Lettre 2

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7 juin 2020

Gabygab, as tu été enlevée par des extraterrestres ?

Comme tu commences à le comprendre, je ne suis jamais contente. Où est passée ma Gaby avec ses fermetures interminables ? Mais je vois bien que tu n'as pas été enlevée par des extraterrestres, parce que cette lettre, c'est du pur Gaby. D'ailleurs, si tu étais enlevée par des extraterrestres, et que tu ne devais en informer une unique personne, qui serait-ce ?

Tu décris la nuit comme je décrirais la mort, gris, vide, triste. Pour moi, la nuit est jaune. Et si l'on ne voit les fantômes que la nuit, c'est parce que c'est là que le monde revêt son manteau mystique. La nuit, c'est comme si tout les rêves des hommes se retrouvaient, et dansaient dans les rues. La nuit, c'est le calme, le vide oppressant. La nuit, il n'y a plus que toi, et aucun échappatoire. C'est beau. C'est vrai, la nuit.
Le jour, c'est comme un carnaval. Partout, c'est le bruit, c'est les couleurs, c'est les gens. Partout, c'est tout. C'est comme un masque multicolore devant le monde. Le jour, c'est là que les monstres naissent. Personne ne les voit, parce qu'ils se cachent derrière l'avalanche de lumières, mais quand tu as mis le doigt dessus, ils ne te quittent plus. La nuit, c'est la nuit qu'on voit enfin le monde et ses vraies couleurs.
Et, comme je ne pense pas que nous trouverons une fin à cette histoire si facilement, je te laisse une citation que j'aime beaucoup :
" Le jardin dormait encore. Je l'ai surpris, nourrice. Je l'ai vu sans qu'il sen doute. C'est beau, un jardin qui ne pense pas encore aux hommes."

La mer est rouge. La mer est un mystère. Pour moi, c'est la mer, c'est tout. C'est la vie, et la mort. Le bruissement des vagues, c'est la voix des fantômes. La voix de tous ceux qui aimaient et étaient aimés. C'est des mots d'amour murmurés à l'oreille des vivants. C'est la preuve qu'on s'aime, malgré tout. C'est pour ça que c'est si calmant, le bruit de la mer. C'est le bruit de l'amour. Et si elle est salée, c'est pour toutes les larmes qui ont été versées, faute de ne pouvoir être consolées. La mer, c'est l'ultime adieu des morts à ceux qu'ils aimaient. C'est pour ça que j'ai ramassé ta bouteille.

Dis, tu aimes la violette, ou tu trouves ça écoeurant ? C'est si doux, si enivrant. C'est le parfum du printemps, des fleurs, et du bonheur aussi. Là, quand je t'écris, je suis en haut d'un arbre, le sachet de bonbons posé à côté de moi. Le soleil brille à travers les branches, fait de jolies tâches lumineuses sur ma feuille. Je suis pieds nus sur l'écorce. Ça fait du bien d'être là haut. Le monde pourrait bien s'écrouler autour de moi, je ne le remarquerais pas.

Tu crois que les nuages rient en nous voyant ? Les tiens doivent être rouges, bleus, verts, jaunes, arc-en-ciel. Ça doit être beau, des nuages-papillons.

Lune,
Toujours à la recherche de son aurore boréale.

Ps: Tu dis que tu es le soleil, mais je ne suis pas d'accord. Tu peux pas être le soleil. Le soleil c'est une étoile. Toi, t'es plus qu'une étoile. T'es la constellation à toi toute seule

La lune rêve aussiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant