23 : Réunion

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Tu as marché pendant au moins une heure et demie à travers la forêt sombre. 

Une heure et demie à marcher sur des bâtons et des rochers et à traîner les pieds dans des morceaux de bois intacts. Il faut admettre qu'il y a un peu de sueur qui perle sur ton front au fur et à mesure que tu avances, te refroidissant rapidement dans l'air froid. 

Le silence de la nuit et des bois, le doux bruit des insectes et des animaux sont les seules choses qui te tiennent compagnie pendant ton voyage. 

Il fait froid sans ton lourd manteau. L'air mordant siffle à travers les interstices de tes vêtements déchirés et se glisse contre ta peau, resserrant et hérissant les poils de tout ton corps. 

Tu te divertis en soufflant tes respirations nuageuses en longs courants brumeux devant toi, puis en tirant directement au milieu de ceux-ci. 

Tu ne détends jamais. 

Même lorsque le sang s'assèche et que tes pieds trottent, tes épaules ne bronchent pas en raison de la position serrée dans laquelle tu les maintiens. Tu es constamment à l'affût des bruits de pas sournois ou des voix faibles. 

C'est une pression qui te démange au fond de toi, une petite voix qui crie que tu dois surveiller tes arrières, tes avants et tes côtés, parce que ce sont des professionnels dans ce domaine. 

Ce sont des professionnels et tu es perdue dans la forêt, donc tu es évidemment dans une position de faiblesse. 

Tu te demandes si Jungkook n'a pas saigné sur le sol de la forêt. 

En te mordant la lèvre pour que la douleur te ramène à la réalité, tu cesses de t'attarder sur ces pensées et continues ton périple. Il ne reste que peu de temps avant que les arbres commencent à s'éclaircir et qu'une faible lumière brille à travers les interstices.

Tu sors des bois sur une route pavée, la surface lisse et régulière donnant un certain relief à tes pieds fatigués. Un révèrbère brille quelque part loin devant, illuminant le tronçon sur lequel tu te trouves. 

Au loin, tu peux en voir un autre, puis un autre, formant une traînée de lumières qui mène à une faible lueur au-delà. Une ville, tu l'espères, et pas trop éloignée. 

L'espoir et l'anticipation occupent la cavité inquiète de ta poitrine. 

S'il y a une ville, tu peux te procurer de la nourriture. Des vêtements. Peut-être même un bus. 

Et l'endroit où tu peux monter dans un bus est le lieu de ton salut. 

Tu peux partir d'ici, et de Séoul, et de partout et de tous ceux qui te suivent.

Cette fois, tu iras à la campagne au lieu d'une ville, et tu changeras à nouveau de nom. Il est facile de s'imaginer en été, vêtue d'une paire de salopettes et d'un pare-soleil, entrain de travailler dans les champs d'une ferme à la campagne. 

Être agricultrice pour le reste de ta vie te semble paisible, et si normal. Tu aurais dû y aller pour commencer. 

Cette marche passe plus vite en raison de ton excitation, qui met un rebondissement dans ta foulée. Tu danses presque lorsque de petits bâtiments commencent à surgir sur ta gauche et ta droite, et que la douce tranquilité d'une petite communauté au bord de la route t'embrasse. 

Il y a un petit magasin qui a un panneau lumineux Ouvert 24 Heures accroché à la vitrine, ce dont tu es incroyablement reconnaissante. L'intérieur est calme et chaleureux, éclairé par des lampes fluorescentes qui bourdonnent légèrement, comme un essaim de mouches planant dans la zone aérienne du magasin.

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