part d'obscurité qu'il tentait de cacher. Il n'était pas aussi bon que son souverain. A force d'apprendre des plus grands, un désir était né dans son esprit, sans qu'il puisse faire autrement. Une envie de gouverner, un orgueil qui devenait chaque jours plus grands. Cependant, c'était contradictoire. Son esprit et son coeur étaient dans un combat sans fin. Car, quand il regardait Askam, comme à l'instant, il ne pouvait interdir cette sensation dans son ventre ni son pouls d'accélerer à l'en faire souffrir. Il n'arrivait pas non plus à détâcher cette main arrogante de ce visage si pûre. Le Prince posa la sienne par dessus. Sédyn crû perdre la faculter de respirer.

Aleksi Osmund; Le protégé des Dieux. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant