PATIENT42

Vérité

Une semaine après les vacances, Yami était peu concentré sur ses études et passait ses journées avec Mahado au Kame Game Shop. Ils essayaient de décrypter les autres pages du carnet qui était en piteux état, mais en vain.

— Le mot de passe pour le faire parler, tu penses qu'il y est ? demanda l'homme.

— Ça doit être ça ? dit Yami en lui montrant sur le carnet. J'en ai parlé avec Yûgi ce matin et il m'a dit qu'il aimerait tout me dire, mais sans ce mot de passe il n'arrive pas à s'en souvenir. Et il m'a conseillé de tout filmer, on ignore ce qui pourrait se passer.

— C'est tellement... troublant.

— J'ai eu déjà beaucoup de mal à y croire, malgré toutes les preuves. J'ai toujours pensé que Yûgi avait vécu une enfance difficile avec une famille d'accueil infâme... mais..., Yami soupira et se frotta le visage. Mais je n'avais pas imaginé un cobaye pour un projet scientifique...

Les deux hommes restèrent silencieux, à réfléchir. L'arrivée tonitruante de Mana et de Yûgi les fit sortir de leur songe. Les deux adolescents, à bout de souffle, avaient l'air d'avoir couru un bon moment.

— Qu'est-ce qui passe ? demanda Mahado.

— Il... Il y avait un mec trop chelou qui nous a suivi juste après la salle d'arcade ! déclara Mana qui reprenait son souffle.

— Roh moi... je n'ai rien vu, je mangeais ma crêpe... d'ailleurs je l'ai fait tomber... 350 Yens de perdu par ta faute...

— Je tiens à tes fesses Yûgi ! Pas à ta crêpe, imagine qu'il nous kidnappe ! Ce bronzé a l'air menaçant...

— Mais ma crêpe... Attends, tu as dit un bronzé ?

— Chut... c'est fini Yûgi on est en sécurité... l'interrompit la jeune fille qui le caressait afin de le rassurer. Ta crêpe s'est sacrifiée pour toi.

Yûgi se tut, mais il était tout de même pensif, comme s'il connaissait l'identité de cet homme. Le jeune tuteur avait bien remarqué l'expression du garçon et savait quoi lui demander une fois arrivés chez eux.

Chez le tuteur, dans le salon, une caméra était installée face au canapé. Yûgi y était installé prêt à être questionné. Yami hésitait encore, de peur de ce qui pourrait se passer.

— Yami ? Tu n'as pas à hésiter.

— Mais si les souvenirs se révèlent désagréables.

— Qu'importe, je ne suis pas le seul concerné. Le message doit être important...

— Hum... oui. Mais quand même. Je n'ai pas envie que ça te trouble comme avant...

— Je... Je vais me maîtriser. Je serai sans doute un peu anxieux, je ferai des cauchemars...

Le jeune tuteur serra Yûgi dans ses bras et lui fit un baiser furtif sur le front.

— Je suis là pour toi Yûgi, n'oublie pas ça.

— Je ne l'oublierai pas. Et je suis prêt Yami...

Yami défit son étreinte, se plaça à côté de l'équipement et lança l'enregistrement. Carnet de notes sur les genoux, il commença à poser plusieurs questions tout en notant ses réactions et son comportement.

— Bien... Si je te dis 14, tu te souviens de quoi ?

— Rien...

— Bien, je vais me lancer « 14 Start ».

À ces mots Yûgi s'était comme figé, ses yeux dilatés, sa voix prit alors un timbre plus monocorde et il commença à décrire le sort du sujet 14 comme l'avait fait 82 dans le carnet. C'était surprenant et perturbant à la fois. Voir à quel point son protégé avait changé pour se mettre à parler, sans aucune émotion apparente troubla énormément Yami. Le jeune tuteur essaya de l'arrêter en l'appelant par son prénom, mais rien n'y fit, Yûgi continuait à décrire dans les moindres détails la mort d'un pauvre garçon.

— « 14 over »... Putain de merde... dit Yami un peu sous le choc.

— Hum ? Quoi ? demanda Yûgi qui avait repris son état normal.

— Tu te souviens de ce que tu viens de dire ?

— Dire quoi ? Je n'ai rien dit, j'attends tes questions...

— C'est juste... Bref, tu te sens comment actuellement ?

— Un peu mal à la tête, mais ça va...

Yami se frotta le visage et reprit ses questions. Il essaya même de mettre plusieurs combinaisons dans le système d'over, telles que « 82 Start » « Test Start », mais sans aucun résultat.

Il était temps d'introduire le mot de passe...

« Mon ami 42 Start »

Écoute 42, nous sommes tous ou plutôt faisions tous partie du projet « Number », une copie du projet américain MK-Ultra. Depuis les années 50, plein de gosses comme nous y sont passés, pour être des pantins et sont morts pour la plupart. Agir contre notre volonté... être des machines. Tu es celui qui devra tout mémoriser, même sous la torture, sans le mot clé, tu ne te souviendras de rien. 12 et moi nous sommes des échecs, nous étions destinés à n'avoir aucune émotion, être des armes pour tuer sans remord. 70 devait être celui qui ne ressent aucune douleur... C'est le cas, il ne sent plus rien au point de se blesser lui-même. Nous allons tous mourir et toi aussi une fois que tu auras tout emmagasiné. À ce que j'ai compris, tes connaissances nouvelles effacent ton passé instantanément. Mais garde dans ta mémoire cette carte, et cet endroit précis. Surtout, n'oublie aucun d'entre nous, nous sommes amis, non, nous sommes tous frères ici. Et nous sommes les frères des futurs chiffres, des futurs 14 et 16 qui seront dans un autre centre... Tu devras trouver la bonne personne à qui confier ces informations, une personne de confiance...

Le mot de passe pour accéder aux fichiers est « Num-KC », toutes les informations sont accessibles... Mon frère 42, j'espère qu'après ça, on sera libre, tu seras libre... surtout dans ta tête. Je prie pour toi mon ami 42. Over...

Après ses paroles, Yûgi se mit à compter, plutôt à énumérer ses compagnons, la voix tremblante, les yeux larmoyants. Arrivé au bout, il se mit à sangloter. Yami se précipita vers lui pour le serrer dans ses bras et essaya de le calmer.

— Je me souviens de tout, de chacun d'entre eux... c'est horrible...

— Je sais Yûgi, je suis là avec toi, tout va s'arranger, le rassura Yami qui lui caressait la tête avec tendresse.

— 82 est mort pour nous Yami... Je me souviens... Le soir de la fuite avec Shuzo et un autre de ses collègues, les corps devant le centre... 82, il était blessé, il me tirait au mieux à travers la forêt. On était poursuivi, 12 avait était capturé. Une fois arrivé sur la route, 82 s'était écroulé et après je ne me souviens plus de rien. Ensuite, tu connais le reste.

En effet, Yami connaissait le scénario. Tout était devenu plus clair, les dossiers médicaux incomplets, les « tuteurs » afin de le surveiller, bref, le mystère s'était révélé à eux.

Il ne reste plus qu'à dévider la pelote !

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OVER