Maudit-e

Chapitre 8

Deux semaines sont passées, et deux semaines c'est long. Au bout de quelques jours, durant lesquels Harry est resté presque chaque seconde avec elle, Ambre a pu rentrer à l'appartement. Elle est interdite d'aller à l'Université pour quelques temps, et ça n'a pas spécialement l'air de la déranger. Harry qui essaie de rester un maximum avec elle est surpris de la voir beaucoup moins atteinte par la nouvelle que les premiers jours... C'est comme si elle avait fait son "deuil" mais même elle sait que ce n'est qu'une image qu'elle préfère montrer. La plupart du temps elle lit les livres qu'il lui ramène de l'école, assise sur le canapé dans des positions improbables.

Le Maudit s'inquiète mais ne le dit pas. C'est à peine s'il se l'avoue à lui même d'ailleurs. L'inquiétude, c'est pas son style habituellement, mais il y a quelque chose dans sa poitrine, une sorte de petite pointe désagréable qui s'atténue quand il entend Ambre rire. Il est plus doux avec elle, se cache derrière des faux prétextes pour justifier son attention démesurée. Ca le rend mal à l'aise de se rendre compte qu'il a vraiment envie de l'aider. Il aimerait revoir Ambre sourire, et dans un sens, ça le dégoute.

Il reçoit des nouvelles de Margaux presque tous les jours, elle dit qu'elle et ses collègues sont très proches de trouver une solution pour aider sa jeune Humaine. Pour l'instant, cette dernière n'a pas vécu de nouvel épisode. Elle sait maintenant pourquoi elle avait si souvent mal à la tête. Il y a le fait d'arriver dans une nouvelle réalité, et la tumeur.

Quand Harry rentre de l'Université ce jour là, il n'est pas seul. Collée contre lui, il y a Charlie. La jeune femme se détache de lui dès le pied posé sur le sol de l'appartement et s'éloigne considérablement, mal à l'aise et même apeurée. Harry hausse un sourcil puis lève les yeux au ciel, visiblement vexé.

"Ambre ! Invité surprise !"

Il passe près de la jeune femme posée au sol contre le canapé, ébouriffe ses longs cheveux roux machinalement et va se servir un verre d'eau dans la cuisine. Ambre lui fait un doigt d'honneur, grogne et remet ses cheveux en place. Elle sait qu'il la vu et qu'il sourit. Elle tente de cacher son propre sourire amusé et se retourne vers Charlie qui n'a toujours pas bougé et semble être à deux doigts de mourir de gêne.

"Salut Charlie", dit simplement Ambre. Elle ne compte pas faciliter la vie de la jeune femme.

"Salut Ambre...", répond Charlie avec une voix étranglée.

La jolie Humaine n'a rien de la femme pleine de confiance qu'Ambre a rencontré il y a quelques semaines. Elle a perdu les couleurs qui parcouraient ses joues et on dirait qu'elle a beaucoup maigri aussi. Elle a l'air mal en point, oppressée par un millier de sentiments contradictoires. Ambre sent une pointe d'empathie apparaître au fond d'elle. Mais elle tient bon.

"Que me vaut ce plaisir ?", demande-t-elle ironiquement en se redressant.

Elle sent le regard de Harry sur la situation et elle sent aussi qu'il s'en amuse pleinement. Mais elle a cette sensation qu'il est n'est pas à l'aise à 100% lui non plus, il a l'air de rester sur ses gardes et ça ne fait que la conforter dans l'idée que faire de nouveau copine-copine n'est pas à envisager. Elle s'assoit sur le canapé et propose d'un signe de la main à Charlie de faire de même sur le fauteuil d'en face. On garde ses distances.

"Je viens voir si tu vas mieux..." Menteuse.

"Je vais mieux, merci. Allez a+ du coup !" répond Ambre en se levant, pressant Charlie de faire de même.

"Non attend !"

Charlie ne s'est pas levée et son intonation est désespérée. Elle n'ose pas regarder Ambre dans les yeux et la honte transpire de tous ses pores. Ambre commence à s'agacer. Elle ne peut s'empêcher d'être contente que la seule personne avec qui elle se voyait amie soit venue lui rendre visite et en même temps... Elle est tellement déçue de la réaction de Charlie deux semaines plus tôt, que son estomac ne se desserre pas. Elle est déçue et elle ne comprend pas, alors à moins que la jolie femme ait une explication, il n'y a pas moyen d'accepter sa présence ou ses potentielles excuses.