Ce matin, à peine étais-je réveillée que je mourrais de faim. Je me dépêcha d'enfiler une robe et des sandales car il faisait beau aujourd'hui, le ciel était d'un bleu intense sans un seul petit nuage. J'ai croqué dans une énorme tartine de beurre et ma grand mère déposa un baiser sur mon front en me caressant les cheveux. Elle me demanda d'aller récupérer deux litres de lait en centre ville dont elle avait passé commande la veille. Ce que je fis. La route était pénible car les cailloux pointus venaient me faire mal au niveau de la voute plantaire. Quelle idée avais-je eu de vouloir porter des sandales toutes légères, au moindre rayon de soleil qui faisait son apparition. J'en payais les conséquences à présent. Cependant j'étais contente de les porter, cela me changeait de mes bottines à lacets habituelles. Il y avait du vent mais mon châle sur mes épaules me protégeait de la legère brise et j'adorais sentir mes cheveux vire-volter.
Sur le chemin du retour je croisa Max. Il me paressait pensif. Malgré ça il me proposa de l'aide pour tenir ces lourdes bouteilles de lait, ce qui me ravie car mes mains rouges commençaient à me faire souffrir. Il m'expliqua qu'il venait de faire un détour à la Kommandantur pour y déposer son fusil de chasse qu'il gardait depuis longtemps. Il avait un aire grave et parlait peu, ce qui n'était pas son habitude, surtout quand nous étions ensemble. Après quelques minutes de silence je le bouscula.
-Dit moi ce que tu as maintenant ! J'ai fais quelque chose de mal pour que tu en arrives presque à m'ignorer ? Dit-je en criant.
-Non pas du tout. Pourquoi tu dis ça?
-Je suis à côté de toi et tu fais comme si je n'étais pas la.
-C'est pas ça mais... le fait d'avoir donné mon fusil comme ça, puis j'ai appris des choses et tout se bouscule dans ma tête. Il faut que je te parle de quelques choses.
-Mais dit moi?
-La France est envahis par les allemands Hélène. Rien que ça, ça me fou le morale à zéro. Il y a eu l'appel du Général De Gaulle en Juin dernier et je ne sais pas pour toi, mais ce discours nous a, pour beaucoup, donné de l'espoir. Maintenant que nous sommes en France libre, les hommes partis à la guerre ne vont pas tarder à revenir dans les semaines prochaines. Personne ne le sait mais malgré mon infirmité et la distance j'ai continué à correspondre avec de nombreux soldats de notre région que je connais. J'échangeais assez souvent avec eux et eux aussi on encore de l'espoir malgré les atrocités qu'ils ont dû vivre. A leur retour, quand nous serons assez nombreux, nous allons mettre en place une résistance française dont nous parlons par messages codés depuis plusieurs mois. Nous sommes prêts à mettre en place Les Colombes Noires.
-Les Colombes Noires? Je ne comprends pas tout Max... Dis-je un peu perdue et déboussolée par ces nouvelles.
-Dit moi? Que ne comprends-tu pas? Les Colombes Noires c'est le nom de notre groupe, le nom de notre alliance, de notre résistance. Beaucoup d'autres, dans le secret, vont mettre en place ce que nous allons faire. Pour l'instant, de ceux que je connais, nous sommes cinq. Mon ami Marcel Petit qui va bientôt revenir du Nord, il y a aussi des connaissances, Victor Humford et Jean Durand. Pour finir Margarette Dambu a fait le choix de nous rejoindre. C'est une jeune femme de notre village. Je t'en parle à toi aujourd'hui car tu m'avais déjà parlé de vouloir défendre la France et je sais à quelle point tu es courageuse Hélène.
-Oui mais c'est quand même beaucoup de responsabilités...
-Je sais bien et je ne t'oblige à rien. Mais il y a déjà des réseaux de résistance en place dont personne ne soupçonne l'existence. Avec l'arrivée des hommes le nombre de volontaires va se multiplier et on sera un plus grand nombre. On peut y arriver Hélène. Et si tu choisis de me rejoindre, tu feras partie des futurs vainqueurs, je te l'assure. Mais il faut que tu saches les dangers que cela représente et la possibilité que tu donnes ta vie pour cette cause, même si rien que d'y penser je me maudis de t'en avoir parlé...
-Non ne dit pas ça Max. Tu as bien fait et je vous rejoins.
Je ne compris pas mais Max rigola nerveusement à ma réponse.
-Ma petite Hélène, tu ne te rends vraiment pas compte de la gravité des choses. Tu ne peux pas me donner ta réponse aussi rapidement. Il faut que tu y réfléchisse et on en reparlera dans quelques jours. On a la chance d'avoir encore un peu de temps.
-Je te dis que c'est bon ! Si j'avais su plus tôt l'existence de cette résistance je l'aurais rejoins avant même que tu m'en parles. Si j'avais pû, je serais parti me battre sur le front. Je sais les risques que cela représente mais je serais prudente.
Max sourit en me regardant intensivement. Ses yeux se mirent à briller et il me prit dans ses bras. Pendant de longues minutes nous restâmes ainsi, sans bruit, dans les bras l'un de l'autre.
-Je savais que tu nous rejoindrais Hélène, mais je m'en voudrais toute ma misérable vie si tu perdais la tienne.
-Ne t'en fait pas, ma mère me protège de là haut. Lui dis-je en l'embrassant sur la joue. Mais en y repensant, j'ai surpris une discussion du soldat que je loge avec quelqu'un du commissariat qui parlait d'une mission C.N., et si ils parlaient des Colombes Noires?
-Oui c'est fort probable, ça ne m'étonne même pas. On m'a dit que notre nom avait résonné dans quelques oreilles mais c'est impossible qu'ils en sachent plus sur nous. Fait attention à toi, le soldat Von Reinhardt est une personne importante et dangereuse. Mais je te parlerais de tout cela une autre fois et dans un endroit plus approprié. Pour l'instant ne te prends pas la tête, je reviendrais vers toi quand ce sera le moment. A plus tard Hélène.
Je récupérai les bouteilles de lait que Max tenait et reparti en direction de la maison. Beaucoup de questions se bousculaient dans ma tête. En arrivant enfin à la maison, je vis justement le soldat,en train de fumer une cigarette devant l'entrée. Il regardait ses bottes craquer sur le gravier. Le bruit de mon arrivée le fit se redresser et il me regarda, surpris.
- Mademoiselle Lambert.
- Monsieur. Le saluai-je en le dépassant.
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Un amour de guerre
Storie d'amoreSeptembre 1940, en France. Lors de l'occupation allemande. Hélène Lambert vit dans la grande maison de famille à la campagne, avec sa grand-mère. Les deux femmes sont alors rapidement contraintes à loger le lieutenant-chef SS Karl Von Reinhardt che...