Ann-Marie tapa deux fois sur le réveil alarme. Sa désagréable cacophonie venait de la tirer, ce matin encore, de son paisible sommeil. Il n'y avait qu'un bruit aussi dérangeant que celui-ci pour l'ôter des bras de Morphée à une heure pareille, en un samedi matin... Mais aussi...
__ Oh, mince !
Elle bondit du lit, chaussa ses pantoufles et se rendit à la salle de bain. Elle écarta le miroir vers la gauche révélant un petit cabinet où étaient entreposés les produits de toilette, prit sa dentifrice et sa brosse à dents avant de rabattre la glace. Un geste qu'elle regretta presque à la vue de la colossale abomination qu'était son visage. Ses longues boucles crépues étouffées par son oreiller durant la nuit avaient un aspect de moquette pas lavée et ses yeux se perdaient sous la boursouflure de ses paupières récemment ouvertes. Elle se trouvait hideuse.
Elle s'empressa de faire un brin de toilette pour arranger ensuite son visage du mieux qu'elle le pouvait. Ses cheveux à présent hydratés reprenaient leur sublime texture. Elle en fit une simple natte dont elle protégea l'extrémité d'une élastique noire. Se jugeant assez présentable, elle se rendit à la chambre de son fils. Celui-ci déjà réveillé se jeta dans ses bras.
__ Joyeux anniversaire, mon poussin !
Ann-Marie lui tendit un petit emballage avec des motifs des Avengers duquel pendait une étiquette avec inscrit dessus : "Pour mon Patrick adoré." L'enfant accueillit son présent, euphorique en se laissant bichonner par sa mère.
__ On mange quoi au petit-déj ?
__ C'est toi qui choisis, mon grand.
__ Des céréales ! Lança victorieusement le môme en traînant sa mère après lui.
En un rien de temps le duo était attablé, chacun son bol en porcelaine garni devant lui.
__ Tu m'emmenèras faire des photos ?
__ Comme promis, le rassura Ann-Marie.
__ On ira chez Nicolas ?
__ Comme toujours ! Confirma-t-elle, un sourire distrait lui coupant le visage.
*
Ils avaient atteint le studio après vingt minutes de route. Ann-Marie gara son antiquité à l'entrée du notable quoique délicat atelier. Elle prit son sac en bandoulière et sa boisson fumante qu'elle avait achetée à un café près de chez elle, puis descendit. Une porte vitrée avait, gravé dessus, le nom du photographe propriétaire. Une symbolique effigie de celui-ci se trouvait au devant du bâtiment dont les murs étaient couverts de mosaïques multicolores.
La jeune mère poussa la porte. Deux femmes légèrement vêtues patientaient sur des canapés poufs en cuir brun. Ann-Marie opta pour un fauteuil plus traditionnel dans lequel elle s'installa avec son fils. Elle jeta un coup d'œil à sa montre pile au moment où les cinquante neuf minutes de sept heures cédèrent aux zéros de huit heures.
"Juste à temps."
Lorsqu'elle releva la tête, il était déjà venu la chercher. Ça devait être lui Nicolas. Le portrait à l'entrée de l'immeuble était une représentation tellement peu flatteuse !
Ann-Marie se leva de son siège. Il était grand, le photographe ! Il devait probablement faire dans les un mètre quatre-vingt cinq. Elle étendit la tête. Il avait les iris bruns clairs et les paupières surmontées d'une rangée de longs cils ; plutôt particulier pour un type à la peau noire. Ses épais sourcils arqués étaient presqu'en continuité avec le pont menant à son nez discrètement épaté. Une délicate moustache dissimulait un sourire prenant naissance de deux lèvres moelleuses qui devaient être succulentes. Il avait une toute petite barbe taillée sur la mesure de son menton.
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Je Tuerais Pour Toi
Romantik"Que vas-tu faire ? Le tuer ?" "Si tel est ton désir." Entre eux, c'était censé être éphémère, c'était censé durer qu'un court instant. Mais entre eux, cela s'est prolongé sur de nombreux jours, les jours se sont changés en mois, ceux-ci auraient pu...