Chapitre 2

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ROSIE


Je peine à ouvrir les yeux, puis les cligne à maintes reprises. Je sens le vent frais qui effleure mon visage, telle une douce caresse. J'inspire profondément. Je suis debout et mes jambes tremblent. Mais la dernière chose dont je me souviens, c'est de m'être endormie dans mon lit chez mes parents.

Quelque peu déstabilisée, j'ouvre finalement les yeux et contemple l'étendue devant moi. Mes pieds se trouvent à quelques centimètres du rebord du toit d'un immeuble de dix étages, en plein cœur du centre-ville. Au-dessus de ma tête, la lune ronde éclaire le sol d'une lueur argentée. Il fait sombre. Nous sommes au beau milieu de la nuit ; les rues sont désertes. Je me sens comme enveloppée d'une brume qui affecte mes sens. Incapable de ressentir de la panique, de la peur ou de l'inquiétude. Je me sens presque... paisible.

Lentement, je recule, puis pivote. Mes yeux cherchent constamment un indice quelconque qui expliquerait ma situation. J'avance d'un pas.

Au loin, au sol, une fumée noire s'approche en tourbillonnant. La tête penchée sur le côté, je la scrute, intriguée par ce phénomène. Le nuage s'élève, prend de la grandeur. Il s'épaissit, devient un condensé de noir et de plumes. Muette face à ce spectacle, l'émerveillement prend possession de moi. C'est... joli.

Je referme les paupières. Je me sens soudainement si fatiguée. Et étourdie. J'ai beau avoir les yeux fermés, je sens que tout ce qui m'entoure virevolte, comme si je me retrouvais au cœur de l'étrange fumée noire.

Malgré tout, je me sens sereine. En paix. Ce qui est contraire à la réaction naturelle que je suis censée avoir. Une partie de mon cerveau comprend cela ; l'autre, plus importante cependant, ne s'en soucie pas.

La bataille contre la raison est perdue d'avance, réalisé-je.

Je rouvre les yeux. Devant moi se trouve une grande silhouette sombre enveloppée d'un long manteau noir qui traîne jusqu'au sol. La noirceur et la capuche dissimulent son visage, mais selon sa carrure, il s'agit d'un homme. Il est grand, bien plus que moi, mais je ne suis pas une référence. Une longue épée scintille dans sa main, interpelle mon regard apeuré, tandis qu'il approche d'un pas décidé, foule le sol comme si le monde lui appartenait. Entouré de longs filaments noirs qui agissent tel un étau morbide autour de son corps bien bâti, il me fixe sans ciller. Hypnotisée, je lui retourne son regard pendant quelques secondes.

Puis, sans que je ne puisse contrôler mes mouvements, je recule d'un pas. Et d'un autre. Sans me soucier du rebord du toit qui donne sur le vide, sur une chute possiblement mortelle de dix étages. Je n'ai pas le temps de ressentir cette peur qui devrait affecter chacun de mes membres, ternir mes autres émotions et encombrer mon esprit.

Car je fais un dernier pas.

Mon pied ne rencontre plus la résistance du sol. Le vide se trouve sous ma semelle. L'autre pied suit, comme s'il était aimanté. Quand je lève le regard, je vois deux paires d'yeux argentés qui me fixent, reluisant comme de l'acier.

Et je tombe.

Le vide m'accueille, comme si j'y étais prédestinée. C'est la chute, la longue descente interminable, qui semble durer des minutes entières. Même la partie rationnelle de mon cerveau sait que je ne suis pas censée tomber aussi longtemps. Quelque chose d'étrange se produit. Une chaleur se répand dans ma poitrine.

Et je me réveille en sursaut dans mon lit. Je me relève, en sueur. Complètement sous l'adrénaline, mes pupilles dilatées, mon cœur bondissant dans ma poitrine, je constate que le tout n'était qu'un rêve. Un putain de rêve. Mes mains tremblent. Je les frotte distraitement. J'inspire profondément, essayant de me calmer. Je pense à me rallonger, mais craignant de refaire le même cauchemar, je m'assois simplement dans mon lit.

Ombre Mortelle Tome 1 : Sacrifice [Sous contrat d'édition]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant