Texte 6 Parade

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C'est le bruit qu'on entend d'abord, sur toute la route, le bruit sans les voir. D'abord deux avec leurs siamoiseries qu'on n'a pas tranchées, faute d'un juste milieu. Celui de gauche égrène "je t'aime" un chapelet rose et blanc "un peu, beaucoup", et le passe à l'autre (sans respirer) "énormément, à la folie, pas du tout", et l'autre le dévide à l'envers pour s'en faire des colliers. Ils tournent comme ça en rond et la troupe piétine derrière, de plus en plus vite.

La file des trophées, la gueule serrée au bout d'une pique. Hourras aux têtes brandies des saints au défilé !

Leurs veuves suivent à genoux.

Elles applaudissent.

La relève s'avachit sous les drapeaux fanés. Une douzaine de folles hirsutes se déhanchent contre un mât doré, leurs pieds nus enchaînés. Un singe en képi les tient par un ruban.

Marche sourde des hordes savantes, dix pas derrière, la litanie basse de la terre. Ils ramassent les pièces tombées de la foule sourde.

"Mesdames, messieurs

précaire, pas prévu

présent, on vous écrira, pas présentable

et ma soupe ce soir

reste propre

un sourire."

Ils finissent en hurlant, du vent plein les bras, la voix ne porte pas. Alors ils jettent leur sale sur le doré des costumes. Revanche des têtes lépreuses sous les voiles arrachés.

La troupe approchent et la foule hurle , et l'or derrière se replie. La rue rage contre. Dans une maison, une gosse frappe au carreau.

Sans suiteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant