β'

18 5 0
                                    

Elle était là, la revanche de l'arc-en-ciel détruit par l'arrivée de la nuit ; sur les bouteilles de verre coloré et de plastiques diaprés, les canettes aux éclats métalliques et les grands gobelets rouges échoués sur le sol, chaque surface plane et dans les mains des éveillés.

Rien ne change. Ils ont froid dans leurs sourires alors ils se brûlent de l'intérieur avec de l'eau-de-vie pour retrouver le chemin de la maison au travers des bras d'un autre qui s'envolera au matin.

Il ne veut pas vivre ça encore.

Il en a déjà tellement souffert et cela fait trop longtemps que des asphodèles fleurissent sur ses pas.

Autant visiter le grand jardin.

Ses lèvres s'étirent dans un rare sourire à cette réflexion. Il est si fatigué des mensonges qui le forcent à agir comme quelqu'un qu'il n'est pas.

Chaque minute, c'est une de ces grandes lames qui s'écrasent sur son corps. Sans un bruit. Sans écume.

Le contenu de son verre valse tandis que la rondelle de citron se débat désespérément pour rester à la surface. Il s'en amuse.

La musique change et bientôt des silhouettes fendent la foule pour inviter à danser les sublimes nymphes qui l'entourent et échanger avec les encore plus magnifiques éphèbes qui gravitent à ses côtés en se vantant de victoires parfois imaginaires pour satisfaire un ego par l'envie et l'attention.

Tous ne lui ont à peine dit qu'il a déjà oublié leurs prénoms.

Ce n'est que des inconnus qui pensent prononcer correctement le sien.

Le liquide devient amer et ses doigts tatoués abandonnent son verre presque vide sur un rebord tandis qu'il s'éloigne vers des escaliers semblant s'inciser dans les veines du navire.

Il fuit la lumière.

ivre.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant