Le Fou et l'Enfant -Interlude

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La détentrice du dangereux instrument était une femme d'une quarantaine d'années à l'air assuré. Ses habits était d'une qualité assez étonnante pour quelqu'un du coin, le quartier assez étroit dans lequel ils se trouvaient devaient appartenir à sa "famille".

"-Bienvenu au péage ! Veuillez donner tout ce que vous possédez, et s'il ne s'agit que de vos habits, on les prends quand même !" Commença-t-elle, usant du ton à la fois étonnamment poli, sarcastique et menaçant qu'elle avait perfectionné au fil des années. 

" -Bonsoir !" répondit son nouveaux client d'un ton enjoué, ignorant complètement sa menace. "Je suis a la recherche d'information, vu votre poste, je me doute que vous êtes loin de pouvoir me renseigner, auriez vous l'amabilité de m'indiquer votre supérieur le plus proche ?"

Ce n'était pas la première fois qu'un imbécile avait eu l'audace de jouer le sans-peur, aussi passât-elle à la suite logique, selon elle, de sa menace. Elle avança sa lame de manière à ce que la pointe pique la poitrine de l'étrange, grand et maigre arlequin.

"-Bon écoute, nous sommes censés garder nos manières avec nos clients, mais si tu continus comme ça, tu ne pourras plus jamais jouer au grand mystérieux avec ton masque, ce serait teeellement dommage, tu ne crois pas ?"

La voix enfantine et condescendante qu'elle avait pris sembla faire réagir l'imbécile qui lui faisait face, mais pas dans le sens attendu. Il retira simplement sa capuche, laissant ses long cheveux argents tombés sur ses épaules, et écarta le dangereux outil de sa poitrine, délicatement, du dos de sa main droite, sans une once de colère, ou même de peur. Simplement de l'assurance et de la détermination. Elle se sentit soudainement prise d'un profond malaise, à sa plus grande surprise. Une situation si étrange ne lui était jamais arrivé, et elle n'avait aucune idée de la marche à suivre.

La cause de son incommodité avança d'un pas, et se pencha vers elle. La différence de leurs taille respectives se fit soudainement ressentir, il ne devait pas faire plus d'une tête ou deux qu'elle mais à présent, elle les ressentait. Il lui paraissait trop grand. Les yeux ronds, vides, inflexibles du masque étaient rivés dans les siens. Il posa doucement son autre main sur son épaule, et pressa légèrement, comme pour la maintenir debout ou éviter qu'elle ne s'effondre.

"-Quoi, il ne te plaît pas mon masque madame ?"

Il utilisait la même voix enfantine avec laquelle elle avait proféré sa menace. Seulement, sa version était bien plus inquiétante. Il aurait pu sortir une antique arme à feu de sa poche, qu'elle aurait surement été bien moins effrayé. Cette fois, elle avait bel et bien peur. Alors elle obéit et partit chercher un supérieur sans demander son reste.

Après son départ, le blanc sourire de la part sombre du masque sembla s'étirer, comme s'il était plus fier.



"Et maintenant ?"

Coincé dans une cellule, c'était là les seuls mots qui lui venait. Une heure plus tôt, l'enfant s'était réveillé dans cette chambre poussiéreuse, avec pour seul mobilier un lit et une porte en barreaux de fer rouillés par les années. Au moins la personne chargée de le surveiller lui ainsi que les autres cellules avait l'amabilité de répondre à ses questions. Ainsi il lui avait expliqué comment ils l'avaient trouvé dans une des ruelles de Vermes la veille et demandé où se trouvaient ses parents. Ce à quoi l'enfant aurait répondu, somnolant, qu'il n'en avait pas. Alors ils l'avaient amené ici.

"- Ne te méprend pas, on ne va pas s'occuper de toi très longtemps.

-C'est à dire ?

- On compte te vendre aux enchère avec les objet de la salle à ta droite ainsi que la miss et l'autre crétin là-bas." dit il en indiquant deux cellules un peu plus loin.

Ah.

La situation allait être problématique.

" - Il n'y aucune chance pour que vous me preniez parmi vous ? Je suis jeune, je n'ai nulle part où aller, je suis certain que je pourrais me montrer utile !"

Le geôlier secoua la tête.

"- Désolé petit, on y a bien réfléchi avec la famille mais on a déjà un apprenti, et pas le temps pour un deuxième. Mais ne t'en fais pas, tu es un petit chanceux ! On est les seuls de la ville à avoir une morale, bien à nous certes, mais une morale quand même. Tu peux donc être certain qu'on ne te vendra pas à certains... Dégénérés."

Voilà qui était rassurant.

"-Reposes toi, et profites du calme tant qu'il est présent, les enchères sont demain matin, et elles ont tendance à être très agitées."

L'enfant essaya vaguement d'imaginer des solutions, des moyens de s'enfuir. Certes, mais pour aller ? Il venait de finir le deuil de son ancienne vie, et le départ de la nouvelle s'annonçait déjà compliqué. Finalement, il décida de laisser tomber. Il se laisserait porter par les événements, et avec un peu de chance, ils tourneraient en sa faveur. Après tout, il avait encore l'âge de croire au miracles, pas vrai ?

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