Prologue

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Mon coeur bat à cent à l'heure. Je jette un oeil à mon frère et après un signe de tête, il introduit la clé dans la serrure et ouvre doucement la porte. Sasori me fait de la place pour me laisser entrer et je découvre notre nouvel appartement. Nous sommes au neuvième étage, nous avons donc de l'espace même si quatre personnes ne pourraient clairement pas vivre ici. La pièce principale est grande et lumineuse - on a une belle baie vitrée - avec une cuisine ouverte et un petit bar. Sasori va pouvoir me cuisiner de bons petits plats. Il a d'ailleurs bien aménagé l'appartement : deux canapés beige, une table basse blanche et juste à gauche, une table crème pouvant accueillir six personnes. Parfait !


Je le suis et il me fait visiter. Un couloir quelque peu obscur mène à un WC, aux chambres et à la salle de bain. Les deux chambres ont plus ou moins la même taille et mon frère a pris la peine de prendre des lits deux personnes pour chacun de nous. Je pourrai inviter des copines, qui sait ? Par contre, il n'y a "qu'une" douche mais elle est plutôt grande et deux lavabos.Pour deux personnes, c'est juste ce qu'il faut. Après avoir fait le tour de l'appartement, je tombe dans les bras de mon frère qui m'ébouriffe les cheveux. J'ai un sourire béat et nous sommes tous les deux contents et soulagés. Déménager n'est pas une mince affaire, surtout pour une adolescente de dix-sept ans et un jeune adulte de vingt-cinq ans. Sasori s'est donné beaucoup de mal pour nous dégoter cet appartement et l'aménager. Rester dans la maison familiale ne nous réussissait pas : trop de mauvais souvenirs. Nos parents ont été retrouvés morts dans cette même maison, par notre ancienne femme de ménage. On pense à un cambriolage qui aurait mal tourné mais rien n'est sûr. La police enquête depuis leur décès, depuis six mois. Sasori voulait qu'on reparte de zéro et la psychologue nous a expliqué que changer d'air nous ferait sûrement du bien. Nouvelle ville, nouveau logement, nouvelle école. Je ne suis qu'à une heure d'Edo, heureusement.


Je pose ma valise dans ma chambre et m'assieds sur mon lit. Je ferme les yeux et respire un grand coup. Mes parents me manquent énormément, j'ai le coeur qui saigne mais j'irai de l'avant afin qu'ils soient fiers de moi. J'espère seulement pouvoir leur rendre justice en arrêtant l'horrible bonhomme qui les a tués. Je range mes vêtements dans la garde-robe et envahis le bureau de tout mon matériel scolaire. Je n'ai pas vraiment hâte de reprendre l'école même si les vacances d'été ont été fort désagréables. Entre le deuil, les papiers à remplir, Sasori qui courait partout pour moi et le travail et les cartons, c'était pas la joie.

- Sakuraaaaaaaaa !

Je sursaute comme une idiote sur ma chaise de bureau et sors de ma chambre pour rejoindre Sasori à la cuisine.

- Oui, quoi ?

- T'as faim ?

Je réalise alors que je n'ai rien avalé depuis ce matin. J'ai une faim de loup alors je lui fais mon sourire de débile. Il rigole et m'indique de mettre mes chaussures. Je cours dans ma chambre pour enfiler le gilet que j'avais enlevé et mets mes chaussures dans le petit hall d'entrée. J'en profite pour me regarder dans le miroir. J'ai les joues creusées - j'ai perdu du poids à la mort de mes parents, des cernes qui contrastent affreusement avec mes yeux vert émeraude et je suis fort pâle. Mes cheveux roses sont d'ailleurs peut-être un peu trop flash à côté de mon teint de cadavre - faut que je dorme !

- Je devrais peut-être les teindre ? je murmure à voix basse.

- En vert pomme ! répond Sasori qui se moque de moi.

Mère Nature nous a dotés de chevelures quelque peu particulières. Entre le rose Barbie et le rouge feu, on n'a pas été gâtés. Jusqu'ici, on a toujours assumé malgré les moqueries mais ce n'est pas facile de se fondre dans la masse. Je hausse les épaules et abandonne pour la centième fois l'idée de changer de couleur. Sasori a toujours réussi à me convaincre.

Mon frère m'emmène dans le nouveau restaurant où il travaille ; un traiteur thaïlandais qui me met l'eau à la bouche. Les serveurs le saluent chaleureusement et m'accueillent avec le sourire. Je suis gênée, je sais pas où me mettre. Affronter l'inconnu, c'est pas trop mon truc. Je dis donc bonjour tout bas et suis mon frère jusqu'à une petite table pour deux dans le fond. J'ai pas le droit de choisir ; ça sera des pad thaï végétariens. Je sautille rien qu'à l'idée d'en manger - c'est mon plat favori - et Sasori prend un poulet au curry jaune, spécialité dont je raffole également. Il a beau se moquer de moi (gentiment), il reste un super grand frère que je n'échangerai pour rien au monde.

- Prête pour demain ?

Demain, c'est la rentrée. Non, je ne suis pas prête à affronter ma nouvelle école. Je vais devoir batailler pour me faire des amis et essuyer les moqueries sur mes cheveux.

- Pas vraiment mais j'ai pas le choix, hein.

- Le premier qui t'insulte, tu lui fous une tarte.

Sasori n'est pas du tout un tyran, non, je ne vois pas du tout de quoi vous parlez. C'est un garçon très gentil. Il est juste un peu susceptible, comme moi, en fait.

- Et je me retrouve chez le directeur dès le premier jour, fantastique ! je rigole.

- Alors insulte-le en retour mais ne te laisse pas marcher dessus.

J'acquiesce en souriant. Les moqueries ne me touchent plus, depuis le temps, je ne réagis plus. C'est peut-être un tort, qui sait ? Au début, je répondais mais ça ne sert pas à grand-chose. Alors je laisse les gens parler jusqu'à ce que j'estime qu'ils vont trop loin. Alors seulement, je me permets d'envoyer une claque verbale. On verra à qui j'aurai à faire demain.

- Promis !

Pour la première fois, on passe un repas dans une ambiance bonne enfant, sans se soucier des problèmes qui nous guettent. Je suis fin prête à affronter la rentrée de demain.

Flamant roseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant