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Fin de la première journée de cours
Pour fêter la fin de notre première journée de cours, j'ai invité Alexandre chez moi, dans mon studio du quartier Saint Michel. Pendant que mon ami cuisine, j'appelle mon père et mon frère pour leur raconter ma première journée. Évidemment, je ne peux m'empêcher de leur parler de la nouvelle. Et comme je m'y attendais mon père me dit qu'il faut que j'apprenne à la connaître avant de la juger, tandis que mon cadet me demande si elle est belle. Je lui décris rapidement son allure. Il répond à ma description par un commentaire peu flatteur pour la jeune fille en question. Nous plaisantons encore un peu avant que je ne raccroche.
Je m'approche d'Alexandre pour voir ce qu'il cuisine. Mon ami a un talent sans pareil pour mitonner les produits les moins chers et accommoder les restes. « Quand, tu n'as pas beaucoup d'argent, il faut être créatif, me précise t-il souvent. ». Ce soir, comme pour ne pas déroger, il a fait simple : des pâtes à la sauce tomate. Il faut dire aussi que chez-moi on trouve rarement autre chose que des féculents et de la sauce en pot.
« Lucas vient ?
— Oui, après son sport.
— Il sera là dans combien de temps ?
— Une trentaine de minutes. »
En attendant notre ami, nous papotons.
Une demi-heure après, on sonne à la porte, je vais ouvrir, Lucas entre, il me fait la bise avant d'aller embrasser Alexandre. Je suis contente qu'ils se soient trouvés tous les deux. Alexandre et Lucas sont copains depuis le collège. Et Alexandre est amoureux de son ami depuis presque aussi longtemps. Mais ce n'est que durant l'été dernier qu'ils se sont mis en couple. Il a fallu qu'un bête accident cloue Lucas au lit pendant plusieurs semaines pour que leurs sentiments se rejoignent.
Lucas avait dû être plâtré. Les parents du jeune homme étant en vacances à l'autre bout de la planète, Alexandre, s'était occupé de lui. Lorsque celui-ci était parti au retour des parents de Lucas, ce dernier c'était rendu compte qu'Alexandre lui manquait. Il avait mis quelques temps à comprendre ce sentiment de manque, qu'il n'avait encore jamais ressenti. Il était amoureux de son ami. Cela lui paraissait totalement incompréhensible, puisqu'il était hétérosexuel. Même si cela n'avait pas été facile, il avait fini par accepter les sentiments qu'il éprouvait. Et depuis Alexandre et Lucas filaient le parfait amour. Pourtant, l'un et l'autre sont assez différents. Lucas a des cheveux noirs, la peau d'une blancheur de lait avec quelques taches de rousseur, il est aussi un peu plus grand qu'Alexandre, et surtout plus musclé. Il est aussi plus instinctif et dynamique. Je ne suis jamais sûre de remporter une partie de bras de fer avec lui. En dehors d'être le compagnon de mon meilleur ami, et c'est quelqu'un que j'apprécie, c'est aussi un étudiant comme nous. S'il est dans la même université que nous, il n'est pas inscrit en Histoire, mais en Sociologie.
Si à l'université leur relation ne posait pas de problème, il n'en n'allait pas de même chez leurs proches. Si les parents de Lucas l'avaient assez bien accepté, ce n'était pas le cas de ceux d'Alexandre, qui en avait profité pour leur annoncer son homosexualité. Aussi avaient-ils prévu d'aller chez les parents de Lucas lors des prochaines vacances. Si celui-ci n'avait pas eu de problème avec sa famille, ses amis avaient plus de mal à comprendre, pourquoi le tombeur du lycée était devenu homosexuel. Les plus déçues étaient sans doute les filles qui rêvaient de sortir avec lui, et qui n'hésitaient pas à se répandre en commentaires assassins sur Alexandre. Même s'il ne le montrait pas, il en avait beaucoup souffert.
Je sors de mes pensées et met à écrire un message destiné à mes amies restées au village, quand j'entends la voix de Lucas dans mon dos :
« Alors il parait qu'il y a une nouvelle et que tu ne l'aimes pas ?
— Je n'ai pas dit ça.
— Non, mais tu ne l'apprécies pas pour autant, me répond Alexandre.
— C'est un cliché ambulant. Le cliché de la jeune fille catholique parfaite, reprends-je. Comment veux-tu que je l'apprécie ?
— Tu sais bien comme moi, que c'est un vernis, et que si tu grattes la peinture, tu découvriras qu'elle est différente de cette image. C'est ce que tu as fait avec moi.
— Tu as raison, la première fois que je t'ai vu je pensais que tu étais bon élève, issus d'une famille bourgeoise, que les filles te tombaient dans les bras, ...
— Alors laisse-lui une chance s'il te plaît.
— Hum.
— Si on s'aperçoit que ce n'est pas qu'une façade, on lui dira ...
— D'aller se faire chez les Grecs !
— Je ne l'aurais pas formulé ainsi ? mais c'est cela.
— Sinon elle ressemble à quoi, demande soudain Lucas ? Ses bras autour de la taille de son copain, il nous avait observés discuter et la manière dont Alexandre avait réussi à me faire changer d'avis.
— Elle est plus grande que moi, ronde, avec des lunettes, une longue natte, habillée avec une jupe plissée bleu marine, un chemisier blanc, c'est à peu près tout ce que j'ai remarqué lui répondis-je.
— Bref ? ce n'est pas ton genre conclut, Lucas.
— Je n'ai pas dit ça.
— Ton genre, ce sont les belles du désert, comme Samiha, renchérit-il.
— Tu vas la fermer, dis-je dans un sourire. Je lui lance alors dans un éclat de rire. Est-ce que je parle de ton râteau ? Le seul que tu as pris. Non. Alors laisse Samiha où elle est. »
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L'aristo arc-en-ciel
Fiction généraleJe m'appelle Aliénor de Montbazac, j'ai 30 ans, je suis homosexuelle et j'ai déjà quelques souvenirs à raconter