Chansung

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963 mots
Mention de suicide, pas angst pour autant.

Bang Chan × Han Jisung
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Chan monte les escaliers avec une certaine lassitude. La journée n'est pas captivante et il a hâte d'être la semaine suivante pour l'évaluation mensuelle. Il arrive à la porte qui doit le mener au toit. Il a pris cette habitude de déjeuner là-haut. Il s'y sent à l'aise, dans son élément. Il s'y sent bien. Alors il prend la poignée puis ouvre la porte et un léger vent frais de printemps vient lui caresser la peau. Mais l'endroit n'est pas comme d'habitude. Une mélodie s'élève dans l'air et laisse Chan sans voix. Il a l'impression de rêver, comme si un ange lui chantait une berceuse. La chanson est triste, cependant. Et la voix l'est également. C'est une chanson d'adieu. Elle transmet tant d'émotions, Chan en est bouleversé alors qu'il ne connaît même pas l'auteur de cette douceur. Il s'avance doucement sur le toit et le voit. Debout, face au vide. Il le voit. Sur le rebord de ce toit.

- Pourquoi est-ce que tu gâcherais une si belle voix ?

Le jeune adulte se retourne, cessant son chant. Il regarde Chan avec des yeux vides.

- Pourquoi, si tu trouves ma voix si belle, tu ne m'as rien donné ce matin quand je chantais dans la rue ?  Tu es passé devant moi comme si je n'existais pas.

Chan se risque à avancer d'un pas.
- Comment est-ce que tu peux te souvenir de moi ?

- Je n'oublierais pas un si beau visage.

- Je n'oublierais pas une si belle voix. Si je t'avais entendu alors je t'aurais forcément donné quelque chose.

- Et pourtant. Les gens passent devant moi tous les jours sans s'arrêter. Ils ne m'entendent pas. Ils ne m'entendent plus. Ou ils ne veulent pas m'entendre. Un voile recouvre leurs yeux, comme s'ils se protégeaient d'une douleur qu'ils ne pouvaient concevoir. Ou parce-qu'ils sont bien trop égoïstes pour donner une seule pièce à un sans-abri de 19 ans. En attendant, de cette douleur je suis le martyr.

Chan reste figé.
- Si... Si tu veux, mon porte-feuille est en bas e-

- Gardes ton argent. Si je comprends bien, tu es stagiaire. Tu en as besoin. Moi, je vais mourir. En réalité, je le suis déjà. Il n'y a plus que mon corps qui vive, mon cœur n'a même plus l'envie de battre. Tu dois penser que je fais mon mélodrame. Que je veux attirer l'attention. En réalité, si je suis monté sur ce bâtiment, c'est parce-que c'est le plus haut de la ville et personne ne peut me voir d'en bas. Je ne pensais pas que quelqu'un monterait à ce moment là... c'est bien triste. Je vais devoir revenir demain. Je préfère t'épargner cette vue. Je ne veux pas que tu te sentes responsable.

Le jeune brun descend du rebord et dépasse le corps paralysé de Chan, se dirigeant vers la porte. Mais Chan revient de ses songes.

- Attends !
Il se retourne vers l'étranger.
- Comment est-ce que tu t'appelles ?

Le jeune homme fait face à Chan.
- Jisung. Han Jisung.

- Moi, c'est Chan.

Jisung hoche la tête.
- Enchanté, Chan.
Puis il se retourne et sort.

Le lendemain, Chan monte sur le toit à l'heure du déjeuner, et la voix angélique est là.

- Bonjour, Jisung.
Le concerné se retourne et descend du rebord, visiblement ennuyé.
- Je suis heureux de te revoir.

- Pourquoi est-ce que tu ne peux pas me laisser mourir ?

- La réponse se trouve dans la question. Je ne peux pas te laisser mourir. C'est tout.

- Mais pourquoi ?

Chan glousse doucement.
- Je veux entendre ta voix à nouveau.

- Et si j'arrête de chanter ?

Un sourire tendre prend place sur le visage de Chan.
- Alors ce sera pour voir ton visage que je viendrai tous les jours.

Bien malgré lui, Jisung rougit.
- Alors je changerai d'immeuble.

- Je ferai tous les toits de la ville jusqu'à te retrouver.

- Tu ne me retrouveras jamais à temps.

- Tu veux parier ?

Jisung râle, visiblement ennuyé par cet inconnu qui ne le laisse pas faire. Puis il prend une grande inspiration et lève la tête, plongeant son regard dans celui de son aîné.

- Je n'ai pas de famille, pas d'ami, pas de travail et plus de rêve. Je n'ai même pas de logement, rien de quoi manger le soir, c'est à peine si on accepte de me donner de l'eau.

Chan baisse la tête.
- Je ne peux pas comprendre tout ça, c'est vrai...

- Tu as un rêve et un avenir, tu es logé et nourri. Tu as probablement des amis et j'imagine que tu as une famille. Je ne veux pas te faire culpabiliser, tant mieux si tu es heureux. Mais laisses moi mourir, s'il te plaît.

- Non.
Jisung est déboussolé par le ton sévère de Chan.
- Je ne peux pas comprendre mais je ne te laisserai pas mourir. Je viendrai te voir tous les midis, sur ce toit. J'entendrai ta voix et elle me rendra heureux. Puis on discutera pendant des heures en regardant le ciel. On discutera et je te ferai oublier tous tes malheurs.

Jisung sourit tendrement.
- Tu es adorable, Chan. Mais tu ne pourras jamais me faire oublier mes malheurs. Dès que tu partiras, je serai de nouveau confrontée à cette vie pitoyable. À cette faim constante, à ce froid glacial, la nuit.

- Je t'inviterai à dîner ! Et on pourra te faire rentrer en secret dans les dor-

- Chan. Même toi tu n'y crois pas.

Une lueur déterminée brille dans le regard de l'Australien.
- Je te sauverai. Je trouverai un moyen. Je te sauverai et tu souriras. Tu souriras si largement que tu en auras mal à la mâchoire. Tu verras.

Jisung souffle puis se tourne vers la ville.
- Tous ceux qui m'ont fait cette promesse sont partis en me prenant tout.

- Alors je ne te promets rien, mais je te le prouverai.

Recueil d'OS Stray KidsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant