❣️ Hafsa ❣️Je me réveille en sursaut, aspergé d'eau. Le mal de ça, soubhanallah ! Tante Hawa, après m'avoir arrosé, me demande gentiment, à sa manière bien sûr, de me lever devant elle pour ne pas attirer l'attention sur nous. Je me lève avec difficulté et rejoins la chambre d'Asmaou. Elle me remarque et hésite à s'approcher.
- Je ne mords pas, approche.
Elle plonge dans son lit et je vois qu'elle est triste pour moi.
- Ça fait mal ?
- Oui, un peu. Je m'approche d'elle. Ne sois pas triste, d'accord ?
Elle secoue innocemment la tête.
- Tu as faim ? J'ai gardé un peu de riz, dit-elle, comme si elle venait juste de s'en souvenir.
- Oui, à bien y réfléchir, je n'ai pas mangé depuis combien de temps ? Deux jours ? Je ne m'en souviens plus.
Elle sort presque en courant et revient avec un bol de riz sauce aux feuilles de patates.
- Mange, dit-elle en souriant. J'ai aidé maman à préparer.
Je souris et prends la première bouchée.
- Hum, c'est délicieux, dis-je pour lui faire plaisir.
Mes blessures me font atrocement mal, mais elle est si mignonne et a tellement de pitié dans les yeux que je m'efforce de sourire. À ma troisième bouchée, tante Hawa entre furieusement dans la chambre.
- Quoi ? Elle m'arrache le bol des mains et me gifle. Espèce de sorcière, qui t'a permis de manger ?
- Je vais finir par devenir une sorcière à force d'être traitée ainsi, je murmure.
Je baisse les yeux et mes larmes coulent à flots.
- C'est moi qui lui ai donné à manger, ma tante. Elle a faim, intervient Asmaou.
- Tu oses répondre à qui ? Crois-tu que je suis ton amie ? S'énerve-t-elle contre la petite.
- Ma tante, j'ai demandé à Asmaou de me donner à manger, je suis désolée, dis-je en remarquant que la petite avait eu peur.
- C'est ce que je pensais. Demain matin, tu vas laver mes habits et ceux de ton père.
Elle tourne les talons et me laisse avec Asmaou.
- Elle est toujours méchante avec tout le monde, elle traite tout le monde de sorcier alors que c'est elle la sorcière.
- C'est ainsi, mais aujourd'hui la sorcière me laisse dormir dans un lit donc profitons avant qu'elle ne revienne, je souris.
Elle rigole et je me couche.
Je suis réveillée par le chant des oiseaux et du coq, informée qu'on devrait se lever. Je m'étire, lis l'invocation à lire le matin, me lève, fais mes ablutions. Le ciel est toujours sombre. Comme je n'ai ni téléphone ni montre, je ne peux savoir l'heure qu'il est. Après ma prière, je prends le balai et balaye toute la cour. Il fait maintenant plus jour. J'entre dans la chambre de tante Hawa et trouve trois baignoires remplies d'habits.
- Du courage, Hafsatou, je m'encourage.
Je sors et demande à Asmaou de m'accompagner, mais la sorcière refuse catégoriquement. Je prends alors une à une jusqu'au marigot. C'est un peu distant mais je n'ai pas le choix. Je me mets automatiquement au travail.
- Hafsatou ? C'est ça ?
Je me retourne et vois un homme assez beau, et il a l'air riche vu ses habits. Il me sourit. Je détourne mon regard et continue à travailler.
- Tu ne me demandes pas comment je connais ton nom ?
- Je ne veux pas savoir, dis-je dans ma barbe, mais il arrive à entendre.
- Je te le dirai quand même. Je t'ai vue passer et j'ai demandé, dit-il en s'asseyant sur l'un des rochers.
- C'est bien. En quoi puis-je t'aider ?
- Rien, tu es juste très belle. Non, tu es majestueusement belle, dit-il en me regardant droit dans les yeux.
- Merci, dis-je en détournant le regard.
Il reçoit un appel et se lève.
- On se revoit bientôt, Haf, dit-il en affichant un sourire chaleureux.
Lorsqu'il est loin, j'essaie de reprendre mon travail. Lorsque je finis, je rentre à la maison au même moment que l'heure de la prière du Dhor. Arrivée, mon paternel, avec son visage de chaytan, m'attendait.
- Assalamou aleykoum, Babein.
- Viens ici.
Je le retrouve à la terrasse avec un vieillard.
- C'est elle, Hafsatou.
- Elle est bien, c'est conclu. Nous allons venir demander sa main.
Le choc, la main de qui ?
Ils se lèvent et l'autre vieillard s'en va.
- Babein, la main de qui ?
- De moi.
- Hein ?
- Tu es idiote ou quoi ? C'est ta main, bien sûr. Il veut une femme pour son neveu donc demain tu seras là-bas et mariée.
- Son neveu, il est là ? Je peux le voir d'abord ? S'il te plaît, papa.
- Non, tu ne vas pas le voir, et je ne veux plus de tes questions, compris, dit-il en voulant me laisser.
- Ne me force pas à me marier, s'il te plaît. Grand-père n'aurait jamais fait une chose pareille.
- Lui, c'est lui, moi, c'est moi, et heureusement, il est mort. Si ça te dérange, retrouve-le dans sa tombe, dit-il en sortant de la terrasse.
- Et si je refuse ?
- Si tu refuses ? Il se retourne subitement et me regarde avec haine. Quoi, dire si tu refuses ? Bon, j'ai trouvé, je te vendrai à des personnes qui cherchent des prostituées. Je crois que cela t'ira mieux que le mariage même. Ne me cherche surtout pas, Hafsatou, sinon je te jure que je te ferai vivre l'enfer chez moi, espèce de fille indigne.
Je recule en pleurant pour ne pas qu'il me frappe. Alhamdoulilah, il ravale sa colère et me laisse seule.
Me marier ? Comment est-il ? C'est un homme de deen ? Aime-t-il la religion ? M'aimera-t-il ? Ou bien il me fera vivre l'enfer comme les autres ? Pourquoi je ne peux pas me défendre ? Dire ce que je pense ? Pourquoi je me tais toujours lorsqu'on m'inflige les choses les plus atroces du monde ? Pourquoi moi, tout simplement ?
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A Chacun Ses Péripéties
SpiritualLe chemin n'a jamais été facile pour hafsatou. Elle a des blessures partout. Dans ses souvenirs, des regards, des rires, des mots blessants, des coups bleus et durs et peu d'encouragements et de sourires. Il y avait toujours au fond d'elle, cette...