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Le vent glacé brûle mon visage alors que j'avance dans l'allée sombre du cimetière. La nuit est en train de tomber doucement en ce soir d'un mois d'août déjà bien avancé. Le gravier crisse sous mes pas. J'inspire lentement. Cinq grandes inspirations. Essayant de calmer le battement furieux faisant rage dans ma poitrine. Je ne suis pas revenu ici depuis cinq ans. J'ai passé ces cinq dernières années à Tokyo souhaitant oublier tout ce que j'avais vécu ici. Et pourtant je suis de retour. De retour dans cette si grande ville, me semblant si petite. Trois ans sont passés et pourtant rien n'a l'air d'avoir particulièrement changé. Mes yeux scrutent à peine le paysage, à dire vrai. C'est mécaniquement que je poursuis mon avancée jusqu'à arriver au fond. Je m'arrête brusquement. Quelqu'un est assit dos à moi, le genou replié il s'appuie sur son bras gauche. La lumière des faibles éclairages ne me permet pas directement de distinguer de qui il s'agit. Et pourtant, il est assis devant sa tombe. Je me remets à inspire, cette fois lourdement, sans pouvoir m'en empêcher. Mon poing se sert, mes ongles se plantent dans la paume de ma main.
— Vous êtes qui ? dis-je d'une voix peu assurante.
L'homme relève la tête et ne se retourne pas vers moi.
— Je pensais bien que tu viendrais dès ton retour. Je devrais les remercier de m'avoir prévenu. Je t'ai attendu toute la journée.
Il rit faussement.
Je n'arrive toujours pas à discerner la personne se tenant dos à moi. Il se lève, afin de me faire face. Mon cœur chute. Son regard de glace me sonde durement. J'avais oublié à quel point ses yeux chocolat me faisaient peur, combien ils m'avaient même terrorisés par le passé. J'ai un mouvement de recul, très vite arrêté par sa main.
— Trois ans, dit-il froidement.
Je ne comprends pas pourquoi il est là. Pourquoi il me retient. Pourquoi il se trouve devant moi alors que nous n'avons jamais rien eu à nous dire.
— Que me veux-tu, Dean ?
Il ne me répond pas, je tente donc de m'extirper de son emprise, qui ne fait que se resserrer. Je déglutis difficilement, sachant qu'il observe chacune de mes réactions. Comme il l'a toujours fait.
— Trois ans, et tu n'as rien à me raconter depuis tout ce temps ?
Sa voix retentit sèchement et ses paroles restent en suspend entre nous.
— Je n'ai pas envie de te parler, Dean. Je pense t'avoir tout dit lors de notre rencontre sur le pont, voilà déjà trois ans.
— Je me fous de ce dont tu penses. Tu t'es barré sans rien dire. Dis-moi pourquoi.
Sa main libre commence à s'agiter entre nous.
— Tu sais très bien pourquoi j'ai fait ce choix là. Tu en es responsable.
Il repousse ses cheveux en arrière et soupire.
— Putain mais je t'ai dit que ce n'était pas moi ! Tu refuses de croire un mot de ce que je raconte. Tu préfères écouter tous ces cons. Aucun n'est ton ami. Cela ne t'empêche pas de penser comme eux, hein !
— Je ne suis pas non plus ton ami. Nous ne l'avons jamais été. Et... il n'y a non plus aucune chance que cela arrive.
Je tire violemment mon poignet vers moi et commence à m'éloigner, lui tournant ainsi le dos.
— Jay. Je t'ai demandé une réponse ! Ne recommence pas à m'ignorer. Tu sais que je ne supporte pas ça.
Sa voix, aussi dure que la pierre, fait écho derrière moi. J'accélère le pas me dirigeant vers la sortie, ne prêtant plus aucune attention à ce qui m'entoure. Je veux juste rentrer. Rentrer chez moi et ne plus en sortir.
Je n'aurais pas dû revenir. Maintenant je n'ai plus rien pour me protéger de lui.
Elle m'avait prévenu, je ne l'ai pas écoutée. C'est aussi de ma faute, si tout cela arrive. Je le mérite.
Je voudrais repartir, mais je n'ai jamais vraiment eu le choix de quoi que ce soit.
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Fiery Tears
Подростковая литератураCela fait trois ans que Jay a quitté la ville à la suite d'un accident le séparant de sa mère. Et pourtant, Dean, avec qui il n'a gardé aucuns bons souvenirs, ne semble pas l'avoir oublié. Il semble même l'avoir attendu. Le garçon responsable de sa...