Chapitre 9

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Je voudrais dédier ce chapitre à DrakeChainsaw cleo_autrice et TempsANouveau qui me lisent depuis le début et qui continuent de le faire dès qu'un nouveau chapitre est publié. Merci à vous, ça signifie beaucoup pour moi que vous soyez toujours au rendez-vous.



Le samedi est enfin là ! Je vais pouvoir souffler un peu de cette première semaine de cours. Maman et papa nous laissent toujours dormir autant qu'on le souhaite le week-end. On a de la chance, parce que pleins de jeunes sont tirés de leur sommeil bien avant d'avoir fini leur nuit. Mais nos parents partent du principe qu'il nous faut récupérer autant que faire se peut. A part lorsqu'on a des choses de prévues tous ensemble, ils nous laissent organiser nos jours de repos comme bon nous semble. Et ça, c'est juste génial.
Il est donc dix heures passées quand je m'extirpe de sous mes draps. Ma première pensée se tourne alors vers les écuries où je vais pouvoir passer le reste de la journée.

— Papa ? Maman ? dis-je une fois mon petit-déjeuner englouti. Qui peut m'emmener au centre équestre ?

Papa lève les yeux de son journal puis lance un regard à maman, pendant que j'attends que l'un  des deux se décide.

— Je vais t'accompagner, me répond mon père.
— Et je viendrai te chercher, embraye ma mère.
— Super ! Merci ! Je vais me préparer, j'en ai pas pour longtemps.

Une fois mes habits passés, et mon sac prêt, je fais signe à mon père.
Le trajet en voiture se fait dans le silence. Ce n'est pas un silence pesant, mais plutôt notre façon d'être. Mon père n'est pas un grand bavard et je ne facilite pas les choses depuis la mort de Margot. Mes parents ont comme peur de dire un mot de travers qui me ferait éclater en sanglot. Il ne faudrait surtout pas augmenter la fréquence des séances chez le psy ! Ça signifierait une régression dans mon deuil.

A peine mon père se gare-t-il sur le parking que je saute hors de la voiture, attrape toutes mes affaires dans le coffre et me rue vers mon échappatoire.

— A ce soir, 'Pa ! je lance sans me retourner.

J'entends mon père marmonner un au revoir et faire marche arrière tandis que je m'en vais de l'avant. Pour l'instant, seuls quelques propriétaires de chevaux sont présents. Les autres arriveront bien plus tard, d'abord pour aider puis pour monter. Au milieu des filles qui pansent leur destrier, je remarque rapidement Maher, qui détonne dans cet environnement presque exclusivement féminin. Il est comme un cheveu au milieu de la soupe, un peu à l'écart des autres. Il a l'air perdu dans ses pensées, si bien que lorsque je m'approche après avoir rassemblé mon courage à deux mains, il sursaute.
— Désolée, je ne voulais pas te faire peur.

Mes joues sont toutes rouges. Je sens mon courage s'évaporer.

— C'est rien ! dit-il avant de marquer une courte pause. Ça s'est bien passé la rentrée ?
— Euh, oui. Bien contente d'être en week-end. Et toi ?
— Ma foi, rien de bien passionnant.

Faute de savoir comment entretenir la discussion, je me rapproche de son cheval et me met à lui caresser distraitement l'encolure, quand la voix de Maher me tire de mon état dissociatif.

— Linda ?

Quand je tourne mon regard vers lui, je me doute que ce n'est pas la première fois qu'il m'appelle.

— Excuse-moi, dis-je en me raclant la gorge. Tu disais ?
— Je dois monter mon armoire dans la sellerie des propriétaires, tu penses que tu pourrais aider quand t'auras un moment ?
— Oh, c'est ton cheval ? J'avais pas percuté.
— Oui, c'est Dustin. J'avais pas prévu d'acheter un cheval mais il était destiné à l'abattoir et mes parents me l'ont offert.
— C'est génial ! Hein, Dustin, dis-je en me retournant vers l'étalon. Tu vas pouvoir continuer à vivre. Pour l'armoire, compte sur moi, Maher. Je dois juste aller retirer les cordes des ballots de foin  et faire le tour des paddocks pour aider Patricia. Et après je suis toute à toi.

Je tourne les talons en sentant les rougeurs faire leur retour sur mes joues, mais je suis contente de moi : j'ai réussi à discuter avec un quasi inconnu sans me ridiculiser. Je me sens même excitée à l'idée de passer du temps avec lui. Après tout, Pierre a sûrement raison. Il faut que je donne une chance à au moins une personne ; une personne qui évolue hors de ce cercle fermé qu'est mon lycée.

Quarante-cinq minutes plus tard, essoufflée et transpirante, je dépose enfin les derniers filets  en plastique derrière le hangar. Maher, lui, longe Dustin dans le pré. Lorsqu'il me remarque, il me fait un signe de main. Je le rejoins et l'observe travailler son cheval avec une douceur que certains n'ont pas.

— Ça fait longtemps que tu montes ? me demande-t-il sans quitter Dustin des yeux.
— Oh oui. Ça fait un sacré bout de temps maintenant. Et toi ?
— Depuis gamin. Mon père était lui-même cavalier. Tes parents montent eux aussi ?
— Absolument pas.

Je me surprends à rire de bon coeur rien qu'en imaginant mon père ou ma mère sur une selle.

— C'est si drôle que ça ? demande Maher.
— Pardon, mais si tu voyais mes parents tu comprendrais à quel point l'image est marrante. Je crois qu'ils ne sauraient même pas mettre une bombe dans le bon sens.

Maher se joint à mon fou rire, sous les regards perplexes des autres, pour qui, malgré les années à fréquenter le club, je reste « la fille timide » qui aide parfois Patricia pendant les vacances. Très peu ont réussi à discuter avec moi, et je pense que certaines sont un poil jalouses de nous voir ainsi, Maher et moi, en train de sympathiser. Il faut dire que si je n'étais pas lesbienne, il aurait pu retenir mon attention, pas qu'il soit un Adonis, mais parce que son visage a ce petit quelque chose de plus, un charme qui vaut tous les traits parfaits du monde.

Nos larmes sous la mer [GxG] ~ [[SOUS CONTRAT D'ÉDITION NISHA ETC]]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant