Une semaine s'était rapidement écoulée. Max m'avait recontacté peu de temps après notre discussion. Je ressentais bizarrement comme une sorte de liberté en moi. J'étais envahis d'un sentiment de soulagement car j'allais servir pour quelque chose d'important. Cela me plaisait. J'avais hâte de savoir ce que nous allions faire pour résister à l'Allemagne et à Hitler. Hâte d'en savoir plus sur un tas de chose, hâte d'être mise dans la confidence, d'être prise pour une personne adulte et importante. Mais par dessus ce sentiment d'enthousiasme il y avait aussi la peur. J'avais cette crainte de l'inconnue, la peur de mourir et encore pire que la mort, j'avais peur de décevoir ma famille qui ne comprendrait peut être pas cet engagement...
Il était tard, aux environs de vingt deux heures, et il faisait froid. Je commençais à greloter sur place malgré mon foulard. Je me frottais les mains activement en espérant créer un peu de chaleur. Mais j'attendais bien devant la porte d'entrée d'appartements dont Max m'avait enseigné l'adresse. La rue était sombre et étroite, à la limite de faire peur. Mais j'étais à l'heure, comme prévu. J'attendais là, seule.
- Ah ! Hélène, tu es là c'est parfait. Dépêche toi, entre. Me fit Max en apparaissant par surprise en ouvrant soudainement la porte. Victor, Jean, Margarette et Marcel sont à l'intérieur. On t'attendait.
Silencieuse et timide je suivis Max en me faisant toute petite. J'avais mal aux cuisses après avoir monté trois étages d'escaliers. Nous rentrâmes enfin dans un appartement. C'était un très grand salon assez chaleureux avec un grand tapis et une cheminée qui nous réchauffait agréablement, avec une petite cuisine, ainsi qu'une chambre avec un grand lit deux places. C'était un bel endroit. Un héritage du père de Margarette, décédé. En face de nous se trouvait les quatre camarades énoncés, assis autour d'une table. Ils me saluèrent tous avec de grands sourires. Ils avaient l'air sympathique.
- Salut Hélène ! Max nous a parlé de toi. Je suis Marcel. Je pense qu'il t'a expliqué avant de venir qui nous sommes. Des simples bons français qui survivent dans le froid, la faim, les privations de toutes sortes, la terreur que nous a infligée la guerre et l'alcool fort ! Non, plus sérieusement, nous sommes rentrés et nous sommes tous ici aujourd'hui réunis et c'est le principal.
Marcel Petit que l'on connaissait aussi sous le surnom de monsieur râleur était un continuel insatisfait, du genre ours mal léché, souvent grognon. Mais c'était un grand homme de 36 ans, responsable et d'une efficacité remarquable d'après Max. C'était d'ailleurs pour ça qu'il l'admirait. Pour lui, rien n'était jamais assez bien fait, un perfectionniste oui. Il râla donc sur tout le monde en disant que nous n'avions pas toute l'après midi pour regarder ce qu'il nous avait concocté et qu'il fallait donc vite s'installer. Max me montra une chaise peut confortable sur laquelle je m'assis sans broncher. Marcel sorti de sa mallette une dizaine de feuille et de photos qu'il étala sur toute la surface de la table pendant que nous autre nous l'observions, silencieux.
-C'est bon la porte est bien fermé ? Nous questionna t-il en ne relevant même pas les yeux de ses documents. Alors, je pense que vous le savez déjà mais nous ne sommes pas les seuls à se réunir ainsi en tant que résistance. Notre but est de récolté des informations que je communiquerais ensuite à des personnes plus importantes qui pourront agir en conséquence. Notre force alliée à la force de plusieurs petits groupes comme le notre propulsera la résistance française bien haut mes amis. Et donc, pour commencer, voici l'homme qui nous intéresse.
-Un enfant et un ado ? Demanda d'un air moqueur Margarette, en rigolant.
-Tu ne comprends rien, on fait d'abord connaissance avec le bébé nazi, explique Marcel imperturbable. Toute la personne réside dans l'enfance de l'homme adulte, dans l'éducation qu'il a reçu, dans sa psychologie, dans sa manière de voir le monde.
Il y avait deux photos. Celle d'un petit garçon blondinet tenant sa peluche. Mais la photo qu'il avait entre les doigts représentait un jeune homme légèrement plus âgé qu'une quinzaine d'année, je dirais aux alentours de dix sept ans. Il était blond, parfait en tout point. Un teint de pêche, un sourire étincelant, un visage ovale avec une mâchoire légèrement visible. Déjà viril, avec des traits ciselés. Un mannequin n'aurait pas mieux fait. Le garçon posait devant une grande demeure entourée de pommiers et de vigne derrière lui, à perte de vue.
J'étais pensive. Je ne voyais pas comment je pouvais connaître ce jeune homme mais il me disait quelque chose. Son visage m'était familier mais impossible de savoir pourquoi.
-Cette photo date de 1927. A présent... celle-ci... voila celle-là ! Elle date des régiments de l'année dernière ! Notre lieutenant Von Reinhardt dans toute sa splendeur.
Je n'avais même pas encore vu la photo que le fait d'entendre son nom me fit pousser un léger cri de sursaut. Marcel eut un sourire, comme si il n'était pas surpris. En réalité, il savait très bien que c'était le soldat qui logeait à la maison et cela l'arrangeait bien d'ailleurs.
-Donc je disais, voici à quoi il ressemble maintenant. C'est vrai qu'il a gardé sa gueule d'ange mais attention l'habit ne fait pas le moine.
-D'accord c'est bien beau tout ça mais c'est quoi son caractère ? Comment on va pouvoir l'approcher ? Demanda Victor.
-Hum, c'est justement là que tu vas être un atout majeur Hélène.
-Moi ?! Mais.. Mais j'ai dû lui parler deux fois !
-Oui toi, et ce n'est pas le moment de se dégonfler. Karl Von Reinhardt est, d'après ce que l'on m'a dit, très discret et peu remarqué. Il s'occupe de ses affaires en gros et ne fourre pas son nez n'importe où. Il est très apprécié par ses supérieurs et il est connu pour sa discrétion et son sérieux. Par contre, d'après un infiltré assez bien placé que nous avons, il semblerait très froid, peu naïf et difficilement influençable. Oui, je vous l'accorde, on ne s'attaque pas au plus docile. Cependant ! Et maintenant arrive le plus intéressant pour nous, comme tout homme normalement constitué, il y a une faille dans tout ça. Monsieur serait très dragueur et adorerait les femmes. Il a été aperçu plusieurs soirs d'affilés au cabaret Le Continentale. Donc si vous me suivez toujours, il va falloir qu'une d'entre vous deux, le séduise en espérant qu'il rentre dans votre jeu et arrive à lui soutirer des informations.
-Je pense qu'Hélène tu serais la mieux placé pour le faire sachant qu'il est chez toi. Après moi ça ne me dérange pas, je sais m'y faire avec les hommes coquins, puis si il aime coucher ça devrait être du gâteau.
Margarette était une femme de 27 ans qui aimait la vie et tous les plaisirs qu'elle procurait. Elle ne se cachait pas d'adorer le sexe et de profiter de sa beauté de jeune femme pour attirer les hommes dans son lit. Elle était superbe, de grands yeux marrons transperçants avec une longue chevelure brune. Elle paraissait sévère mais sous ses aires de femme pleine d'assurance se trouvait une jeune femme remplit de sentiment, une femme sensible.
-Cela ne me dérange pas non plus. Je lançai d'un ton à peut près assurée. Je veux bien le faire. Puis je suis sûre que Max m'a proposé pour ça, car j'étais celle qui vous fallait. Mais c'est d'accord, je ferais en sorte que Von Reinhardt tombe sous mon charme.
-Super mes jolies vous avez l'air enthousiastes mais ne vous battez pas non plus. Je sais qu'il donne envie mais il y a une difficulté dans tout ça. Le but n'est pas de coucher un soir avec lui et hop repartir. Cet homme, je vous le répète car vous n'avez pas l'air de saisir, est un homme qui a du flair. Il est loin d'être naïf et ne tombera pas facilement dans le piège. Il ne divulguera jamais rien à une fille d'un soir car il les collectionne. Votre mission va être assez longue sur la durée et elle va consister à vous faire désirer et arriver à qu'il veuille vous revoir et qu'il s'attache ! Ce qui est très rare chez lui car il se lasse très vite... Il va falloir véritablement le faire tomber amoureux de vous pour qu'il se confie à vous.
Le faire tomber amoureux...
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Un amour de guerre
RomanceSeptembre 1940, en France. Lors de l'occupation allemande. Hélène Lambert vit dans la grande maison de famille à la campagne, avec sa grand-mère. Les deux femmes sont alors rapidement contraintes à loger le lieutenant-chef SS Karl Von Reinhardt che...