18 Avril 3322 // 13h45
Le lendemainL'aile de traitement des eaux était un point vital du Refuge. La détermination était le trait de caractère indispensable de Salomon Wall, la raison principale pour laquelle il avait voulu reprendre les travaux de ses parents décédés des années auparavant. Quand vous possédiez cette qualité, deux choix s'offraient à vous : œuvrer pour le maintien des réseaux fluidifiant et des filtres d'eau pour le bien de la communauté, ou bien l'utiliser ailleurs et gaspiller votre énergie. Bien évidemment, l'équipe de traitement était composé de personnalités prête à sacrifier leur temps de sommeil et leur énergie musculaire pour le bien de tous. Ils étaient chacun et chacune déterminé à tout entretenir.
Salomon Wall était le plus expérimenté et le dirigeant de cette aile du Refuge ; durant la décennie écoulée, il travailla sans relâche ce qui lui a valu la reconnaissance de beaucoup de monde. Un vrai leader dans l'âme. Malheureusement, son plus gros traumatisme lui ôta son sourire bien trop tôt : le décès de ses parents suite à une intoxication des eaux. Salomon ne se tracassait pas avec d'innombrables questions pendant son travail car seuls de bons résultats comptaient, rien d'autre. Mais il suffisait d'une seconde de distraction pour que le souvenir de sa famille ne lui revienne et le plonge dans un abysse destructeur. C'est pour cela qu'il avait également une solution, humainement incorrecte, mais il s'en fichait : Salomon prenait beaucoup de cachets, il lui arrivait parfois d'en soutirer après avoir insisté pendant de longs quart d'heure auprès du docteur Jacen, et ce à quoi elle ne pouvait pas résister, alors elle falsifiait certaines ordonnances médicales. Les deux étaient dans l'illégalité.Et tant qu'il n'était pas pris sur le coup, il continuerai.
—Pause ! Annonça Salomon.
L'équipe s'arrêta instantanément, soupirant et transpirant dans ce dédale de tuyaux et de machines en marche constante. Ils étaient là depuis 4h du matin. Il est actuellement 13h50.
—J'ai l'impression que mes muscles sont sur le point de me quitter.
— Tu nous sors la même chose depuis 3 ans Frank.
Frank est un travailleur au sein d'une équipe de 150 personne, et un ami proche de Salomon.
—Et toi tu me dois un verre au bar après avoir perdu ton pari!
—Le pari du purificateur? Sérieusement?
—Tu as joué. Tu as perdu. Je veux mon verre.
Salomon se frotta rapidement le front, puis rangea ses outils dans sa ceinture de technicien.
—J'ai perdu c'est vrai. Mais la prochaine, on verra bien. Je suis sur que cette fois, le purificateur d'eau ne plantera pas!
—Si tu le dis.
—C'est pas contre toi Frank, mais je dois réceptionner le fils d'Harold dans quelques minutes alors je ferai bien de me hâter.
—Explique.
—Il a enfreint le règlement et Ramirez l'a affecté ici pendant une semaine.
—Pauvre gamin. Je suis étonné que son père ai approuvé.
Frank vit que Salomon esquissait un sourire.
—Harold est le dirigeant et il sait quoi faire, crois moi.
Après un bref échange, les deux amis se saluèrent.Salomon se dirigeait vers l'entrée de l'aile de traitement. Il passait à côté de ces stations blanches à dynamos et micro stations hydroélectriques qui permettent de maintenir les machines d'assainissement, puis il se frayait un chemin au travers des ces immenses tuyaux qui transperçaient le sol jusqu'au plafond. Quelques gouttes lui tombèrent dessus mais il fit mine de ne pas s'en rendre compte. Il ne pouvait pas s'empêcher de vérifier l'état des machines, il passait son index droit pour vérifier la poussière, puis il demandait à l'intelligence artificielle du Refuge de superviser les tâches pendant qu'il s'éclipsait et que son équipe se reposait.
—Te voilà !
Garreth était adossé contre la vitre du bureau situé à l'entrée du département des eaux. Un bureau qui devrait être occupé par Salomon mais il préférait être sur le terrain plutôt que de se noyer dans la paperasse.
—Je ne suis pas en retard ?
Salomon vérifia l'heure sur son pad tactile accroché à son poignet gauche : 14h01.
—D'une minute. Je devrais faire un rapport au sergent.
Garreth se pétrifia.
—Vraiment?
—Mais non, je plaisante gamin! Ramirez me tuerai si je lui faisais un rapport aussi puéril.
—Merci.
—Bon, comme je n'ai pas beaucoup de temps devant moi, je vais vite te briefer. Ta semaine ne sera pas si compliqué que ça.
—Je suis à l'écoute.
Le dirigeant de l'aile de traitement n'allait pas confier une tâche complexe à Garreth qui allait bientôt avoir 8 ans. Il voulait uniquement lui rappeler la règle fondamentale du Refuge : la paix. Mais sans discernement, elle peut être aisément brisée. Et les sanctions peuvent être délicates, voire irréversible.
C'était le moment de confier la mission au petit.
—Ta semaine consistera à surveiller les allers et venus, à nettoyer mon bureau et à trier les derniers messages sur mon pad holographique.
Garreth était soulagé de ne pas être déployé sous la tuyauterie et la fumée constante provoquée par les pistons et les perceuses des travailleurs, réparant et remplaçant les pièces détériorées.
—D'accord. Merci.
—Ne me remercie pas encore. Je suis à peu près certain que tu vas vite regretter ton comportement.
Garreth resta silencieux.
—Bon! Je dois y retourner. Le devoir m'appelle. Si jamais tu as le moindre problème, contacte moi via les communications du pad.
—Compris.
Salomon s'en alla aussitôt, laissant Garreth face au bureau. Il était temps de commencer le travail.
Le jeune garçon pénétra dans l'enceinte de la pièce et s'installa rapidement sur la chaise de bureau grisâtre. Grâce à son bracelet Navpad, il avait une accréditation importante car il était le fils du dirigeant. Son père le lui avait permis, par simple mesure de sécurité. En quelques secondes, un défilé de rayons s'entrecroisait pour former un écran flottant bleuté affichant diverses instructions. Garreth soupira tout en faisant défiler les paragraphes d'informations vers sa gauche. Il avait vu son père le faire un milliers de fois.
Il cliqua sur le dossier messagerie puis commença le tri.* * *
Bureau du commandant-dirigeant du Refuge
Au même moment,<< Rapport de Commandant: Harold Anderson.
Date: 18 Avril 3322, 14h21
Entrée personnelle numéro 271>>Selina.
Voilà quelques temps que tu es partie. Tu ne t'attendais probablement pas à recevoir de mes nouvelles. Enfin. Tu es morte.
Je ne sais même pas pourquoi j'écris cela.
Tu es la seule personne à qui je peux m'adresser en toute confiance, même si tu n'es plus là. Mes dossiers sont cryptés alors je peux m'exprimer librement. Je t'avais dit que je ne serais pas moralisateur et malheureusement, j'ai échoué. Je m'en excuse. Ça me dévore de l'intérieur depuis que je sais réellement ce qui me motive. J'ai le sentiment que nous les avons abandonnés. Tous. Et que nous ne pourrons pas les sauver. J'ai l'impression que notre mission est un échec. Les résidents se doute de quelque chose. J'ai surpris plusieurs conversations qui pointaient notre psychose vis à vis de l'extérieur. Les gens veulent sortir. Veulent voir le monde. Mais nous savons que c'est une mauvaise idée car ce serait notre deuxième perte. Hélas, nous ne pourrons plus rester cachés très longtemps. Le gouvernement Terrien et celui de Thyeste pourrait nous localiser et semer le chaos. Je suis désolé. Je pensais trouver des réponses en t'écrivant mais tout me rappelle que sans toi, j'ai du mal.
En ce qui concerne notre fils, il ne peut pas s'intégrer pleinement. Il est mon fils, « le privilégié » comme on le surnomme. Après une discussion avec l'enseignant Harper, j'ai su qu'il était distant, froid, parfois impulsif. Mais rien de bien anormal. C'est plutôt un comportement révélant une normalité plutôt qu'une défaillance. Je veillerai sur lui. A son évolution.Et je devrai un jour lui révéler les vrais causes de ton décès. Mais pour l'instant, je ne peux pas. Je n'y arrive pas. Il est trop jeune.
Je suis encore désolé pour mon attitude et mes faiblesses émotionnelles.
En espérant te revoir de l'autre côté.
Je t'aime.
Harold.\\ Fin de transmission >>
<\ Retour >>
VOUS LISEZ
Lysandre - Une épopée post-apocalyptique
Science FictionPlanète en proie au désespoir, Lysandre est désormais poussière ne laissant que des ruines arpenter son sol. La consommation de masse dévora nos contrées. Les pénuries furent une épreuve difficilement surmontable. La colère engendra des émeutes meu...