Finalement, ce n'est qu'en fin d'après-midi que je me retrouve au grenier en compagnie d'Alex et de ma nièce. Mes parents sont rentrés chez eux, pendant que Timothy et Gabrielle sont partis soigner les animaux. Je me sens tout de même plutôt sereine, car je sais qu'Alexander n'osera pas me tourmenter en présence d'Annabelle.
Ma sœur et mon beau-frère ont une nombreuse collection de décorations de Noël. Timothy m'a dit que son cousin et lui s'occuperaient plus tard de transporter tout ce qui concerne la déco extérieure. Ce qui nous laisse tout de même huit gros cartons à porter au rez-de-chaussée.
— Je vais descendre les guirlandes et les boules de Noël ! décide Anna. Ils ne sont pas lourds et j'y ferai très attention.
— Tu es sûre que tu ne veux pas que je t'aide ?
— Non, je veux le faire toute seule. Maman dit que je suis très auto-gnome.
Je fronce les sourcils puis éclate de rire lorsque mon cerveau réalise ce que ma nièce a voulu dire.
— Autonome, ma puce, pas auto-gnome.
Anna hausse les épaules :
— Bah, c'est pareil !
Puis elle s'en va avec les cartons en chantonnant.
Ce que je redoutais arrive : je me retrouve seule en compagnie d'Alexander. Je crois que je suis maudite.
— J'aime bien le mot auto-gnome, moi, dit-il, l'air amusé.
Je tourne la tête vers lui, et après avoir échangé un regard complice, nous nous mettons à rire.
Puis, soudain, je retrouve mon sérieux.
Je ne dois pas commencer à relâcher ma vigilance.
— Tu te remets à jouer au glaçon. Qu'est-ce qui t'arrive, Muffin ?
— Rien. Tu ne comprendrais pas.
Alex se rapproche. Alerte. Mayday, Mayday, Mayday !
Je suis en totale détresse.
Il n'est plus qu'à quelques centimètres de moi. Il est si près, que je peux observer les paillettes d'or dans ses yeux verts ainsi que ses longs cils, et sentir l'odeur de son parfum qui est particulièrement envoûtante.
— Je ne comprendrais pas quoi ? Que tu fais tout pour me repousser alors qu'en vrai tu meurs d'envie de m'embrasser ?
Je reste stupéfaite de son audace. Bon, OK, il a totalement raison, mais il n'a pas à le savoir ni à dire ça à haute voix, saperlipopette !
— T'as vraiment pas changé, t'es toujours aussi prétentieux.
— Et toi, une vraie tête de mule.
Je le foudroie du regard. Ses yeux descendent sur ma bouche avant de se replonger dans mes pupilles bleues comme l'océan. J'ai le cœur qui bat à mille à l'heure. Je ne bouge même pas lorsqu'il pose une main sur ma joue et qu'il me caresse la lèvre inférieure avec son pouce. À cet instant, je ne réponds plus de rien.
Je ferme les yeux, attendant un baiser que j'espère plus que je ne l'avouerai même sous la torture quand...
— Tatie !
Je fais un bond et m'éloigne d'Alexander comme si je venais de me brûler à son contact. Ses yeux sont toujours posés sur moi lorsque Annabelle fait irruption dans le grenier.
— J'ai tout posé près du sapin.
— C'est bien, ma puce.
— Tu vas bien, tatie ? T'es toute rouge !
Merci Sherlock ! Il n'y a pas des piles à enlever par là pour la réduire au silence ?
Alex ne peut retenir un petit éclat de rire.
— Je vais très bien, Anna. C'est juste qu'il fait chaud dans ce grenier, surtout dès qu'on bouge un peu. Attrape le carton qui contient les sujets de Noël et descend-le au salon, veux-tu ? Alexander et moi allons te suivre avec le reste.
— Daccodac ! À tout de suite ! s'écrie-t-elle avant de se saisir de la boîte et de disparaître à la vitesse de la lumière.
J'essaie d'éviter le regard d'Alexander et de faire :
1/ Comme s'il n'était pas là.
2/ Comme si on n'avait pas été à deux doigts de s'embrasser.
Mais bien évidemment, Monsieur ne compte pas me laisser m'en tirer si facilement.
— Rebecca ?
Après avoir soulevé un carton, je me retourne vers Alex.
— Quoi ?
— C'était très agréable de te rendre toute rouge.
Le mufle !
— Ne te fais pas de films, Alex.
— Je ne fais que constater la réalité, Muffin. On sait l'un et l'autre que si Annabelle n'avait pas débarqué à ce moment-là, on se serait embrassé. Et tu aurais apprécié ça.
— Tu ne doutes vraiment de rien !
— Oses me regarder droit dans les yeux et me dire que tu n'en mourrais pas d'envie ? me provoque-t-il en s'approchant de moi tel un prédateur.
Je maudis mon cœur qui se met à danser la samba, et les papillons qui virevoltent dans mon estomac. C'est Alexander Delaney, bordel ! Je dois tout faire pour me tenir éloignée de lui.
On dirait que j'ai perdu l'usage de la parole, je n'arrive pas à lui répondre, peut-être car je déteste mentir. Ou que là, dans l'immédiat, je n'en suis juste pas capable. Pas quand il me regarde de la sorte.
Si je le pouvais, je me mettrais une gifle pour me pousser à réagir !
Mais non, je reste plantée là. Silencieuse. Le souffle court.
Alex passe alors devant moi avec deux cartons qu'il a pris dans ses bras, me frôle et murmure en affichant son éternel petit sourire insolent :
— C'est bien ce que je pensais, Muffin.
Et après m'avoir adressé un petit clin d'œil, il s'en va, l'air satisfait.
Je me maudis intérieurement.
*
— Regarde, Xander ! C'est la décoration que j'ai réalisée à l'école l'an dernier ! Tu la trouves jolie ?
— Elle est superbe, Anna. Tu es une vraie artiste, la complimente Alexander.
Je souris de voir ma nièce rougir de contentement.
Nous venons juste de lancer la playlist de chants de Noël quand Gabrielle nous rejoint avec Tim. Ils sont là pile à temps pour nous aider à orner le sapin.
J'ai l'impression de retomber en enfance, et je me laisse emporter par la bonne humeur générale.
— M'man, on pourrait fabriquer des guirlandes de pop-corn ?
— Si ton père promet de ne pas en manger la moitié comme l'an passé, oui, pourquoi pas, ma chérie.
— J'ignorais qu'elles étaient destinées au sapin ! se défend Timothy.
Nous rions tous. Mon beau-frère est un grand gourmand, et ce n'est un secret pour personne. Si les sucres d'orges qui décorent le sapin n'étaient pas des faux, je suis quasi certaine qu'il les croquerait un à un, et qu'il n'en resterait plus un seul d'ici Noël !
Cela dit, on a tous nos petits défauts, et ils ne nous empêchent pas de tous nous aimer très fort. Je souris tendrement en regardant Tim porter Annabelle afin qu'elle puisse accrocher l'étoile tout en haut du sapin.
Anna semble tellement fière et heureuse : elle rit aux éclats et ses yeux brillent de mille feux.
J'aimerais bien avoir de nouveau sept ans et demi comme elle.
🎄🎀🎄🎀🎄
J'espère que ce petit chapitre vous aura plu, à bientôt pour la suite 😀 !!
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Noël sous un ciel irlandais
Literatura KobiecaQuand Rebecca perd son job de rédactrice quelques semaines avant les fêtes de fin d'année, elle décide de quitter Dublin pour quelques temps. La jeune femme part alors se ressourcer auprès des siens, dans le sud-ouest de l'Irlande, près de Cork. B...