LE DÉCLIC

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Dans le bus, je me remémore toute mon histoire avec Morgan et là j'ai le déclic. 
Cette fois c'est lui qui m'avait dit de partir, donc je me suis dit que c'était le moment, le moment de tout arrêter maintenant. A cet instant, dans le bus, malgré toute la peur et son emprise, je sais que je ne retournerai plus jamais avec cet homme.

J'appréhendais beaucoup la réaction de ma famille en me voyant revenir car à force de me voir retourner à chaque fois dans cette situation, les liens étaient sensibles entre nous.
Je décide donc de me rendre d'abord chez une cousine. Elle me reçoit et me voit dans un état lamentable, je fonds en larmes et lui explique tout. Je lui fais aussi part du fait que ma mère ne sait pas encore que je suis là. Elle prend l'initiative de la contacter et lui explique avec douceur et tact les faits. Ma mère demande immédiatement à me parler et me dit de venir chez elle tout de suite.

" Maïlyss me dira par la suite que pendant ce temps son père me cherchait partout aux alentours du logement de sa mère et qu'il est même allé voir si j'avais été au commissariat."

Une fois chez ma mère je lui explique et lui promets que cette fois c'est la dernière. Le soir mon frère rentre du travail et me voit, il n'est pas content et me fait comprendre que je ne suis pas la bienvenue. Ma mère a tellement souffert de mes allers-retours que mes proches m'en veulent.
Le lendemain, une de mes amies d'enfance me propose de venir dormir chez elle afin de me changer les idées et que je ne sois pas chez ma mère si Morgan vient. J'accepte son invitation.
Je préviens donc ma mère et m'en vais. Il est minuit, alors que mon amie et moi sommes en bas de son immeuble pour discuter de ma situation, je vois une grande silhouette s'approcher en courant, je prends peur immédiatement car il faisait nuit, je ne voyais pas bien mais je pensais que c'était Morgan.
C'était mon petit qui venait m'annoncer que la mère de Morgan venait de ramener mon fils chez ma mère. A ce moment-là, je ne pense plus à rien, je prends la main de mon amie et court jusqu'à chez ma mère. En arrivant, je vois mon fils dans les bras de mon beau-père, je craque et le serre contre moi. Ma mère m'explique alors que la mère de Morgan est venue ramener mon fils sans dire un mot puis est repartie. Je lui demande donc où sont les affaires de mon fils et ma mère me dit qu'elle n'a rien laisser. Mon fils a seulement 5 mois et il va lui falloir son biberon. Je décide que je l'allaiterai cette nuit-là et ma mère avait chez elle les couches de mon neveu.
Je suis dans la chambre avec mon amie et je m'apprête à changer mon fils. En retirant son body, je trouve une lettre pliée en 8.

" Tracy
Je te rends le petit et si tu as besoin de
quelque chose pour lui
appelle-moi. J'ai gardé les filles car
elles m'ont dit qu'elles
ne veulent pas être avec toi. Je ne ferai
rien pour que tu reviennes cette fois.
Morgan."

Je ne crois pas une seule seconde ce qu'il dit concernant mes filles. Pendant ce temps ma mère était au téléphone avec une de mes sœurs pour les prévenir de ce qu'il venait de se passer. Je la coupe dans sa discussion et lui montre la lettre que j'ai découvert.
En vue de la situation, j'explique à mon amie que finalement je ne dormirais pas chez elle. Elle comprend et s'en va.
Le lendemain, en début d'après-midi, je vois mes deux sœurs arrivées chez ma mère et me disent de me préparer car nous allons chercher mes filles immédiatement. Je suis en panique, je tremble, j'ai mal au ventre, je me décompose. Non pas parce que j'allais retrouver mes filles mais parce que j'avais peur de ce qui allait se passer là-bas. Mon petit frère, qui n'était pas ravi que je sois revenu, décide de venir avec nous et de prendre quelques précautions si jamais ça dégénère.
En descendant, avec une de mes sœurs nous entendons mon autre sœur crier et elle a l'air de s'embrouiller avec quelqu'un. En effet, il s'agit de Morgan, il est là dans le parking juste derrière, il ne me voit pas car je suis de l'autre côté. Ma sœur lui explique alors qu'il est horrible et que nous sommes sur le point d'aller chercher mes filles. Morgan lui sourit et s'en va.
Nous prenons donc la route direction le domicile du compagnon de sa mère, où se trouvent mes filles. Une fois arrivés, je suis plus tranquille car je sais maintenant que Morgan n'est pas là. Ma sœur sonne à la porte et réclame mes filles à sa mère. Elle refuse et dis que sans la présence de Morgan elle ne peut pas faire ça. Ma sœur, agent de police, lui dit de manière agressive de nous rendre les filles et lui fait croire que ses collègues policiers sont en bas.
Paniquée, elle va chercher mes filles et toutes leurs affaires qui sortent de l'appartement complètement apeurée. Ma sœur les évacue et pendant ce temps le ton monte entre la mère de Morgan et mon autre sœur. Avant de partir, je demande à la mère de Morgan d'aller chercher une pochette que j'avais préalablement pris soin de cacher sous le matelas. Cette pochette contenait le livret de famille et les actes de naissance de mes enfants.
Nous quittons enfin les lieux avec mes filles. Dans la voiture, mes proches rassurent mes filles et leur dit que cette fois c'est vraiment fini. Je vois dans leur regard qu'elles sont soulagées.
Nous reprenons petit à petit goût à la vie, mes enfants sourient, jouent sans crainte. Les jours passent je suis tellement sûre que c'est vraiment la fin, que je prends la décision pour la première fois de faire officiellement mon changement d'adresse et toutes les démarches nécessaires.
Quelques jours après, ma sœur me dit qu'il faut qu'on aille au commissariat pour porter plainte pour toutes les violences qu'on a subi. Mes filles et mes sœurs sont présentent. Ma sœur qui est agent de police rentre avec moi dans le bureau afin de m'aider à tout expliquer car j'étais encore sous le choc. Mes filles et moi devrons nous rendre à l'hôpital dans un service spécialisé pour faire évaluer notre corps suite aux violences. Les médecins constatent des traces sur chacune de nous. Ils me donnent ensuite un rapport médical que je devrais remettre au commissariat.
Pendant plusieurs mois, Morgan me menaçait sur Facebook. Ma famille me disait de ne pas répondre et de ne pas en tenir compte. Mes filles sont inscrites dans mon école d'enfance. Le matin, quand je les ramenais à l'école j'avais tellement peur de croiser Morgan que parfois je demandais à mon frère de les amener à ma place.
Un soir alors que nous sommes tous chez ma mère, mon frère rentre du travail très en colère et explique à ma mère que la propriétaire de l'appartement près de Saint-Etienne l'a contacté pour se plaindre de moi. Elle lui dit que j'ai détruit son appartement et que les voisins l'ont prévenu. Elle demande que je lui renvoie ses clés que je la rembourse car elle compte porter plainte. Je la rappelle et lui explique la situation. Au début, elle m'insulte et ne veut rien savoir. Elle finit par se calmer et je comprends que Morgan avait saccagé l'appartement et avait brûlé des choses dans le salon. Je lui explique de c'est Morgan qui a les clés. Morgan avait donc donné le numéro de mon frère à la propriétaire afin de se dédouaner de la situation.
Les mois passent et je suis toujours en phase de reconstruction chez ma mère. Je fais la rencontre de Jacob, il me redonne tout de suite confiance en moi et malgré ma méfiance totale des hommes, je lui laisse sa chance. Notre idylle prend doucement forme.
Au bout de 7 mois, je trouve un logement situé dans le Loiret à 35 minutes de chez l'une de mes sœurs. Je reprends donc ma vie paisiblement et ne craint pas que Morgan nous retrouve ici. Mes enfants sont épanouis, rigolent, ne craignent plus de se faire frapper.
Cette sensation de ne plus se réveiller la boule au ventre, est la meilleure sensation de ma vie après la naissance de mes enfants.

8 ans d'emprise Où les histoires vivent. Découvrez maintenant