Time traveler

I

Je ne sens plus rien, ni le vent sur mes cheveux ni le sol sous mes pieds.
Je ne sens plus rien.
Je suis vide.
Comme si mon corps ne m'appartenait plus.
Comme si je tombe au ralentis dans un trou noir et que toutes mes émotions étaient aspirées loin de mon être.

Ils sont morts. Tout le monde est mort. Le monde que je connaissais jusqu'à présent...Tout est mort.
Je revois leurs visages, je réentends leurs cris de douleur, de souffrance. Et je ne ressens rien. Je suis morte à l'intérieur.

Je tombe. Je me relève. Je me sens comme un robot. Je fais ce que je dois faire parce que je n'ai pas le choix, parce que je n'ai plus aucune volonté propre qui me pousse à faire autrement. Je me lève et je marche. Je n'ai plus qu'un but. Qu'une mission inscrite dans mon disque dure. Je n'ai pas de choix. Je ne peux pas faire demi-tour sans avoir accompli mon objectif.

Je marche depuis tellement longtemps, je ne sens même plus mes pieds. Je ne sais même pas si j'ai encore des pieds. J'ai laissé un champ de cadavres derrière moi. Mais il ne faut plus penser au passé. Il ne faut penser qu'à la mission. Regarder droit devant soi et continuer à avancer. Et pour l'instant droit devant moi, tout ce qu'il y a : c'est Poudlard.

Je pénètre dans l'enceinte de l'école et avance doucement dans ces couloirs que j'ai parcourus pendant plus de 8 ans dans le passé. Je les connais par cœur. Chaque passage secret, chaque tableau, chaque fissure sur les murs. Rien ne semble avoir changé. Rien ne ressemble au monde que j'ai quitté.

-Mademoiselle ? Que faites-vous dans les couloirs ?

Devant moi, un homme. Surement le concierge. Il ressemble à Rusard. Mort.

-J'ai raté le départ des charrettes, je suis en retard pour le diner.

Ma voix sonne faux, comme irréelle. Ce n'est pas moi qui parle, c'est le robot. Et le robot joue le jeu. Car il faut réussir la mission. Alors je souris et je laisse le robot guider mon discours, car Merlin seul sait si j'aurais été capable de ne dire qu'un seul mot par moi-même.

-J'étais pourtant sûr d'avoir compté tout le monde... Venez avec moi.

Il part devant et je le suis. On tourne dans un couloir et on arrive devant la porte de la grande salle.

Tellement de souvenirs ressurgissent en moi. Tellement de peine et de douleur. Je préférais le vide. Je préfèrerais ne pas pouvoir penser, ne pas devoir parler. Je veux juste pleurer et oublier. Je me referme comme une huitre face à mes émotions et rentre à la suite du concierge. Tous les regards se tournent vers moi, mais je n'ai pas peur, j'ai l'habitude.

-Freud que se passe-t-il ? Qui est-ce ?

C'est le professeur Dippet qui a parlé. Je le reconnais grâce au tableau, quoiqu'il a l'air bien plus jeune. Les professeurs derrière lui semblent tout me regarder d'un œil curieux. « Qui est cette drôle de fille couverte de boue, de sang et de poussière » doivent-ils se demander. Mais je fais abstraction.

-Une élève monsieur, elle dit avoir raté les charrettes.

-C'est curieux, je ne pensais pas que nous avions de nouveaux élèves de dernière année. Il se penche vers moi, semblant m'étudier de tous les abords. Nom et prénom s'il vous plait ?

-Hermione Dumbledore.

Des cris d'étonnement se font dans toute la salle et des murmures s'élancent de part et d'autre. Mon regard se pose sur mon ancien directeur. Il ne montre aucune émotion, mais je peux lire dans ses yeux l'incompréhension et la surprise qu'il tente en vain de cacher. La mission ne peut avoir lieu que si Dumbledore acceptait de jouer le jeu. Tout repose sur lui maintenant, acceptera-t-il ?