Un pli contrarié barre son front. Je vois bien que cette situation le mine.
Mickey a beaucoup changé depuis les bancs de l'école. Il a troqué sa veste en cuir pour du tweed, qui lui donne un air de bon père de famille, et ses cheveux blonds indisciplinés autrefois mi-longs sont désormais coupés en brosse. Et comme Élisabeth ne supporte ni les peaux sèches ni les barbes, il apporte un soin particulier à la satisfaire. L'adolescent rebelle a laissé sa place à un homme respectable, papa d'une petite Louisa de quelques mois.
Si on m'avait dit qu'il serait casé et géniteur d'une gamine à vingt-sept ans, je ne l'aurais jamais cru.
— Tu te souviens de la bande à Mathias ? me demande-t-il brusquement avec un petit air nostalgique. On l'avait rétamée.
Difficile d'oublier. J'ai encore une cicatrice sur le crâne. Une petite vermine m'avait frappé à la tête alors que je lui tournais le dos. J'avais passé la nuit aux urgences dans un lit, Mickey dans celui d'à côté. Des côtes cassées, un bras et un pied dans le plâtre avaient été le prix à payer pour régler nos comptes avec ce groupe.
Même en y réfléchissant toute la nuit, je ne serais plus dire ce qui avait déclenché la première bagarre.
Enfin, si. Moi et Mickey, nous aimions nous battre. Cogner, c'était notre façon d'extérioriser nos démons. Pourtant, à côté de Mathias et ses copains, nous étions bâtis comme des princesses. Mais nous avions la hargne. Une hargne qui nous poussait à nous relever alors qu'il aurait mieux valu jeter l'éponge.
Notre fierté était la seule chose qu'on avait à protéger.
— Nous avions dix-huit ans. Nous étions jeunes et pas particulièrement malins. Et puis, tu avais moins de rides. Et moins de bide.
Je lui souris de toutes mes dents.
— Marre-toi, p'tit con. Depuis que Natacha t'a quitté, tu n'es plus le même non plus.
Cette fois, je n'ai plus envie de rire. Ce sujet est toujours aussi sensible, et il est le mieux placé pour le savoir : c'était la première fois que l'idée de me poser m'avait effleuré. Pour un gars comme moi, ce n'est pas anodin.
— J'ai besoin de temps, avoué-je enfin.
— Un homme n'a pas besoin de temps, il a besoin de baiser. Sors un peu de ta grotte et pars à la chasse.
— En fait, tu veux que je me case pour que tu n'aies plus à mentir à Élisabeth. T'es dingue. Va te faire soigner.
Il tire si fort sur sa cigarette que pendant une seconde j'ai l'impression qu'il va l'aspirer en une seule fois. Mais ses lèvres s'en détachent et il souffle sa fumée dans un silence des plus pesants. Mickey a un tic nerveux. À chaque fois que quelque chose le préoccupe, il a tendance à basculer sa tête sur le côté. C'est très rapide, mais pas assez discret pour passer inaperçu. Depuis qu'on s'est retrouvés, son cou a fléchi à trois reprises. Il est à bout de nerfs.
Il jette un autre regard à Louisa, avant d'écraser sauvagement son mégot.
— Je croyais que tu avais arrêté de fumer depuis la naissance de la petite. Élisabeth est au courant ?
— Ne change pas de sujet, râle Mickey, mais avec une grimace des plus explicites. Je n'ai pas envie de passer mon temps à lui mentir pour te voir. Sache qu'elle n'a pas digéré la remarque de Natacha sur sa robe.
Encore cette histoire !
— Y'a prescription. Et puis, cette tenue la boudinait. Je reconnais qu'il y avait une méthode plus subtile pour lui faire passer le message, mais...
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Entre Elles & Moi devient DUAL LOVE (Éditions Plumes Du Web )
RomanceMax n'a plus le choix. Il doit trouver, dans les plus brefs délais, une « gentille » copine qui l'aidera à redorer son blason auprès de la femme de son meilleur ami Mickey. En effet, depuis que son ex, Natacha, a créé des histoires lors du mariage d...