Chapitre 4-1

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De retour à notre immeuble, je vois bien qu'elle a perdu encore des couleurs. Cette fois-ci, elle le reconnaît sans trop de mal. Je ne me vois pas la porter dans les quatre étages des escaliers, mais prendre l'ascenseur ne m'enchante pas du tout.

— Non, me répond-t-elle aussitôt après lui avoir annoncé mon intention d'éviter les marches.

— Le soleil sera déjà levé avant que tu ne sois chez toi.

— Il n'est pas question que je prenne l'ascenseur.

Butée, elle lève une jambe, puis une autre, tandis qu'elle franchit lentement les six premières marches. Il en reste vingt-sept.

Je ne la quitte pas d'une semelle. Dans d'autres circonstances, j'aurais été impressionné par sa volonté de surmonter cette épreuve, mais dans la situation présente, je me contente de lui dire à quel point je la trouve stupide et que ce serait beaucoup plus simple pour tout le monde qu'elle m'écoute. J'ai droit à un grommellement digne d'un homme des cavernes pour toute réponse.

Cette fille m'emmerde royalement. Je pourrais la planter là, maintenant, mais je sens que ce serait une mauvaise idée.

Je monte les marches deux par deux pour l'attendre à l'étage au-dessus. Je m'installe tranquillement sur les marches et je l'observe souffrir avec un plaisir évident. Mon sourire éclatant engendre quelques commentaires acides de sa part. Qu'elle grogne, qu'elle aboie ou qu'elle marmonne si cela lui chante, je m'en moque.

— Tu m'as raccompagné, maintenant je n'ai plus besoin de ton aide.

— Je n'en doute pas une seconde.

— Tu comptes jouir du spectacle encore longtemps ?

— Sans toi, je serais probablement en train de tripoter les seins d'une belle blonde pendant que je lui fourre ma langue dans sa bouche, donc... oui.

Elle me décoche un regard assassin, qui me fit ricaner.

— Vous, les mecs, vous êtes d'un romantisme épouvantable.

— Oh, mais je peux me la jouer poète quand je veux.

— Je meurs d'envie d'entendre ça.

Je vois bien que non. Mais rien que pour la faire suer, je me concentre. Je prends une profonde respiration et me lance dans une improvisation digne d'un grand orateur de pièce de théâtre :

— Toi, ma belle amie ! Toi, ma douce chérie ! Quand ma queue frétille, je sais que je peux te culbuter comme dans un jeu de quilles !

— C'est pathétique.

— Je peux faire mieux si tu veux.

— Je m'en passerai volontiers.

Pour s'éviter la torture de nouveaux vers, elle reprend son ascension aussi vite qu'elle peut. Autant dire à la vitesse d'un escargot au galop.

Je n'ai pas dit mon dernier mot. Je me lève tandis qu'elle me contourne et je grimpe à ses côtés tranquillement avec la ferme intention de lui dévoiler tout mon catalogue de poésie. Je prends mon pied à glisser les mots « queue » et « chatte », ce qui fait bouillir ma voisine. Je me retiens d'éclater de rire devant sa mine offusquée. Encore une prude.

— Je ne suis pas prude, espèce de crétin ! éclate-t-elle enfin devant mon insistance à la bousculer. Je ne supporte pas les gars dans ton genre, vous n'avez aucune classe ! « Bite », « chatte », vous n'avez que ça à la bouche !

— Et pas ton petit copain, peut-être ?

— Je te l'ai dit, ce n'est pas mon petit copain !

Entre Elles & Moi devient DUAL LOVE (Éditions Plumes Du Web )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant