Les Mésaventures de TronMan

II/ Un Joyeux Bordel

Philibert n'arrivait décidément pas comprendre comment il en était arrivé là ! Lui, PDG vivant dans un 200m2 dans le 16ème, se retrouvait à présent dans un monde mystérieux sous l'apparence d'un tronc balloté dans les cieux par un corbeau défoncé.
Il y avait une erreur dans l'équation, un terrible malentendu, une couille dans le pâté !

Une odeur de viande putréfiée lui soulevait le cœur à chaque battement d'aile de son taxi ailé. Le harnais, donné par les champignons fêlés, avait sûrement traîné dans une charogne ou autres réjouissances...
Le comble c'était qu'un doux fumet de merde comblait les arômes déjà délicieusement nauséabonds de son être, lui qui avait gracieusement roulé dans une déjection d'origine inconnue peu de temps auparavant.

« Alors ? D'où c'est qu'tu viens Tronman ?! Claironna le piaf qui volait en zigzag, un peu à cause du poids qu'il transportait, un peu à cause du troisième joint qu'il fumait en l'espace de trente minutes.

- Euh... de Paris. Répondit Philibert avec espoir.

Espoir qui retomba bien vite.

« Connais pas !

- La France ?

- Jamais entendu causé !

- L'Europe ça te dit quelque chose ?

- J'en sais foutre rien ma p'tite brique !

- La... planète terre ? Lança désespérément l'ex PDG.

- Pas d'vantage ! J'crois qu't'es pas d'chez nous !

- Ça j'avais compris ! Où on est alors ? Soupira Philibert, au bord du suicide.

- Là on traverse la forêt du SerpentQuiSeMordLaQueue... À moins que soit celle des MoussesVertesMaisMarronAussi. Répondit Boubou de plus en plus chouté.

- Tu sais où on va au moins ? Parce que La Tour de l'Attraction je sais pas où la trouver moi !

- T'inquiète mon p'tit tronc trop gnon ! Je gère ! »

Tronman soupira en repensant aux différents cadeaux des Adababoués42.
Il y avait tout d'abord ce harnais puant que tenait Boubou entre ses serres, une bourse d'or maigrichone pour les provisions et une carte soit-disant magique qui n'indiquait que la première étape du trajet. Elle devait, parait-il, se compléter toute seule au fur et à mesure qu'ils avanceraient...
Tout d'abord ils devaient atteindre la Tour de l'Attraction où était détenu le premier artefact de la quête :
L'EauQuiBrilleAuxPremièresLueursdel'AubeMaisTouteLaJournéeAussi.

« Tu sais que dans mon monde les corbeaux sont beaucoup plus petits et ne parlent pas ? Ils ne s'habillent pas non plus... »

Ils ne se droguent pas aussi... Songea-t-il amèrement.

Le volatile demeurait étonnamment silencieux et Philibert ne pouvait pas s'empêcher de constater qu'ils perdaient de l'altitude.

《 Euh Boubou... Dis-moi est-ce que c'est normal qu'on chute de manière vertigineuse ? Boubou ? Boubou !! 》

Pas de réponse et une triste vérité s'imposa dans l'esprit de Tronman : Ils allaient s'écraser au sol.

Le vert tendre des arbres se rapprochait de plus en plus vite, le parfum délicat des fleurs et des mousses lui chatouillait les narines et la dureté d'une branche lui explosa violemment le nez. On peut dire que l'atterrissage avait été rude.
Mais le calvaire ne faisait hélas que commencer, en effet le rectangle difforme qui lui servait de corps se mit à rouler à toute allure sur une pente herbeuse et abrupte. Son cri, peu viril, résonnait dans la sylve facétieuse qui avait ponctué la descente de pierres plus ou moins imposantes. Si bien que son hurlement de pure frayeur était ponctué de "Oh !" et de "Aïe !" plus ou moins douloureux.
Et pour finir, au bout de l'allée pentue, il heurta ce qui paraissait être une porte et finit par s'arrêter en s'écrasant contre un bâton en bois...