Prologue

15 2 0
                                    

Noah

On dit que chaque minute, chaque seconde qu'on a la chance de vivre est quelque chose de précieux. On doit profiter de la vie, des petits bonheurs qu'elle nous offre et des personnes qui nous entourent avant qu'il ne soit trop tard, avant que ces moments si précieux ne disparaissent à tout jamais. C'est une des merveilleuses choses que j'ai comprise grâce à Emily.



Emily

Nice, PACA, France

Une semaine plus tôt

–Ma chérie ? Est-ce que toutes tes affaires sont prêtes ?

De légers bruits de pas se sont fait entendre dans le couloir avant que ma mère ne fasse irruption dans ma chambre.

–Maman, sérieusement ? Cela fait trois fois que tu me demandes depuis ce matin. Puis de toute façon que veux-tu que j'oublie ? On part avec tout ce qui se trouve dans cette maison.

Elle m'a regardé et elle a croisé les bras sur sa poitrine. Ma mère s'est faufilée entre les cartons qui occupaient la plupart de la place de cette chambre, qui était il y a encore quelques jours la mienne. Elle s'est arrêtée en face de moi. Une mèche blonde s'est échappée de sa queue-de-cheval et c'est d'un geste agile qu'elle s'est dépêchée de la remettre en place derrière son oreille.

–Je le sais bien. C'est juste que je suis un peu stressée, a-t-elle dit en posant ses mains sur mes épaules.

–Tout va bien se passer maman. Ce n'est pas comme si c'était la première fois qu'on le faisait.

Elle m'a souri et elle a posé ses mains sur mes épaules avant de m'attirer contre elle. J'ai lâché un petit sourire et j'ai finalement enroulé mes bras autour d'elle pour répondre à son étreinte. Après quelques secondes voire quelques minutes - je ne sais pas trop - elle s'est détachée de moi et elle m'a tourné le dos. Elle a attrapé un carton en face de la porte.

-Bon ce n'est pas tout mais ce déménagement ne va pas se faire tout seul. Je vais appeler ton père et tes frères pour venir t'aider à débarrasser tout ça.

J'ai souri et j'ai à mon tour pris un carton.

–Richard, Aaron, Jason ! Venez nous aider.

–Maman...

Des éclats de rire sont fait entendre au rez-de-chaussée. Les voix se sont approchées lentement jusque dans la pièce où je me trouvais avec ma mère.

–Notre princesse a besoin d'aide ? a demandé la voix dure de mon père.

–Exact, la princesse a besoin de ses preux chevaliers car sa mère s'est transformée en méchante reine et interdit à cette belle jeune fille de porter ses cartons jusqu'en bas sans votre aide.

J'ai jeté un coup d'œil à ma mère alors que mes frères et mon père se sont mis à rire. Ma mère m'a adressé un regard qui se voulait interrogateur.

–Est-ce que c'est de moi dont tu parles en tant que méchante reine ?

–À toi de voir ce que tu en penses, ais-je dit en levant yeux au ciel.

Cette réponse n'a eu que pour conséquence de faire redoubler les rires des garçons de ma famille. Ma mère a tenté de dissimuler un petit sourire sous son regard strict qu'elle ne maîtrise qu'à moitié.

–Allez oust ! Dépêchez-vous. Notre avion part dans trois heures.

*

Le vacarme de l'aéroport s'est interrompu quelques instants afin de laisser une voix aiguë annoncer : Votre attention s'il vous plaît, les passagers du vol en destination de Santa Monica sont priés de se rendre aux portes d'embarquement. Merci. Je traînais derrière moi l'énorme valise composée de tout ce dont j'avais besoin avant que le reste de nos affaires n'arrive à la maison. Mes parents et mes frères étaient devant moi. J'étais à la traîne, pour ne pas changer. Je pianotais quelques messages d'au revoir à mes amis que je laissais ici, en France. Ils allaient me manquer. Une larme a roulé le long de ma joue et a fini sa course sur l'écran de mon smartphone. J'ai essuyé la traînée d'eau que la larme avait laissé sur mon visage d'un revers de main. Mes doigts se déplaçaient à une vitesse impressionnante sur le clavier tactile de mon téléphone quand soudain, je suis rentrée dans quelqu'un. J'ai levé les yeux pour voir à quel genre de personne j'allais devoir présenter mes excuses. Je me suis vite rendue compte que je n'allais pas en avoir besoin. La surprise me fit lâcher la poignée de ma valise et je me suis jetée dans les bras de ma meilleure amie.

–Lauren ! Mais qu'est-ce que tu fais là ?

Un grand sourire a illuminé son visage.

–Je n'ai même pas le droit de te dire au revoir maintenant ?

–Bien sûr que si ! Maman, pourquoi ne m'a- tu rien dit ?

Je me suis tournée vers ma mère qui m'a adressé un sourire attendrissant avant de pointer mes frères du doigt.

–Pour une fois, je n'y suis pour rien. Ce sont tes frères qui t'ont organisé cette surprise.

J'ai couru et me suis jetée dans leurs bras. Je les ai embrassés sur la joue tour à tour.

–Merci pour tout. Je vous aime plus fort que tout. Plus fort que Roméo aime Juliette. Plus fort que l'infini.

Quand j'étais petite, lors de mon anniversaire, quand Aaron et Jason m'avaient offert la poupée que je rêvais d'avoir alors ils y avaient mis toutes leurs économies, je les ai remerciés avec cette phrase quelque peu improvisée devant le choc que je venais de subir à l'ouverture de ce cadeau que je ne pensais jamais recevoir. Depuis c'est resté, ça les fait rire.

« Les derniers passagers pour le vol en destination de Santa Monica sont attendus aux portes d'embarquement. »

–Bon, il me semble que c'est ici que je dois te laisser, m'a annoncé Lauren les yeux recouverts d'un voile de larmes. Tu m'enverras des messages et tu m'appelleras ?

J'ai hoché la tête en signe d'affirmation. Or je savais que tout cela était faux. La séparation et surtout le futur serait plus dur pour moi que pour elle. Mais elle ne le savait pas encore, et elle ne le saurait peut-être jamais.

–Tu me le promets ?

–Oui, ai-je affirmé d'une petite voix en avalant ma salive de travers.

Faux. Tout ce que je venais de lui promettre était faux. Je ne l'appellerai pas, je ne lui enverrai pas de message. Plus après le mois prochain. Je l'ai prise dans mes bras et je l'ai serrée le plus fort que j'ai pu.

–Tu vas me manquer Lauren.

–Tu vas me manquer aussi Emy.

J'ai fait volte-face et je l'ai abandonnée ici, dans le vacarme incessant de l'aéroport. J'ai avancé jusqu'à la porte d'embarquement sans la lâcher des yeux. Elle me faisait au revoir de la main. Des gens pressés passaient devant elle. Certains étaient au téléphone, d'autres marchaient en tirant des bagages. Chacun d'entre eux avait une vie. Pour certains sûrement plus ou moins banale que celle de leurs collègues. Peut-être que cet homme-là, celui qui portait une chemise blanche et en pantalon noir assis au deuxième rang sur la gauche de Lauren allait s'envoler pour retrouver sa famille à l'autre bout du monde. Ou peut-être bien que cette femme brune, avec les cheveux relevés sur le haut du crâne et son uniforme, travaillait en tant qu'hôtesse de l'air pour pouvoir se payer des vacances bien méritées avec son fiancé- ou peut-être mari - en fin de mois. Il y avait aussi cet homme, au smoking gris chiné devant le magasin de bonbons, au téléphone. Il portait une mallette noire dans sa main droite, où une belle montre argentée était soigneusement accrochée à son poignet. Il allait sûrement retrouver ses enfants et sa femme. Un large sourire a pris place sur son visage, trahissant sa joie. Il a tourné la tête, tout en lâchant son téléphone et une petite fille a couru dans sa direction avant de se jeter littéralement dans ses bras. L'homme l'a attrapée et l'a fait tournoyer dans les airs avant de la couvrir de baisers. Une femme, la trentaine, est à son tour arrivée avec un garçon blondinet d'une dizaine d'années à ses côtés. L'homme à la mallette a mis la petite fille en équilibre sur une de ses hanches avant de se baisser et d'ébouriffer les cheveux du blondinet. Son attention s'est ensuite portée sur la trentenaire, il s'est approché d'elle, et il l'a embrassé avec passion. Elle a fait glisser une de ses mains sur sa joue. Ils se sont séparés et les enfants ont échangé une grimace de dégoût, ce qui m'a fait esquisser un sourire. Tout le monde était heureux. Sans y faire attention, mon regard s'est reposé sur Lauren, et j'ai fini par me retourner. Je n'étais plus capable de la regarder en me disant que je venais de lui mentir. J'ai seulement fait ça pour son bien et j'espérais qu'elle le comprendrait quand elle saurait toute la vérité. La France était du passé. Lauren était du passé et tout ce qui me reliait à ce pays était du passé. Chacune de ces personnes avait un passé, un présent et un futur, y compris moi. J'étais donc prête à revenir chez moi, à Santa Monica, avec ma famille pour retrouver mes proches et tout ce que j'y avais laissé quelques années plus tôt.

A la poursuite de nos rêvesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant